« Comment sortir du monde ? » C’est le titre du tout premier roman du Franco-marocain Marouane Bakhti, paru aux Nouvelles Éditions du réveil en mars 2023. Il y raconte la vie, telle qu’elle vient, dans une famille biculturelle. Un récit éblouissant.
Des examens de langue et de culture néerlandaises seront imposés aux immigrés « non occidentaux » par la ministre de l’Intégration, Rita Verdonk. La mesure, avalisée vendredi par le gouvernement, vise un demi million de personnes. Entre 5 000 et 6 000 mécontents ont manifesté samedi à Amsterdam à l’appel d’une trentaine d’associations.
« Verdonk, ministre de la Provocation », « Arrêtez les tests d’intégration », « L’islam n’est pas l’ennemi »... Les slogans brandis hier sur le Dam, la principale place d’Amsterdam, voulaient marquer leur opposition à la politique de fermeté suivie par Rita Verdonk, la ministre conservatrice de l’Intégration. Une foule hétéroclite, composée essentiellement d’hommes d’origine turque et marocaine, de militants du petit Parti socialiste (SP, opposition) et de jeunes Néerlandais anti-racistes s’est rassemblée sous le mot d’ordre « assez c’est assez ».
Après avoir annoncé en 2003 l’expulsion de 26 000 demandeurs d’asile déboutés, Rita Verdonk a redoublé de fermeté après le meurtre du cinéaste Theo van Gogh, le 2 novembre 2004, par un jeune islamiste néerlando-marocain. La ministre la plus populaire de son gouvernement n’entend pas seulement supprimer la double nationalité dont bénéficient les Turcs et les Marocains, les deux plus fortes colonies d’immigrés aux Pays-Bas. Cette année, elle a aussi imposé aux nouveaux candidats à l’émigration des tests payants de langue et de culture néerlandaises dans les consulats de leurs pays respectifs, au Maroc notamment. Une mesure qu’elle voulait étendre à tous les « allochtones non occidentaux » présents aux Pays-Bas depuis 1975 et ayant passé moins de huit ans sur les bancs de l’école néerlandaise.
Une première en Europe
« Rita Verdonk fait n’importe quoi en jouant sur la peur et la faiblesse de l’opposition, affirme Abou Menebhi, à la tête d’Emcemo, l’une des 32 associations ayant appelé à manifester samedi. Tout le monde a peur, tout est suspect, le terrorisme est partout. Mais les mesures du gouvernement n’ont pas d’autre objectif que de rendre la vie plus dure aux immigrés ». Le gouvernement a donné le 16 septembre son aval aux fameux « examens de citoyenneté », qui seront adoptés dans la semaine par le Parlement.
Au lieu des 775 000 personnes initialement concernées, ce sont 500 000 personnes qui devront finalement s’y soumettre. Après un avis défavorable du Conseil d’Etat, en juillet, qui a mis en garde contre le contenu discriminatoire du projet de loi, Rita Verdonk s’est résolue à faire la différence entre les étrangers et les Néerlandais d’origine étrangère, tous compris dans le même groupe des « allochtones ».
Les « allochtones » se sentent de moins en moins Néerlandais
Les naturalisés seront exemptés - à l’exception des imams - de même que tous les plus de 60 ans. Nadia, une mère de famille marocaine installée aux Pays-Bas depuis plus de vingt ans, vit ces examens comme une « humiliation ». « Tous mes enfants sont nés et ont grandi dans ce pays, dit-elle. Que vont-ils penser si je dois maintenant me soumettre à des tests ? Le résultat de toute cette politique, c’est que nos jeunes n’ont plus qu’une discussion : partir, rentrer au pays ».
Selon un sondage publié le 5 août par Intelligence Group, les « allochtones » se sentent de moins en moins Néerlandais : 18 % des Turcs, Marocains et Antillais et ressortissants du Surinam interrogés cette année se classent plutôt du côté des « étrangers », contre 13 % en 2004.
Reuters - RFI - Sabine Cessou
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