Vous avez dit ’immigré’ ?

16 septembre 2004 - 23h06 - Maroc - Ecrit par :

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"Zamgriyas", "Facance", les "Beurs", "les immigrés", "les enfants issus de l’immigration", "les enfants de la deuxième génération", de la troisième, la quatrième, la cin Tous ces termes désignent une seule et même population : les Marocains qui résident à l’étranger.

Mais de qui parle-t-on réellement ?
Des Marocains immigrés entre les années 50 et 80 dont les enfants sont nés en Europe ?

Des Marocains immigrés qui ont laissé derrière eux femmes et enfants et qui, une fois retraités, rentrent "définitivement" au bled ?

Ou alors de ceux qui, même retraités préfèrent rester en Europe à côté de leurs enfants ou pour bénéficier de soins ?

Ou alors parle-t-on des jeunes marocains nés sur le sol européen ?
L’on remarque ainsi que la situation est assez complexe. La communauté marocaine à l’étranger est plurielle et complexe. Ses habitudes, ses attentes et mentalités diffèrent.

Rappelons que pour la "génération des parents", l’immigration, officiellement provisoire, s’est faite pour des questions essentiellement économiques. Arrivés en terre européenne, ils constituaient une main d’oeuvre mobile, peu instruite. Par l’envoi de devises, l’électrification des zones rurales, la construction ou l’acquisition des biens immobiliers, ils tenaient à participer au développement économique de leur patrie. Les parents ont vieilli et les enfants, pour la plupart, ont pris le relais dans le domaine sportif, artistique, associatif Nés sur le sol européen, ils constituent tout de même une richesse pour le Maroc.

Parlons un peu de ces jeunes Marocains nés à l’étranger et plus particulièrement en Europe. Cette jeune génération s’affranchit de plus en plus des habitues des parents et se voit dotée d’au moins deux langues et deux cultures. D’ailleurs, ils seront qualifiés eux-mêmes d’immigrés alors qu’ils ne sont "nullement venus d’ailleurs". Rappelons pour cela que les termes "immigré/émigré" représentent de part et d’autre de la Méditerranée un vaste ensemble fourre-tout rassemblant les primo-migrants et leurs enfants nés en Europe.

Ici se situe un problème fondamental : l’utilisation généralisée et abusive de la notion d’immigré, le problème de reconnaissance lié à une terminologie très mal définie. Ainsi, on les montre du doigt, les marginalise, les immobilise.

A un "vive le Maroc" prononcé spontanément cet été, on nous répond par "mais vous n’êtes pas Marocains !". En protestant, on nous octroie un titre provisoire : "D’accord, disons que vous êtes des Marocains d’été !". Fin de discussion.

De plus, les stéréotypes ne manquent pas : en voiture, on roule vite, on est prétentieux, on ne maîtrise pas l’arabe et on "cause mal la France" (en effet le français utilisé couramment en France n’a rien à voir avec le français "académique" des livres scolaires !). A cause de nous, le prix de la tomate augmente Certes ! Mais l’image déplorable véhiculée par une minorité ne doit pas occulter les véritables valeurs de fraternité, d’ouverture et de civisme d’une grande majorité !

Cette nouvelle génération a, de par sa culture, forgé un amour pour le Maroc. Elle revendique sa place dans les pays européens mais également ses racines. On n’hésitera pas à sortir le drapeau national, à différentes occasions et ce, dans les différentes capitales du monde. On n’hésitera pas non plus sur la destination des vacances estivales

Le Maroc doit penser à l’avenir Et pour cela, des questions doivent nous interpeller :

Les Marocains de la nouvelle génération continueront-ils, à l’instar de leurs parents, à transférer des fonds, des devises ? Auront-ils les mêmes habitudes de consommation ? A l’ère de la mondialisation, ne doit-on pas plutôt parler de transfert de compétences ? Dans le paysage audiovisuel, des compétences ont été révélées. Mais cela suffit-il ? Jamal Debbouze, Zaïri, El Karkouri et bien d’autres sont certes de véritables ambassadeurs du Maroc à l’étranger mais d’autres compétences sont à exploiter, d’autres savoir-faire sont à relever

L’avenir du Maroc est donc aussi entre les mains des jeunes Marocains à l’étranger qui ont suivi des formations de pointe dans tous les domaines, ils ont ainsi acquis des expériences et compétences économiques, scientifiques, humaines, managériales Ne doit-on pas faciliter "sérieusement" leur installation au Maroc, en tant qu’entrepreneurs ou acteurs de la société civile ? Trop de freins administratifs ralentissent les différents élans constructifs des jeunes de l’autre rive !

Alors que des pays comme la France, la Belgique comptent de plus en plus d’élus d’origine marocaine, ne doit-on pas accorder plus de place à cette nouvelle génération de Marocains résidant à l’étranger dans les ambassades, les consulats, au ministère qui porte leur nom ? Cette communauté marocaine attachée aux valeurs de la Monarchie et éduquée dans les valeurs de la citoyenneté se doit d’être associée dans les différentes réflexions de la société.

A quelques jours de la fin de l’opération transit des RME, c’est l’heure du bilan pour le gouvernement, les décideurs, la société civile, les médias Bilan qui ne doit pas se résumer seulement à des chiffres et statistiques car l’apport de cette population ne se restreint guère en "une valise remplie de devises" !

A la fois différents et semblables des "MRM" (Marocains résidant au Maroc), les MRE (Marocains résidant à l’étranger) représentent une nouvelle donne, un apport précieux pour le Maroc actuel : un potentiel de développement. Le regard que porte la société civile sur cette communauté doit changer, évoluer pour redonner confiance à cette jeunesse car le rapprochement avec l’Europe se fera aussi et surtout avec l’aide de la jeunesse marocaine à l’étranger. Le cordon ombilical ne doit donc en aucun cas être coupé.

Amel Nejjari- Libération

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