Fin de la première mi-temps pour Abbas El Fassi

2 février 2008 - 00h10 - Maroc - Ecrit par : L.A

« Contrairement aux autres, je n’ai pas bénéficié de l’état de grâce comme chaque Premier ministre. Les critiques ont démarré dès ma nomination. Mais cela a été stimulant ». C’est ainsi que Abbas El Fassi a commenté ses cents premiers jours à la tête de la Primature lors d’un dîner qu’il a offert à la presse mardi soir. A l’exception de quelques obligations de réserves avancées, particulièrement sur les conditions de formation du gouvernement, le Premier ministre a joué le jeu.

D’abord sur la moralisation de la vie publique, un sujet qui semble lui tenir à cœur. Pour lui, la bonne gouvernance et la réforme de l’administration supposent la lutte contre la corruption. Sur ce chapitre, des efforts ont été faits mais restent insuffisants. Pour avancer dans ce sens, il a annoncé la mise en place imminente de l’Agence nationale de lutte contre la corruption. Tout est prêt. Par contre, le Premier ministre reconnaît le retard enregistré dans le dossier de la déclaration du patrimoine. « En partie, à cause du Conseil constitutionnel qui a renvoyé au Parlement les cinq textes ». La Chambre des représentants les a adoptés. Reste uniquement la plénière de la Chambre des conseillers. Le Premier ministre hésite entre une session extraordinaire ou attendre l’ouverture de celle du printemps pour faire aboutir ces textes.

Au sujet de la déclaration du patrimoine des ministres, El Fassi a parlé de parallélisme des formes à observer, comme le lui a rappelé Abdessadek Rabiî (du SGG). Car, le statut des ministres est régi par dahir. « Le Souverain attend la promulgation des cinq textes avant de publier le dahir qui organise la déclaration de patrimoine des ministres ».

Autre sujet important pour El Fassi, le train de vie de l’Etat, jugé trop élevé. « Le Maroc ne peut pas supporter ce poids. La France a entrepris un audit pour repérer là où il est possible de réaliser des économies. Rabat doit suivre l’exemple », souligne-t-il. L’épisode, plutôt embarrassant pour le gouvernement, des agences de développement a également été au menu. « J’approuve le communiqué du cabinet royal qui a rendu justice aux agences qui opèrent dans un environnement horizontal qui implique tous les ministères. La réparation a été faite et j’ai signé un décret qui remet les choses en ordre », a précisé le Premier ministre. Il ajoute : « Je suis heureux que le cabinet ait réparé cette erreur. Je ne veux pas en dire plus ».

Sur le chapitre de la Caisse de compensation, Abbas El Fassi est déterminé à trouver des solutions marocaines. « Aujourd’hui, ce sont les riches qui profitent plus des subventions que les pauvres. Cela ne peut continuer. Le budget englouti dans la compensation représente 2/3 du budget d’investissement », note-t-il.

Une commission se penche sur cette question. En tout cas, dès le premier conseil d’administration de la Caisse, on a pris des décisions comme notamment instaurer l’externalisation des brigades de contrôle. Un appel à manifestation d’intérêt est en cours de préparation.

Sur les grands chantiers initiés par le gouvernement Jettou, El Fassi a rappelé le coup d’accélérateur donné au rythme de réalisation. Ainsi, pour l’habitat social, il compte construire 120.000 logements cette année pour atteindre 150.000 en 2012. Idem pour les autoroutes : 380 km par an contre 200 km actuellement. Toujours sur le chapitre des autoroutes, le Premier ministre a révélé que les études pour l’axe Fès-Nador ont démarré. Les études de faisabilité pour Casablanca-Béni Mellal sont en cours de réalisation. La politique des barrages sera également accélérée pour atteindre 10 ouvrages par an. Ce qui porte le nombre à 60 grands, moyens et barrages collinaires.

