Code de la famille : une révolution à venir pour les Marocaines des deux rives

16 septembre 2004 - 22h52 - Maroc - Ecrit par :

Le nouveau code de la famille marocain représente une vraie révolution pour les femmes marocaines des deux rives de la Méditerranée, mais son application devrait prendre du temps, selon les participants d’un colloque franco-marocain qui se tient mercredi et jeudi à Rabat.

Près d’un an après l’annonce, par le roi Mohammed VI, d’une réforme fondamentale de la "Moudawana", entrée en vigueur le 9 février, les associations franco-marocaines réunies par le Haut conseil français à l’intégration (HCI) restent enthousiastes mais n’ont pas caché qu’il faudrait du temps pour faire entrer dans les moeurs les nouvelles règles, et critiquent une information insuffisante.

Le nouveau code limite de façon draconienne les possibilités de répudiation de la femme, fait quasiment disparaître la polygamie, et vise également la protection des enfants et le droit de garde de la femme.

"Une grande question demeure, estime Sabine Raczy, rapporteur du HCI et magistrate, comment cette réforme va-t-elle être appliquée devant les tribunaux ?"

Les associations féminines marocaines, qui ont bataillé pour l’adoption de ce nouveau code, concèdent qu’il ne pourra s’appliquer sans tensions. "Nous sommes conscientes du travail qui doit être mené pour changer les mentalités des hommes et même des femmes, et des juges", désormais présents à toutes les étapes de la vie familiale, affirme Zaria Mrini, présidente de l’association Ennakhil pour la femme et l’enfant.

Mais elle voit déjà une évolution positive dans l’augmentation du nombre de femmes osant demander de l’aide dans les "centres d’écoute" mis en place par les associations. "Une barrière psychologique et culturelle est tombée", dit-elle.

Alors que "la place prépondérante donnée au juge fragilise la réforme", selon Yves Rabineau, magistrat français de liaison auprès des autorités judiciaires marocaines, "car les juges, dans le monde entier, sont conservateurs", l’association Ennakhil réclame une présence accrue des associations près des tribunaux, avec un rôle de "médiateur familial".

Présidente du tribunal de première instance de Casablanca, Zhor El Hor compte sur une féminisation des tribunaux, le Maroc comptant 518 femmes juges, soit 18%. "Sortir une nouvelle loi, ce n’est pas difficile, mais changer les mentalités demande beaucoup d’efforts", reconnaît-elle.

Avocate et membre de l’Union de l’action féminine (UAF), une des plus représentatives du mouvement des femmes, Aïcha Loukhmas estime de son côté que "les résistances sont fortes de la part des hommes en général pour ce qui touche surtout la tutelle ou le divorce", et cite des cas de jeunes filles de 18 ans pour qui "le juge a bloqué la procédure de mariage de façon indirecte".

Reste aussi à passer le message en France, où les immigrées "n’ont pas suivi l’évolution en cours au Maroc et sont encore moins informées que les Marocaines", témoigne Fouzia Assouli, présidente de la Ligue démocratique pour les droits des femmes, qui a organisé des "caravanes" jusqu’au fin fond du Maroc, mais aussi, en France, en région lyonnaise avec l’association "Femmes contre les intégrismes".

"Pour une fois, les femmes immigrées étaient étonnées et fières de voir que les Marocaines luttaient pour l’égalité", dit-elle.

Afp - L’intelligent

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Famille - Moudawana (Code de la famille) - Lois - Femme marocaine

Ces articles devraient vous intéresser :

Ce qui pourrait changer pour le mariage des MRE

Des modifications du Code de la famille marocain (Moudawana) sont envisagées. Sept propositions d’amendements, préalablement approuvées par le Conseil supérieur des oulémas, ont été présentées fin 2024 au Roi Mohammed VI par le ministre des Habous et...

Love is Blind, Habibi : un candidat irakien insulte les Marocaines

L’émission de téléréalité « Love is Blind, Habibi », sur Netflix, fait face à une vague de critiques suite aux propos tenus par un candidat irakien, Khatab, à l’encontre des Marocaines. Lors d’une interview radio, celui-ci a tenu des propos moqueurs...

Maroc : Une vague de racisme contre les mariages mixtes ?

Des activistes marocains se sont insurgés ces derniers jours sur les réseaux sociaux contre le fait que de plus en plus de femmes marocaines se marient avec des personnes originaires des pays d’Afrique subsaharienne. Les défenseurs des droits humains...

Maroc : les livrets de famille vendus à prix d’or

Au Maroc, des individus profitent de la pénurie des livrets de famille notée dans certaines communes du fait de la rupture de stocks restants, pour vendre ces documents à des prix élevés.

Cosmétiques contrefaits : une bombe à retardement pour les Marocaines

Nadia Radouane, spécialiste en dermatologie et esthétique, alerte les Marocaines sur les risques liés à l’utilisation des produits cosmétiques contrefaits.

Jamel Debbouze déclare sa flamme à Mélissa Theuriau

Jeudi dernier, la journaliste Mélissa Theuriau a fêté ses 46 ans. L’occasion pour son mari, l’humoriste franco-marocain Jamel Debbouze de lui faire une belle déclaration.

« Tu mourras dans la douleur » : des féministes marocaines menacées de mort

Au Maroc, plusieurs féministes, dont des journalistes et des artistes, font l’objet d’intimidations et de menaces de mort sur les réseaux sociaux, après avoir appelé à plus d’égalité entre l’homme et la femme dans le cadre de la réforme du Code de la...

Un enfant né d’un viol ouvre une brèche dans le droit marocain

Saisie par une jeune maman qui cherche à obtenir une indemnisation pour son fils issu d’un viol, la cour de cassation marocaine a rendu une décision qui va faire date.

L’actrice Malika El Omari en maison de retraite ?

Malika El Omari n’a pas été placée dans une maison de retraite, a affirmé une source proche de l’actrice marocaine, démentant les rumeurs qui ont circulé récemment sur les réseaux sociaux à son sujet.

Près de 20 000 hommes battus au Maroc

La députée Aziza Boujrida, membre du groupe Haraki, interpelle la ministre de la Solidarité, de l’Intégration sociale et de la Famille, Naïma Ben Yahya, sur la question de la violence à l’encontre des hommes marocains.