L’armée espagnole s’empare de l’ile Leïla

17 juillet 2002 - 12h20 - Espagne - Ecrit par :

L’armée espagnole s’est emparée mercredi matin d’un îlotcontesté le long des côtes marocaines, et a délogé les soldats marocains qui y campaient depuis une semaine, au cours d’une opération qui marque une grave dégradation dans la crise des relations hispano-marocaines .

Les premières réactions marocaines ont été sévères, Mahjoubi Aherdane, chef du Mouvement national populaire marocain (MNP, coalition gouvernementale) affirmant que "c’est une déclaration de guerre".

Le gouvernement espagnol a indiqué, dans un communiqué officiel, qu’il "s’est trouvé dans l’obligation d’ordonner" à ses forces armées de déloger le petit détachement marocain qui campait depuis le 11 juillet sur l’île Perejil (Leïla pour les Marocains). Il a précisé que l’intervention "s’est déroulée avec succès, sans pertes ni blessés".

Un porte-parole de la préfecture de Sebta, enclave espagnole dans le nord du Maroc, a déclaré que les six soldats marocains qui se trouvaient sur l’îlot, situé à quelque 200 mètres des côtes marocaines, ont été remis à leur pays, après avoir été transportés à Sebta.

Selon la presse espagnole, l’opération a été menée peu après 06H00 (04H00 GMT) par des unités spéciales de l’armée de terre, appuyées par des hélicoptères Super Puma. Auparavant, des plongeurs de l’infanterie de marine s’étaient déployées autour de la zone à bord de zodiac. Des bâtiments de la marine espagnole qui avaient été envoyés en renfort au cours des derniers jours, se trouvaient à proximité.

Depuis jeudi, l’Espagne avait renforcé son dispositif militaire dans les enclaves espagnoles de Sebta et Melilla, et sur ses territoires au large des côtes marocaines, en envoyant plusieurs navires de guerre.

L’opération est intervenue peu après que l’ambassadeur espagnol à Rabat, Fernando Arias-Salgado, soit arrivé à Sebta, après avoir été rappelé mardi soir pour une durée indéterminée.

Le gouvernement espagnol a tenu informé le roi Juan Carlos, les partis politiques, le Conseil de sécurité de l’ONU et ses alliés de l’opération, a précisé le communiqué officiel.

Mardi, le Congrès des députés espagnols avait adopté à la quasi-unanimité une motion appuyant la position du gouvernement de José Maria Aznar Aznar dans cette affaire.

Au Maroc, les premières réactions ont condamné l’intervention espagnole. Mahjoubi Aherdane s’est déclaré "stupéfait". "On ne règle pas les problèmes à coups de canon, c’est une déclaration de guerre et une erreur", a-t-il dit. Il a estimé que le Maroc doit "rompre les relations avec ce pays dont nous pensions qu’il était un pays ami".

Pour sa part, Abdelkrim Khatib, chef du parti marocain de la Justice et du Développement (PJD, islamiste modéré), a estimé qu’il s’agit d’une "attaque contre le Maroc et son intégrité territoriale, qui démontre que l’esprit colonialiste persiste chez les européens". "Le Maroc doit couper toutes relations aussi bien politiques qu’économiques avec l’Espagne, qui doit être considérée comme un pays ennemi", a ajouté M. Khatib.

Depuis l’arrivée des soldats marocains sur l’îlot, l’Espagne, soutenue par l’Union européenne et l’OTAN, n’avait cessé de demander leur retrait, en expliquant que l’îlot, de 13,5 hectares, bénéficie depuis 40 ans d’un "statut accepté par le Maroc et l’Espagne aux termes duquel ni le gouvernement espagnol, ni le gouvernement marocain n’occupera l’île".

Au contraire, le Maroc a fait valoir que l’île n’est pas concernée par les accords entre les deux pays, et se trouve sous souveraineté marocaine. Rabat avait affirmé que les soldats installés sur l’île avaient établi un "poste d’observation" pour lutter contre l’immigration illégale et le trafic de drogue.

