Le mausolée Bouya Omar évacué de ses pensionnaires

12 juin 2015 - 12h10 - Maroc - Ecrit par : Jalil Laaboudi

L’opération d’évacuation des personnes souffrant de troubles psychiques, pensionnaires du mausolée "Bouya Omar", à environ 30 km de la ville de Kalaâ Sraghna, au sud du Maroc, a commencé jeudi.

Les pensionnaires de ce mausolée étaient enchaînés aux mains et aux pieds dans des conditions inhumaines dans ce lieu lugubre. L’initiative baptisée "karama" (dignité), menée par le ministère de la Santé, vise à évacuer ces malades mentaux vers des hôpitaux spécialisés, où ils seront pris en charge gratuitement, a affirmé le ministre de la Santé El Hossein El Ouardi.

Pour mener à bien cette opération, le ministère a augmenté la capacité d’accueil des hôpitaux psychiatriques, et créé de nouveaux services hospitaliers intégrés, précise le département de la Santé dans un communiqué, selon lequel 34 médecins et 122 infirmiers spécialisés dans la psychiatrie ont été recrutés.

Un budget de 40 millions de dirhams a été mobilisé pour le transfert des patients des alentours du mausolée Bouya Omar vers les hôpitaux et les services de santé des régions et provinces d’origine de ces malades. Plus de 60 ambulances ont été mises à la disposition de cette opération.

Sur les 800 pensionnaires que compte ce mausolée, 70% d’entre-eux ne bénéficiaient d’aucun traitement, présentent des signes de violence et souffrent de malnutrition.

Au mausolée de Bouya Omar, l’atmosphère est irréelle, la folie y côtoie le charlatanisme. A l’intérieur du sanctuaire, il est fréquent de voir un malade se taper violemment la tête contre le tombeau du marabout, ou un pensionnaire malade enchaîné des mains et des pieds.

D’après la légende cultivée par ceux qui ont intérêt à ce que ces croyances persistent, on raconte que les bénédictions de Bouya Omar, saint homme qui a vécu dans cette région au XVIe siècle, guérissent plusieurs maladies.

Certains pensionnaires sont convaincus qu’un tribunal de "jnoun" les a condamnés à rester 3, 4 ou 5 ans autour du mausolée pour y être lavé de leurs pêchés et d’autres pour guérir d’une maladie psychique.

Des recherches déjà menées sur place ont démontré que plusieurs dizaines de patients souffraient d’états infectieux et de certaines maladies graves nécessitant une hospitalisation d’urgence.

Parmi les pensionnaires de Bouya Omar, on retrouve des enfants de professeurs universitaires, de hauts gradés de la police et même de médecins et de trafiquants de drogue, venus chercher la "baraka" du marabout, où confiés par leurs familles aux gérants de ce haut lieu du charlatanisme, pour s’en débarrasser.

Le ministre met ainsi fin à un juteux business qui profitait à plusieurs centaines de personnes qui gravitent autour de ce mausolée, attirant plus de 30.000 visiteurs par an, et dont seuls les frais d’hébergement des malades représentent annuellement pas moins de 8 millions de dirhams.

Jeudi matin, personne n’a osé s’opposer au lancement de l’opération d’évacuation du mausolée par les autorités. Le défi était de taille, mais le ministre de la Santé a tenu sa promesse d’évacuer ce sanctuaire et de prendre en charge les malades. Il avait juré : "c’est soit moi ou Bouya Omar". Comme quoi, la volonté politique peut faire des miracles.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Religion - Santé - Kelaât des Sraghna - Houcine El Ouardi - Bouya Omar

Aller plus loin

Vidéo : dans l’enfer de Bouya Omar

Le ministère de la Santé s’est donné deux ans pour fermer Bouya Omar, mausolée où près de 800 personnes sont prisonnières sous prétexte qu’elles souffrent de maladies mentales...

Ces articles devraient vous intéresser :

Nora Fatehi convertie au Christianisme ?

L’artiste marocaine Nora Fatehi a déclenché une vague de réactions sur Instagram après avoir publié un extrait vidéo la montrant portant un collier avec une croix.

Variole du singe : le Maroc en état d’alerte

Face à la recrudescence de cas de variole du singe en Afrique, le ministère marocain de la Santé a renforcé son dispositif de surveillance et de riposte. Cette décision fait suite à la classification par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) du...

La Premier League anglaise s’adapte au ramadan

Les footballeurs musulmans qui évoluent dans certains pays d’Europe sont autorisés à rompre leur jeûne pendant les matchs du soir tout au long du mois de ramadan qui court du 1ᵉʳ au 30 mars 2025.

Maroc : la date de l’Aïd Al Fitr connue

Considérant que le jeûne de Ramadan durera 29 jours cette année selon les calculs astronomiques, l’Aïd Al Fitr 2024 sera célébrée au Maroc le mercredi 10 avril.

Aïd al-Adha : la vente du mouton interdite au Maroc ?

Au Maroc, des mesures visant à empêcher des citoyens d’acheter des bêtes à sacrifier lors de l’Aïd al-Adha, ont été observées. Ils sont orientés vers l’abandon du sacrifice.

Officiel : l’Aid Al Fitr célébré mercredi 10 avril au Maroc

Le ministère des Habous et des Affaires islamiques a annoncé ce mardi soir, après la prière d’Al Maghrib, l’observation du croissant lunaire annonçant le début du mois de Chaoual 1445 H. C’est donc officiel, l’Aïd Al Fitr 1445 sera célébré demain...

Lissage brésilien : alerte sanitaire en France, le Maroc également concerné

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a récemment émis une alerte concernant l’utilisation de produits de « lissage brésilien » contenant de l’acide glyoxylique, un ingrédient cosmétique...

Aïd el-Fitr 2025 : quelle date au Maroc ?

Les calculs astronomiques prévoient la célébration de l’Aïd Al fitr au Maroc le lundi 31 mars 2025, contrairement à plusieurs pays arabes et européens, mais l’observation de la lune reste pour l’instant l’option privilégiée par les autorités...

Royal Air Maroc : Un bébé sauvé en plein ciel

Un bébé de 18 mois a été sauvé d’un arrêt cardiaque grâce à l’intervention rapide de deux membres de l’équipage de la Royal Air Maroc.

Plages au Maroc : l’embarrassante absence de toilettes publiques

Au Maroc, la plupart des plages sont dépourvues d’infrastructures sanitaires (toilettes, douches, centres de secours…). Une situation qui crée des désagréments aux touristes et aux MRE, surtout pendant la saison estivale.