Travailler plus, produire plus ?

1er mai 2007 - 13h51 - Economie - Ecrit par : L.A

La relation entre le volume horaire de travail et la production n’est pas, dans l’absolu, évidente, car le problème tient moins au temps de travail qu’à la productivité globale. La comparaison des données relatives à la durée « normale » de travail hebdomadaire entre pays soulève des difficultés, car l’exercice élude des indications portant sur les heures supplémentaires, la durée de congés annuels ou les jours fériés, casse-tête des industriels marocains.

Si en tant qu’indicateur, la durée hebdomadaire de travail reste imparfaite, elle donne néanmoins une première idée sur la capacité d’un pays à créer de la richesse et donc à s’insérer dans la compétition internationale.

Ce n’est pas forcément le pays qui affiche le temps de travail le plus élevé (à ne pas confondre avec le temps de présence sur le lieu de travail) qui a l’économie la plus compétitive.

Avec 6,5 heures et demi de travail de moins en moyenne que le Maroc, la Finlande est pourtant l’économie la plus compétitive de la planète, selon le World Economic Forum. Le pays de Nokia est d’abord celui de nouvelles technologies, de l’innovation et à la qualité de vie irréprochable. Le tout, doublé d’un système de protection sociale qui fait rêver le monde entier. Comme ses voisins scandinaves, la Finlande a réussi une synthèse entre les contraintes de compétitivité et la réforme de son « modèle » social, fondé sur une forte solidarité qui fait consensus dans la classe politique et dans l’opinion publique. De même, l’Allemagne, dont les salariés travaillent en moyenne 41,7 heures par semaine est le premier exportateur mondial.

Au Maroc, la durée légale de travail est plurielle, contrairement aux pays européens (voir l’infographie). Le législateur introduit un discriminant entre le secteur privé et l’administration publique. Pour le premier, le temps de travail hebdomadaire est théoriquement fixé à 44 heures. Dans les faits, cadres et employés, qui travaillent dans les grandes entreprises et les secteurs exposés à une forte compétition internationale, vont bien au delà de ce volume.

Que faire lorsqu’on est en concurrence avec des pays qui ne comptent pas les heures de travail ? Dans les usines chinoises, vietnamiennes ou indonésiennes, le respect du planning de production et des délais de livraison passe avant toute considération relative à la réglementation du temps de travail, lorsque celle-ci existe. Pour les entreprises marocaines, le piège serait de copier les armes du concurrent en s’engageant dans un combat perdu à l’avance. Il est de notoriété publique que bien des petites entreprises, notamment dans le secteur confection-textile, font travailler leurs salariés au delà du plafond légal et sans compensation.

49 heures par semaine en Islande

Dans des centaines d’unités ou de petits ateliers qui pullulent au rez-de-chaussées des immeubles à Casablanca, les journée de travail oscillent en moyenne de 10 et 12 heures.

La vraie bataille doit porter sur le rattrapage d’écarts de productivité par l’élévation des compétences et de la dextérité des salariés, la formation et la modernisation de l’outil de production.

Pour l’administration publique et les collectivités locales, la durée de travail hebdomadaire est de 37,5 heures, soit moins que la moyenne observée dans l’Union européenne, son principal partenaire économique. Mais si l’on devrait s’assurer de la réalité du temps de travail dans certains services publics, les enquêtes revéleraient bien des surprises.

En Europe, l’Islande avec ses 49 heures hebdomadaires et la France et ses 35 heures, avec cependant un niveau de productivité de travail qui figure parmi les plus élevés du monde, sont les deux extrêmes.

Comparé à ses concurrents de la « nouvelle Europe » – République Tchèque, Pologne, Slovénie, etc. –, le Maroc affiche un à deux points au dessus de la moyenne du temps de travail hebdomadaire. Sur le papier, les salariés marocains travailleraient plus longtemps que leurs homologues polonais ou tchèques. Mais ces derniers, mieux formés et plus habiles à l’usine, seraient plus productifs.

L’Economiste - A. S.

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