Français du Maroc : Intérêts et sentiments

30 octobre 2007 - 00h22 - France - Ecrit par : L.A

Le président français qui vient de passer trois jours au Maroc (même si officiellement il ne vient pas pour les Français) aura eu sans aucun doute des attentions – sinon des intentions – précises pour ses électeurs français du Maroc, qui curieusement ne l’ont pas plébiscité en masse. Curieusement, car, à la pratique, beaucoup (trop) de Français du Maroc ont encore des comportements assez peu adéquats avec le concept d’un Maroc libre et indépendant. Les nostalgiques du protectorat, s’ils sont très peu nombreux officiellement, sont légion dans les pratiques quotidiennes que chacun peut observer.

Et ne parlons pas des chasses gardées des « services concessionnaires » Lydec, Amendis et autres SFR (Maroc Telecom). Il faut dire que le Maroc, est le pays où se trouvent le plus de Français vivant à l’Etranger. Les chiffres officiels ne reflètent absolument pas la réalité du nombre de Français installés dans le royaume. En témoigne le chiffre avancé par les autorités marocaines qui évaluent les seuls Français de Marrakech à 35.000 personnes (soit l’équivalent de toute la communauté officiellement enregistrée). D’abord, beaucoup de Français ne sont pas inscrits au Consulat, ensuite, beaucoup d’entre eux entrent et sortent au bout des 3 mois fatidiques du séjour touristique.

Petit tour des lieux où s’affiche la France au Maroc

Le Service de Coopération et d’Action Culturelle (SCAC) de Rabat, l’un des plus importants au monde en termes de moyens d’intervention, est chargé d’animer deux réseaux d’établissements, scolaires et culturels, ainsi que l’ensemble de l’activité de coopération franco-marocaine. « Les 9 instituts français et les 2 alliances franco-marocaines sont des lieux de culture et de rencontre. Ils proposent des cours de langue, ouvrent leurs médiathèques et établissent une programmation culturelle. Les instituts français sont partie prenante des projets de coopération entre les deux pays. Le réseau des instituts français concrétise sur le terrain la politique de partenariat franco-marocain coordonnée par le Service de Coopération et d’Action Culturelle. » Voilà qui est joliment dit, mais cette année comme la précédente, les budgets s’amenuisent et la « culture » n’a pas bonne presse dans la Sarkozie.

Sociologie nouvelle

Les Français sont aussi des fanatiques de l’association. Même les consulats et l’ambassade ne connaissent pas le nombre exact d’associations, dont presque toutes relèvent de la législation marocaine. Les « officielles » sont toutes en doublon et reflètent les sensibilités « gauche/droite », dans la proportion des résultats électoraux.

Les associations caritatives, les plus nombreuses, font de l’entrisme dans les causes sociales marocaines emblématiques : les enfants et la santé surtout. Les autres se partagent le public franco-marocain entre la culture, l’éducation et l’entraide franco-française. Mention spéciale pour la très contestée F.O.L. (Fédération des Œuvres Laïques) qui s’est signalée par ses méthodes musclées pour exclure les (rares) Français et (nombreux) Marocains qui avaient l’outrecuidance de vouloir savoir à quoi elle pouvait bien servir, elle et les généreuses subventions du SCAC. Depuis l’expulsion de fait des jeunes du « Boulevard des jeunes musiciens », silence radio de la part des autorités françaises et calme plat à la FOL. Mention encore plus spéciale pour le C.A.F. (Club Alpin français). Le « club des seigneurs » comme ils se définissent eux-mêmes. Le plus ancien club sportif français. Tenu de main de fer par son président historique, il recrute uniquement sur parrainage. Pas seulement des Français… mais mieux vaut être riche !

Cela dit, des Français se retrouvent nombreux (heureusement) dans une démarche réellement associative auprès des Marocains qui s’échinent à faire vivre une société civile digne de la vitalité de la société marocaine.

Autre curiosité française au Maroc, mais pas seulement semble-t-il. Mieux vaut ne pas avoir besoin de l’aide officielle de la France, incarnée par les consulats et les services sociaux afférents. Malgré le « Comité Consulaire pour la Protection et l’Action Sociale (CCPAS) », il vaut mieux être jeune, riche et bien portant que vieux, malade et pauvre. L’assistante sociale du consulat de Casablanca n’aime pas parler de ce Français installé à Aïn Sbaa (décédé l’an dernier) qui s’est vu refuser toute aide médicale et administrative sous prétexte qu’il ne venait pas « en personne » au bureau du Consulat. Et pour cause, il était grabataire. Immense bêtise de l’administration française : comme le médecin français accrédité n’a pas voulu se déplacer non plus (au fait c’est quoi le serment d’Hyppocrate, docteur ?) la famille fait appel à un médecin marocain qui constate l’état du malade. Qu’importe la qualité du médecin en question, il n’est pas accrédité par le service social français… Le bonhomme meurt seul dans la misère et d’atroces souffrances.

Ces Français-là, de plus en plus nombreux, bien que nulle statistique - et pour cause - ne les dénombre, ne se retrouvent guère dans le président qui arrive, mais nul doute que celui-ci sera attentif à cette sociologie nouvelle des Français du Maroc.

Gazette du Maroc - Danilo Casti

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Sujets associés : France - Nicolas Sarkozy - Immigration

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