Pierre Robert, dont le procès s’était déjà brièvement ouvert lundi dernier, est désormais défendu par un nouvel avocat, Me Abdelfettah Zahrach, membre influent de l’Association marocaine de défense des droits de l’homme (AMDH). Celui-ci a demandé un délai à la cour pour préparer la défense de son client.
Il a aussi demandé une expertise médicale, Pierre Robert ayant été légèrement blessé lors de son transfert depuis la prison de Salé, en banlieue de Rabat, vers le palais de justice, placé sous très haute surveillance policière. Selon Me Zahrach, le Français aurait été « blessé aux cervicales » suite à un violent coup de frein du fourgon cellulaire qui roulait à très vive allure. Se sentant « très faible », l’accusé a été autorisé à s’asseoir pendant l’audience.
Interpellé le 3 juin à Tanger où il vivait depuis 1997, Pierre Robert, 32 ans, converti à l’islam en 1990, est accusé, avec 34 autres complices marocains, d’avoir oeuvré à la mise en place de « maquis islamistes » dans les montagnes du Rif dans le nord du Maroc.
Originaire de la région de Saint-Etienne (Loire), Pierre Robert, qui a séjourné en Afghanistan, a des solides connaissances d’artificier, selon l’accusation, et aurait été en relation avec le mollah Omar, numéro un de l’ancien régime taliban, aujourd’hui en fuite. Pour l’heure, ces éléments n’ont pas été confirmés à l’audience.
Poursuivi notamment pour « constitution de bande criminelle en relation avec une entreprise terroriste » et « complicité d’atteinte à la sûreté de l’Etat », Pierre Robert encourt la peine de mort. La peine capitale est encore régulièrement prononcée au Maroc mais elle n’a pas été exécutée depuis 1993.
« Pierre Robert a bon moral et a gardé intactes toutes ses convictions islamistes », a déclaré à l’Associated Press une source judiciaire marocaine qui a requis l’anonymat. « Pour l’instant, il n’a pas exprimé le souhait d’être transféré en France ». La France et le Maroc sont liés par une convention judiciaire qui autorise à leurs nationaux respectifs de purger leur détention dans leur pays d’origine.
Pierre Robert, qui s’exprime très bien en arabe, est le seul islamiste étranger poursuivi dans le cadre du vaste coup de filet opéré après les attentats islamistes du 16 mai à Casablanca (45 morts dont 12 kamikazes), qui « portent la signature d’Al-Qaïda », selon les autorités marocaines.
Sa comparution intervient par ailleurs alors que la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) « tire la sonnette d’alarme » sur « les pratiques arbitraires » caractérisant la lutte antiterroriste au Maroc. La FIDH dénonce ainsi, dans un communiqué publié vendredi, « des arrestations qui s’apparentent à des enlèvements », « la pratique courante de la torture » et, « dans la majorité des cas, une violation des règles élémentaires de procès équitable ».
AP