MRE : Crise passagère ?

1er avril 2009 - 20h04 - Economie - Ecrit par : L.A

Ce sont 53,65 milliards de dirhams qui ont été envoyés en 2008 par les Marocains Résidents à l’Etranger (MRE) contre 57 milliards de dirhams en 2007, soit une baisse de 2,4%. Ces transferts, recettes, principale source de devises pour le pays, représentent une part de 16% dans la balance des paiements du Maroc, juste après les biens et services, allant jusqu’à peser le double des investissements directs étrangers (IDE).

Avec 42,2%, la France reste le plus gros émetteur des transferts financiers effectués par les MRE, loin devant l’Espagne et l’Italie avec respectivement 15,3% et 12,2%. Socialement, ces pays souffrent. Crise oblige. A l’horizon 2030, les transferts MRE s’accroitraient de 20% en projection optimiste ou chuteraient de moitié en celle pessimiste.

Les enjeux financiers, dont cette approche prospectiviste, ont été présentés par Mohamed Belqziz, directeur général adjoint de la Banque Centrale Populaire (BCP), alors en conférence-débat, vendredi, sur le thème « Les Marocains résidents à l’étranger et la crise actuelle : Quelles perspectives ? », au Centre de recherches Links, à la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales - Université Hassan II. « Année de l’Université » et « Faculté sexagénaire » avaient introduites par Mohamed Berrada, président du Centre organisateur de la rencontre.

Rappel historique intéressant que fait Mohamed Belqziz, depuis 1931, année où la France règlemente ces flux migratoires jusqu’à l’immigration « choisie » de nos jours, passant par la signature de la « Convention de la main-d’œuvre », d’où un cycle migratoire inédit entre 1963 et 1974. Ils sont plus de 3,3 millions de MRE dans le monde. Pour les principaux pays européens, la population marocaine est estimée aujourd’hui à 1.800.000 personnes, soit 60% de la diaspora, d’un taux d’activité moyen de 35% (69% des actifs sont ouvriers). Facteurs démographiques : diminution de la natalité, féminisation et rajeunissement de cette population (plus de 50% des MRE ont moins de 25 ans), accroissement des acquisitions de la nationalité du pays d’accueil, émergence d’un segment de cadres et des professions libérales et enfin un reflux de l’idée de retour définitif avec la scolarisation des enfants. Le secteur des transferts MRE, c’est une analyse SWOT présentée par le conférencier. Des forces.

Un fort attachement culturel des MRE au Maroc, une bonne croissance économique du Maroc durant ces dernières années avec un potentiel de croissance future et un système bancaire structuré. Et des faiblesses. Un rayonnement culturel du Maroc peu organisé, pas de politique ciblée incitatrice à l’investissement et communication inefficace, des produits bancaires classiques et une ouverture à des organismes orientés exclusivement vers la consommation. Le secteur des transferts MRE présente des opportunités : immigration clandestine, besoins en main d’œuvre croissants dans les pays développés à population vieillissante et le Maroc comme terre d’accueil des retraités de diverses nationalités. Face à ceci se dressent des menaces, essentiellement une politique d’immigration choisie, des stratégies d’intégration développées par les pays d’accueil sans contre-stratégies du Maroc, récession mondiale actuelle (-1,5% de croissance en 2009 et 0% en 2010), des contrôles très restrictifs des flux de transferts par les pays d’accueil et un renversement de la relation client-banque où le MRE devient prioritairement client de sa banque dans son pays de résidence et dispose d’un compte de service dans sa banque au Maroc.

Face à la crise actuelle, Mohamed Belqziz énumère une série de propositions. Une meilleure maîtrise des phénomènes « Push » et « pull », la réduction des coûts des transferts avec attention à leur orientation, notamment vers les canaux bancaires et la consommation de produits importés, selon la variable taux de change et l’objectif de compétitivité des entreprises (Dutch Disease). Aussi, il est proposé la création de véhicules dédiés à l’épargne, le placement et l’investissement, à l’instar des fonds communs de placement régionaux, des fonds dédiés au microcrédit et des programmes immobiliers touristiques aux normes européennes.

Coté culturel, une meilleure organisation du rayonnement culturel marocain passerait par des maisons de culture dans les grandes capitales, des manifestations artistiques, des voyages culturels au Maroc, des universités d’été, des médias dédiés… La spiritualité compte avec une meilleure approche de la dimension religieuse en concertation avec les pays d’accueil. Enfin, le DGA de la BCP préconise une forte coordination entre les différents intervenants (ministères, fondations, conseil, banques,…), insistant sur l’organisation de relais bien structurés dans les pays d’accueil.

Étude comportementale

Dans son intervention au Centre Links, Mohamed Belqziz a présenté les résultats d’une étude portant sur les nouveaux comportements des MRE, menée en France auprès d’un échantillon de 1100 personnes, représentatif de la population « seconde génération », âgées de 18 à 40 ans. Entre la conviction et l’indétermination, la culture marocaine et européenne, se distinguent des préférences culturelles pro-marocaines ou pro-européennes, selon la densité des opinions et la force de conviction. Les résultats affichent une typologie en 5 groupes distincts. Majoritaires sont les « biculturels ». A 58,2%, ils vivent entre deux mondes. Les « mutants » s’intègrent, un type qui représente 15,5%. Marocains avant tout, les « conservateurs » font 10% de l’échantillon alors que les « assimilés », européens avant tout, en représentent 8,1%. Enfin, les « fragiles » ne savent pas dire, ils reviennent à hauteur de 8%.

Source : Le Matin - Réda Bennis

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