Compétitivité : Sale temps pour le Maroc

14 juin 2007 - 00h47 - Economie - Ecrit par : L.A

Concentrations des flux commerciaux sur un cercle très restreint de partenaires, structure des échanges peu diversifiée, stratégies de promotion en panne de lisibilité et en quête de vision claire et de moyens. Le diagnostic est sans appel. Il verse en direction d’une seule conclusion : le Maroc a mal à son export. D’ailleurs, tout le monde l’a confirmé hier à l’ouverture des Assises nationales de l’export à Skhirat.

« Nos exportations demeurent à un faible niveau de compétitivité, pourtant des réformes pertinentes et intenses ont été entreprises », constate Driss Jettou, le Premier ministre. A peine 5% de croissance annuelle entre 1995 et 2006 contre 8% en moyenne mondiale.
Les positions commerciales du Maroc sont constamment en recul, y compris sur ses marchés de prédilection, le marché européen. Le Royaume se trouve dans une situation des plus contrariantes : dans le meilleur des cas, il ne pourra que stabiliser ses parts de marché actuelles s’il veut rattraper le rythme de progression du commerce international, faute d’avoir su apporter une réponse rapide au tassement de la croissance de ses exportations.

En fait, le mal des exportations ne date pas d’aujourd’hui. Il y a sept ans déjà, au plus fort du débat sur la pertinence de la politique du dirham fort, les premières Assises des exportations avaient relevé le même constat. Alors « Abderrahmane El Youssoufi, Premier ministre s’est tellement impliqué dans la cause des exportateurs que ces derniers songeaient à lui décerner le titre d’exportateur de l’année », rappelle Mohamed Tazi, président-fondateur de l’Asmex(1). Pour autant, son gouvernement n’avait pas obtenu l’infléchissement de la politique de change jugée trop rigide et nuisible à la compétitivité des entreprises. Ce débat est moins vif aujourd’hui mais il n’en reste pas moins pertinent comme le rappellent constamment les experts du FMI (Fonds monétaire international). Si la politique du dirham fort défendue par les autorités monétaires est moins contestée, c’est parce que son impact sur l’export est tempéré par la hausse de l’euro qui rend, de facto, l’essentiel de l’offre marocaine moins chère en Europe ainsi que la consolidation des réserves de change soutenue par le tourisme et les transferts de fonds des MRE.

Des premières Assises de 2000, très peu de recommandations ont été appliquées, « même pas 10% », maugrée l’ex-président de l’association marocaine des exportateurs. Rendre les secteurs exportateurs performants et compétitifs est pourtant une fatalité. Le Maroc s’est engagé de façon irréversible sur la voie de l’ouverture de son marché. Avec l’Europe, le big-bang, la déprotection douanière sera totale dans moins de cinq ans, le 1er mars 2012 exactement.

Abouyoub et le dirham fort

La question de base est « comment redonner du tonus aux exportations » ?

Pour le Premier ministre, il faut explorer trois axes stratégiques. Son ministre du Commerce extérieur, Mustapha Mechahouri en voit quatre de plus mais l’essentiel des recommandations a porté sur la mise à niveau des entreprises qui doit les conduire à se diversifier, à injecter plus de valeur ajoutée à leurs produits à travers l’incorporation progressive et maintenue de plus d’innovation et de qualité. Aussi, s’agit-il de revoir le dispositif d’incitations fiscales et celui de la promotion à l’export dans l’objectif d’au moins, de s’aligner sur les offres concurrentes. Le réseautage des entreprises exportatrices ainsi que la modernisation du management ont été aussi présentés comme indispensables. Pour Hassan Abouyoub, ambassadeur itinérant de Sa Majesté et qui fut un des artisans de l’accord de libre-échange avec l’Union européenne, il est urgent de libéraliser le système de change. Le réaménagement des pondérations dans le panier de cotation du dirham n’est pas suffisant. Il faudra aller plus loin comme l’ont réussi les Tunisiens par exemple.

L’Economiste - Nabil Taoufik

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