Il a également parlé d’autres faiblesses du gouvernement comme la justice. Sur ce registre, le gouvernement attend les grandes lignes de cette réforme promises lors de son discours devant la Cour suprême. D’autres secteurs ont besoin de plans stratégiques. D’ailleurs, cinq études, financées par le Fonds Hassan II pour le développement économique et social, vont dans ce sens. Elles concernent l’agriculture, l’enseignement, la formation professionnelle, l’eau et l’énergie. Quant à un éventuel remaniement, il n’est pas à l’ordre du jour. Rien ne le justifie puisque tous les ministres travaillent et préparent les réformes attendues par la population, a-t-il ajouté.

Ses autres réponses sur :

• Club d’Al Himma : « Il n’y a pas de technocrates. Les Sans appartenance politique (SAP) sont des hommes politiques dès qu’ils sont au gouvernement. En tout cas, les SAP apportent un « plus » au travail du gouvernement ». Le Premier ministre n’y va pas par quatre chemins. Sur un éventuel parti de Fouad Ali Al-Himma, le Premier ministre a été catégorique : « Je ne peux pas être contre la création d’un parti politique, l’Istiqlal a toujours été favorable au multipartisme. Mais Al Himma a créé un club de réflexion qui pourrait apporter son appui à un parti ou aux autres formations politiques contre l’absentéisme. Le parti du Roi, c’est terminé. Il ne peut pas y avoir de nouveau Fdic, qui est d’ailleurs mort après 2 ans ».

• Sur l’engagement de Mustapha Bakkoury, DG de la Caisse de dépôt et de gestion, dans le Mouvement pour tous les démocrates (MTD) lancé par un groupe autour de Fouad Ali Al Himma, le Premier ministre a été on ne peut plus clair : « Bakkoury n’est ni un magistrat ni un militaire, il a donc le droit comme tous les Marocains de faire de la politique ».

• Le code de la presse qu’il a promis de reprendre, El Fassi précise qu’il a trouvé le dossier sur son bureau, laissé par Driss Jettou qui voulait le faire aboutir avant son départ. Abbas El Fassi compte le discuter dans le cadre d’une commission de la majorité, avant de l’introduire dans le circuit classique de l’adoption des lois. Tout cela, sans aucune urgence, dit-il. Visiblement, Abbas El Fassi n’est pas favorable à la suppression des peines privatives de liberté. « Que faire devant un journal qui sape le moral de l’armée et qui incite à la révolte ? » s’est interrogé le Premier ministre, en rappelant d’autres voix qui réclament le retour au dahir de 1958 sur les libertés publiques. A cette occasion, le ministre de la Communication a noté que la majorité des poursuites contre la presse émane du secteur privé et non de l’Etat.

• Les associations d’œuvres sociales dont disposent certains ministères et dont certaines sont plus riches que d’autres. Certains départements n’en ont pas. « Ce n’est pas normal, les œuvres sociales doivent être pour tous les fonctionnaires, quel que soit le ministère où ils travaillent. Il faudra mettre tout le monde dans le même panier », a martelé le Premier ministre. D’autres défaillances existent au niveau des indemnités. Abbas El Fassi a promis de régler ce dossier.

• La diplomatie. El Fassi a souligné qu’elle relève du domaine réservé du Souverain. « Sur le dossier du Sahara, la décision et l’initiative appartiennent à SM le Roi, mais je suis consulté en tant que Premier ministre et en tant que chef de l’Istiqlal », a précisé Abbas El Fassi.
En tout cas, sur le plan international, tout le monde a constaté que « l’Algérie achète les armes et le Maroc construit le Sahara ».

• Le Premier ministre a promis de régler définitivement le dossier du Ramed aujourd’hui jeudi lors d’une réunion avec les ministres de la Santé, de l’Intérieur et des Finances. Il est à rappeler que le projet de couverture médicale des indigents traîne depuis déjà plus d’une année.

L’Economiste - Mohamed Chaoui

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