Dans son communiqué, le gouvernement espagnol a réaffirmé son souhait de "maintenir des relations d’amitié et de coopération avec le Maroc" et a manifesté sa disposition à engager des conversations dans ce sens.

Depuis plus d’un an, les relations hispano-marocaines sont en crise, avec le rappel à Rabat, en octobre dernier, de l’ambassadeur du Maroc à Madrid.

Le contentieux porte notamment sur la pêche, sur l’immigration clandestine, et sur le conflit du Sahara, le Maroc estimant que Madrid défend des positions jugées favorables aux thèses du Front Polisario.

L’Espagne est le second partenaire commercial du Maroc, après la France. les deux pays ont signé, en 1991, un traité d’amitié et de coopération.

Source : Afp

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Espagne - Défense - Armement - Ilôt Leïla

Ces articles devraient vous intéresser :

Armée marocaine : une hausse historique du budget pour 2025

Le projet de loi de finances 2025 a prévu un budget de 133 milliards de dirhams pour le ministère de la Défense. Un budget en hausse par rapport à l’année 2024 où 124 milliards ont été alloués à ce département. Ces fonds serviront à l’acquisition de...

Coup d’accélérateur pour la défense marocaine

Le gouvernement marocain a décidé de donner un sérieux coup de pouce à son industrie de défense. Réuni le jeudi 14 novembre, le Conseil du gouvernement a acté l’exonération temporaire de l’impôt sur les sociétés (IS) pour les entreprises du secteur.

Maroc : Création de zones pour la production d’armes et de munitions

Le Maroc vient d’autoriser la création de deux zones industrielles militaires. C’est ce qui ressort du conseil des ministres tenu samedi à Casablanca et présidé par le roi Mohammed VI.

Maroc : des véhicules suspects relancent les rumeurs sur les lanceurs Patriot

Des indices montrent que le Maroc s’apprête à acquérir des lanceurs du système Patriot, afin de renforcer les capacités défensives des Forces royales Air (FRA).

Le Maroc muscle ses dépenses militaires

Le Maroc met le paquet sur sa défense. Le budget général de l’administration de la défense nationale pour 2025 a connu une hausse significative, comme l’a révélé Abdelatif Loudiyi, ministre délégué chargé de l’administration de la défense nationale,...

Des blindés américains pour le Maroc

Les Forces armées royales (FAR) ont réceptionné une première série de véhicules blindés M-ATV Standard Base (SXB), conçus par Oshkosh Defense. Ces engins sont destinés aux unités Brimoto opérant dans les régions sahariennes et orientales du Maroc,...

L’armée marocaine envoie l’artillerie lourde au Sahara

Après avoir prolongé en 2021 le mur de défense de 50 km à l’est pour sécuriser Touizgui dans la province d’Assa-Zag et compléter le dispositif sécuritaire à l’est, les Forces armées royales (FAR) ont déployé l’artillerie lourde dans la même zone.

Industrie de défense au Maroc : grosses ambitions pour 2024

Le Maroc a réalisé des bonds qualitatifs cette année dans le domaine de l’industrie de défense, a déclaré Abdelatif Loudiyi, ministre délégué chargé de la Défense nationale, rappelant l’objectif du royaume de réduire ses importations d’armes et de...

Maroc : des zones militaires interdites de survol

Au Maroc, le survol de plusieurs bases militaires sensibles, notamment la base aérienne de Sidi Slimane (GMSL) et celle de l’aéroport militaire de Salé (GMME) est interdit. En voici la raison.

L’armée marocaine fait un bond en avant

Le Maroc poursuit la modernisation de son armée. Tout en investissant dans l’achat d’équipements de pointe, le royaume travaille à jeter les bases d’une industrie de défense nationale.