L’Espagne injuste avec les Marocains

17 mai 2007 - 01h57 - Espagne - Ecrit par : L.A

Le Conseil général du pouvoir judiciaire est l’institution chargée de veiller à la bonne marche et à l’impartialité de la justice en Espagne. La Constitution démocratique de 1978 lui a conféré toutes les prérogatives en matière de justice . Elle l’a immunisé contre toute ingérence du pouvoir exécutif. On peut donc dire que, conformément à la loi fondamentale espagnole, la justice est indépendante et impartiale.

Mais, dans la réalité, cette impartialité n’est pas toujours effective. Si le corps de la magistrature y veille, certains magistrats, juges d’instructions et procureurs ont du mal à se prémunir contre la tentation de céder aux préjugés et aux prises de position personnalisées.

Deux affaires défraient actuellement la chronique judiciaire en Espagne. Les deux cas concernent des Marocains. Et à travers les deux affaires, on remarque combien la justice peut, parfois, même dans les pays démocratiques, être injuste.

Le lundi 14 mai, deux jeunes Espagnols ont été présentés devant le tribunal de « Malgarat de Mar », une petite ville du sud de l’Espagne, pour homicide. L’affaire remonte à 2001. Les deux mis en cause, des videurs d’une boîte de nuit, s’étaient acharnés contre Mouhcine Chennaoui, un jeune Marocain de 19 ans qui voulait juste entrer dans la discothèque en question. Après lui avoir asséné des coups de poings, ils ont sorti deux battes de baseball et l’ont tabassé jusqu’à ce qu’il perde conscience.

Ensuite, ils l’ont éloigné de l’entrée de la discothèque et sont retournés au travail. Mouhcine entrera dans un coma profond dont il ne sortira jamais puisqu’il mourra une semaine après. Sa famille sera même empêchée de le voir dans l’état où il avait été transporté à l’hôpital tellement il était défiguré. Cela fait six ans que l’affaire traîne devant la justice et les deux videurs sont en liberté. Devant le tribunal, le procureur demandera 12 ans de prison pour les deux accusés. Cela signifie que, même s’ils sont condamnés, ils ne resteront en prison que quatre ou cinq ans au maximum.

Dans le deuxième cas, il s’agit des deux Marocains Abderrazak Mounib et Ahmed Tommouhi. Les deux ont été accusés, en 1991, d’avoir commis des viols dans la région de Barcelone. Ils ont été condamnés à 100 ans de prison ferme. Les deux n’ont jamais été identifiés par leurs victimes. Ils ont pu démontrer dans certains cas qu’ils étaient dans un autre endroit que le lieu du crime. Et, pire encore, le violeur a continué à faire des victimes en utilisant le même modus operandi alors qu’ils étaient en prison. Un livre-enquête réalisé par le journaliste espagnol Braulio García Jaén (Condamnés pour leur visage) relate comment toute l’affaire a été bâclée et comment la justice espagnole a refusé, malgré toutes les preuves de reconnaître son erreur. Mounib est décédé en prison alors que Tommouhi est resté en prison jusqu’à 2007 où la justice lui a accordé la liberté conditionnelle. Il faut dire que la justice espagnole lui a suggéré, à maintes reprises de demander la grâce, mais, il refusait toujours puisqu’il voulait être acquitté et réhabilité.

L’écart entre les cent ans de Tommouhi et Mounib et les douze ans des deux videurs montre cruellement la distance qui sépare la justice de l’injustice en Espagne.

Aujourd’hui le Maroc - Omar Dahbi

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Espagne - Droits et Justice - Racisme

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : mères célibataires, condamnées avant même d’accoucher

Au Maroc, les mères célibataires continuent d’être victimes de préjugés et de discriminations. Pour preuve, la loi marocaine n’autorise pas ces femmes à demander des tests ADN pour établir la paternité de leur enfant.

Corruption : des élus locaux pris la main dans le sac

Abdelouafi Laftit, ministre de l’Intérieur, tente d’en finir avec la corruption et la dilapidation de deniers publics. Dans son viseur, une trentaine de présidents de commune et de grand élus dont il a transféré les dossiers devant l’agent judiciaire...

Annulation des accords UE-Maroc : le Polisario jubile

Le Front Polisario a salué la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) annulant les accords de pêche entre l’UE et le Maroc, la considérant comme un « triomphe de la résistance ».

Racisme envers les musulmans : de nouveaux témoignages accablent Christophe Galtier

L’ex-entraîneur de l’OGC Nice, Christophe Galtier, fait face à de graves accusations de discrimination et de harcèlement moral, avec un procès prévu dans dix jours.

Maroc : un magistrat sévèrement sanctionné

Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire vient d’ordonner la révocation d’un juge exerçant dans un tribunal de première instance, condamné pour corruption. Le magistrat a été pris en flagrant délit, alors qu’il recevait la somme de 500 dirhams de la...

Vers une révolution des droits des femmes au Maroc ?

Le gouvernement marocain s’apprête à modifier le Code de la famille ou Moudawana pour promouvoir une égalité entre l’homme et la femme et davantage garantir les droits des femmes et des enfants.

Maroc : Vague d’enquêtes sur des parlementaires pour des crimes financiers

Une vingtaine de parlementaires marocains sont dans le collimateur de la justice. Ils sont poursuivis pour faux et usage de faux, abus de pouvoir, dilapidation et détournement de fonds publics.

La chanson « Enty » de Sâad Lamjarred devant la justice

Le compositeur Mohamed Rifai a assigné DJ Van en justice à cause de la chanson « Enty » interprétée par Saad Lamjarred en 2014.

Haine envers les Marocains : prison ferme prononcée par la justice

Le parquet de Valence spécialisé dans les délits de haine a requis trois ans de détention contre un homme accusé de diffusion d’informations mensongères sur les réseaux sociaux ciblant les musulmans, notamment Marocains.

Maroc : WhatsApp banni pour la Gendarmerie royale

Suite à la décision de justice annulant un procès-verbal dressé via WhatsApp, la Gendarmerie royale a invité les commandements régionaux, casernes, centres et patrouilles au respect strict des textes en vigueur et à éviter d’envoyer tout document via...