Les contours du prochain gouvernement

13 septembre 2007 - 01h09 - Maroc - Ecrit par : L.A

Après le scrutin, l’heure est aux coalitions pour former la prochaine majorité gouvernementale. En tout cas, les tractations vont bon train. Elles ont, en fait, déjà commencé depuis la nuit de vendredi à samedi.

Le Parti de l’Istiqlal (PI) détient le rôle de meneur de jeu. Il a la plus forte marge de manœuvre et des arguments de taille : le score réalisé le 7 septembre et le bilan de ses ministres avec le gouvernement actuel.

Ce n’est donc pas un hasard si le SG du PI a réitéré l’engagement de son parti à poursuivre les chantiers et réformes entamés ainsi que le respect du pacte scellé dans le cadre de la Koutla démocratique, le 22 août dernier. La première sortie de Abbas El Fassi apparaît ainsi sans équivoque. Le parti veut revenir aux « affaires » gouvernementales.

Peut-être même diriger le prochain gouvernement. Elle annonce aussi le ton et la couleur : incontestablement, « les résultats du scrutin font du front de la Koutla la première force politique du pays et confortent les partis de la majorité ».

Autrement dit, tout porte à croire que la coalition actuelle composée de 5 partis (PI, USFP, PPS, RNI et MP) sera reconduite. « C’est la coalition la plus logique », estime Nabil Benabdallah, ministre de la Communication et membre du bureau politique du PPS.

Pour sa part, le politologue Mohamed Tozy tient à nuancer : « Koutla ou pas, la donne a changé. Même reconduite, il ne faut pas oublier que ce ne sera jamais la même Koutla ». En clair : Depuis 1997, l’USFP a été chef de file de ce bloc. Dans le temps, l’Istiqlal ne faisait pas le poids face à l’USFP », rappelle Tozy. Entre-temps, poursuit-il, l’Istiqlal a gagné du terrain en 2002 sans avoir la taille qu’il fallait pour traiter d’égal à égal avec la formation socialiste forte du verdict des urnes (50 sièges en 2002). L’USFP avait donc gardé son rôle central.

Aujourd’hui, l’Istiqlal est leader de la Koutla avec une légitimité acquise par les urnes. C’est dire le poids d’un référentiel conservateur qui ne manquera pas de s’imposer. Ceci étant, tous les scénarios restent possibles, précise le politologue. Pour lui, « le gouvernement, c’est d’abord la volonté du Souverain et les coalitions qui en découleront ». Mais au cas où la majorité actuelle serait reconduite, il y a le risque que l’opposition soit davantage laminée. Pas si sûr, souligne Lahcen Daoudi, numéro 2 du PJD : « Le front de l’opposition sera élargi », estime-t-il.

Le véritable enjeu, en réalité, est d’avoir un gouvernement ramassé et cohérent d’une part, et une forte opposition de l’autre. Pour l’opposition, deux pôles sont identifiés : d’un côté les conservateurs (PJD) ; de l’autre, un pôle de gauche (USFP). « Tout dépendra de la pression qu’exercera la base de l’USFP sur ses dirigeants », précise Tozy. La direction du parti entend s’arrimer à la Koutla, alors que la base préfère assumer son « échec » et regagner l’opposition.

Pour le Parti de la justice et du développement (PJD) qui serait certainement contraint à l’opposition, les jeux ne sont pas encore faits. Lahcen Daoudi précise toutefois que « rien n’est encore joué. C’est un peu prématuré de se prononcer sur ce sujet. Il faudra attendre la nomination du Premier ministre. Notre parti prendra acte de cette nomination ».

Selon les dispositions de l’article 24 de la Constitution, c’est le Souverain qui nomme le Premier ministre. « C’est dire qu’il n’est pas sûr que le chef du gouvernement soit issu de la Koutla », fait remarquer Daoudi.
Par ailleurs, le dirigeant renchérit : le PJD n’est pas piégé par la Koutla. Celle-ci, poursuit-il, « n’est qu’un artifice que l’on ressuscite ou enterre lorsque cela arrange et selon les intérêts des uns et des autres ».

Aux yeux de la formation de Saâd Eddine Othmani, il y a un message derrière le 7 septembre, « les urnes et le taux de participation ont démontré la désaffection de la majorité sortante. Il faut en tenir compte ».

Que risque-t-il de se passer maintenant ? Le Souverain qui va recevoir en audiences les dirigeants de partis, devrait nommer un Premier ministre dans les prochains jours. Politique ou technocrate ? Personne ne veut se hasarder à avancer un nom ou un parti. Du moins dans les hautes sphères des directions des formations politiques.

« La nomination du chef du gouvernement est une prérogative de S.M. le Roi. Il est donc prématuré d’en parler maintenant, surtout que le Souverain n’a pas encore entamé ses audiences ». C’est la réponse qui revient comme un leitmotiv.

Mais la rue a déjà « désigné et le Premier ministre et les membres du gouvernement ». Allant bon train, la rumeur avance déjà des noms : Abbas El Fassi, Adil Douiri, Karim Ghellab ou encore Taoufik Hejira, Mustapha Mansouri, Ali-Al Himma et Mohand Laenser… L’un d’eux sera chargé de former le nouveau gouvernement, selon la rumeur. Mais aucun commentaire de leur part.

Toujours selon la rumeur, certains ministres de l’actuel gouvernement pourraient conserver leur portefeuille. On parle ainsi de Karim Ghellab à la tête du département de l’Equipement, de Taoufik Héjira à l’Habitat et de Chakib Benmoussa à l’Intérieur. Nabil Benabdallah pourrait rempiler à la Communication. Les Affaires étrangères reviendraient à Taïeb Fassi-Fihri, alors que les Affaires islamiques continueraient à être gérées par Ahmed Taoufik.

D’autres ministres qui ont fait leurs preuves avec le gouvernement actuel seraient reconduits. Mais n’auraient pas les mêmes portefeuilles. Ainsi Adil Douiri, dit-on, serait pressenti pour les Finances à la place de Fathallah Oualalou. Ce dernier, toujours selon la rumeur, aurait émis le souhait de se retirer. Ne l’a-t-il pas déjà fait en décidant de ne pas se présenter aux législatives ?

En tout état de cause, les tractations auraient déjà commencé au sein des états-majors des partis pour l’attribution de portefeuilles. Les réunions se suivent à une très grande cadence, mais rien ne filtre sur leur teneur.

Quid du PJD

Reste un autre cas de figure : le PJD est invité à intégrer le futur gouvernement. Cette option éventuelle impliquerait les islamistes dans la future politique gouvernementale. Mais sous quelles conditions ? On avance que des portefeuilles à caractère social pourraient leur être attribués. Les compagnons de Othmani accepteront-ils le deal ?

L’Economiste - J.E. Herradi

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