Lutte contre l’analphabétisme : Même pas 0,1% du budget de l’Etat

21 janvier 2008 - 16h49 - Maroc - Ecrit par : L.A

L’analphabetisme, un combat des plus ardus pour l’Etat, semble-t-il. Hier, ce « mal » touchait près de 9 personnes sur 10. Aujourd’hui, s’il est vrai que nous revenons de loin, la situation n’est pas totalement apurée. La proportion d’analphabètes reste toujours anormalement élevée. Le taux d’analphabétisme est estimé à 38,5% de la population, selon le ministère de l’Education nationale. La charte nationale pour l’enseignement ambitionne de le faire chuter à 20% en 2010, et d’éradiquer totalement l’analphabétisme en 2015.

Vœu pieux ? Quand on pense qu’un enfant sur trois (soit 1,5 million) ne s’est jamais rendu à l’école ou a été déscolarisé, l’objectif semble plutôt difficile à atteindre. Parmi ces enfants, plus de 58% sont des filles, près de 80% vivent en milieu rural, et 40% travaillent. Ils exercent notamment dans l’agriculture, l’artisanat et l’industrie. Ils peuvent aussi devenir vendeurs occasionnels ou même mendiants « professionnels », puisqu’ils se font jusqu’à 50 DH par jour, contre 300 DH par mois dans les autres activités. Concernant les adultes, ils sont près de 43% à n’avoir jamais été scolarisés. Les régions les plus touchées (plus de 60% d’analphabètes) sont à dominance rurale. A leur tête, les régions de Taza-Al Houceïma-Taounate, Tadla-Azilal et Souss-Massa-Draâ. Les régions du Grand Casablanca et de Rabat-Salé-Zemmour-Zaër, sont évidemment celles qui enregistrent les taux les moins élevés, étant mieux équipées et plus développées. Elles affichent tout de même des taux allant de 22 à 28%.

Côté secteurs d’activités, l’agriculture compte le plus grand nombre d’analphabètes, suivie de l’artisanat et de la pêche maritime. La fonction publique n’est pas épargnée, avec un taux avoisinant les 22%. Pourquoi autant de monde écarté du savoir ? Toutes les études montrent que la première cause est d’ordre économique. La pauvreté empêche les personnes de s’occuper d’autre chose que de gagner « leur croûte ». Le coût des fournitures scolaire est un élément rédhibitoire pour les couches les plus démunies. Il atteint en moyenne 25% du Smig. Et si, en plus, il n’y a pas d’établissements scolaires disponibles, ...

Depuis 1997, plusieurs mesures ont été prises afin de lutter contre l’analphabétisme. L’Etat a mis en place des programmes d’alphabétisation et d’éducation non-formelle dédiés à la fois aux adultes et aux enfants. Dont les programmes fonctionnels visent des compétences de base en lecture, écriture et calcul pour adultes.

Dispensés dans des établissements scolaires, des mosquées, ou même des prisons. Ceci en partenariat avec des ONG ayant signé des conventions avec l’Etat. Il y a également les cellules de veille implantées dans les écoles, et destinées à encourager les élèves à poursuivre leur scolarité et à les soutenir. Actuellement, elles couvrent près de 92% des écoles primaires, selon le ministère de l’Education nationale. Et enfin, l’école de la deuxième chance, dont le but est d’intégrer les enfants de 9 à 15 dans le système scolaire ou dans la formation professionnelle. Toutefois, les résultats réalisés par ces programmes restent modestes.

Et pour cause : l’absence d’un soutien social aux familles pauvres, le faible degré de qualification des formateurs, le manque de supports pédagogiques, ou encore la non-assiduité des bénéficiaires.

Ridicule

Ridicule, le budget alloué aux programmes d’alphabétisation. Il n’est que de 152 millions de DH. Soit près de 0,4% du budget de l’Education nationale, estimé lui à 37 milliards de DH. Et 0,095% du budget de l’Etat. Alors qu’il s’agit d’un investissement en capital humain urgent et crucial. Les objectifs de développement humain, et aussi économique, que le Maroc s’est fixés, ne peuvent se réaliser qu’à travers l’alphabétisation de la population.

L’Economiste - Ahlam Nazih

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Education - Budget - Alphabétisation

Ces articles devraient vous intéresser :

Une bonne nouvelle pour les enseignants marocains

La Fondation Mohammed VI de promotion des œuvres sociales de l’éducation-formation a augmenté le montant des crédits immobiliers accordé aux enseignants dans le cadre de son programme d’aide au logement IMTILAK, lancé en 2019.

Des conditions strictes pour enseigner dans le privé au Maroc

Le ministère de l’Éducation nationale a récemment autorisé les enseignants du public à donner des cours supplémentaires dans le privé, sous certaines conditions. Pour arrondir leurs fins de mois, ces professeurs devront obtenir une autorisation...

La chanteuse Mariem Hussein au cœur d’une nouvelle polémique

Des internautes marocains se sont indignés des propos de la chanteuse et actrice marocaine Mariem Hussein sur l’éducation sexuelle.

Maroc : Vent debout contre le français à l’école

Au Maroc, un regroupement d’enseignants, d’étudiants et d’élèves s’oppose à l’enseignement des matières scientifiques en français dans les écoles publiques, dénonçant une violation de la Constitution et des textes régissant le secteur de l’éducation.

Au Maroc, la santé des élèves menacée

Au Maroc, des associations de protection des consommateurs ont lancé un appel aux autorités compétentes afin qu’elles renforcent les contrôles en ce qui concerne la qualité des fournitures scolaires en cette période de reprise des classes. Objectif,...

Le Maroc veut le retour des MRE

Le Maroc met les moyens pour faire revenir ses cerveaux. Une enveloppe budgétaire conséquente, et inédite, vient d’être spécifiquement allouée pour inciter les compétences marocaines expatriées à contribuer à l’effort national de recherche et...

Tourisme au Maroc : un bilan record et des objectifs ambitieux

Les signaux sont au vert pour le tourisme marocain. Le royaume a enregistré un record d’arrivées de touristes au cours des neuf premiers mois de l’année, s’est réjoui le ministère du Tourisme, rassurant que la dynamique sera maintenue en 2025 pour...

Maroc : une école mise en vente avec ses élèves ?

Au Maroc, un agent immobilier se retrouve malgré lui au cœur d’une polémique après avoir publié une annonce de vente d’une école privée en incluant les élèves.