Qui sont nos MRE ?

5 août 2008 - 20h07 - Maroc - Ecrit par : L.A

Ils sont plus de deux millions et demi de Marocains à vivre en Europe, soit près de 85% de la diaspora marocaine. Les vagues d’immigration successives ont donné lieu à une communauté marocaine de plus en plus importante qui a, souvent, du mal à s’intégrer dans les pays d’accueil. Les difficultés pour nos ressortissants à trouver du travail à l’étranger l’attestent.

Le Haut commissariat au plan (HCP) a procédé à une analyse des mécanismes du processus d’insertion des Marocains résidant à l’étranger. Pour Ahmed Lahlimi Alami, Haut Commissaire au plan, « l’immigration a vocation à impacter, dans une mesure importante, la qualité des rapports entre les pays du nord et du sud de la Méditerranée ». Les enjeux de l’immigration sont indéniables. L’enquête du HCP a porté sur un échantillon de 3000 ménages, une population considérée représentative de l’ensemble de la communauté marocaine installée en Europe.

L’étude réalisée en 2005 n’a rien perdu de son contenu. Trois ans plus tard, si les chiffres ont quelque peu évolué, l’analyse qualitative demeure la même. La France est toujours le principal pays d’accueil des Marocains. 32,6% de nos ressortissants y sont installés. Viennent après, l’Espagne et la Belgique avec respectivement 18,4 et 12,9%. L’Italie compte près de 12,6% de la totalité de la diaspora et 11,8% aux Pays-Bas. Mais ils sont à peine 4% à s’être aventurés à aller en Allemagne.

L’installation des Marocains dans les pays arabes est relativement récente mais a évolué rapidement au point que ces nouvelles destinations constituent aujourd’hui le deuxième pôle d’attraction des Marocains résidant à l’étranger. Le profil de la communauté MRE en Europe a lui aussi vite changé ces dernières décennies. Il tend vers une structure par âge et par sexe « plus équilibrée », en raison « de la féminisation et du rajeunissement de la population immigrée par l’arrivée massive des femmes et des enfants dans le cadre du regroupement familial » et surtout « de l’immigration féminine autonome apparue récemment », explique l’étude du HCP.

L’âge moyen des migrants a augmenté, il est passé de 20 ans dans les années 60 à 28 ans dans les années 2000. Actuellement, celui des chefs de ménage est de 42,3% alors que celui des femmes chefs de famille est inférieur à celui des hommes, 39,3 ans.

Elles sont de plus en plus nombreuses à immigrer, seules, affirme l’étude. Dans la tranche d’âge de 20-29 ans, elles sont 19,2 % contre seulement 11,4% de compatriotes masculins.

L’immigration des femmes révèle l’évolution certaine des moeurs dans notre société ainsi que le niveau d’instruction. Quoi qu’il en soit, la seule constante dans toute l’histoire des MRE, reste le motif de l’immigration qui demeure incontestablement la recherche de travail.

Une fois établi, l’immigré a besoin de repères, de retrouver ses racines. Le regroupement familial a grossi les rangs de la communauté MRE et donné naissance à de nouvelles générations. Mais depuis les premières vagues d’immigration, les choses ont bien changé.

Possibilités de retour

Dans les années 1960-70, atteste le rapport, la migration constituait un facteur important d’incitation au mariage, alors que pour les générations nouvelles et récemment émigrées, le mariage est de plus en plus tardif.

Les familles se rétrécissent, toutefois l’analyse de l’ensemble des migrants âgés de plus de 15 ans a révélé qu’une proportion importante de la population migrante des deux sexes est mariée, (62,9%).

Globalement, la proportion des migrants célibataires diminue avec l’âge. Cette dernière a atteint 97,9% pour le groupe d’âge 15-19 ans et décline à 0,3% pour le groupe 55-59 ans. Pour ceux âgés de 70 ans et plus, il faut relever la part importante de veuvage et la présence du célibat définitif, soit 13,5% pour les veufs et 2,7% pour les célibataires.

Mais qu’il soit vieux ou jeune, récemment installé ou depuis longtemps établi, l’immigré n’arrive pas à couper les liens irréductibles qu’il a avec sa terre. Les visites au pays en sont le reflet. Mais elles évoquent aussi une situation sociale.

Le manque de moyens a une incidence directe sur la fréquence des visites. L’enquête révèle que « les MRE dont la fréquence des visites est relativement réduite vivent dans des logements de type construction provisoire ». Les deux tiers de cette catégorie sociale (66,6%) se rendent au Maroc plus de 2 fois tous les trois ans. Inversement, la fréquence d’au moins une visite par an dépasse 70% pour les ménages logés dans une villa ou étage de villa (73,8%). Ceux qui vivent dans une maison individuelle 74,2% ou dans un immeuble collectif 70,5%. Les MRE chefs de ménage propriétaires de leur logement visitent le Maroc avec une fréquence supérieure à celle des locataires. Les premiers ne sont que 9,3% à effectuer une seule visite tous les trois ans contre 10,7% pour les seconds.

Les restrictions des visites ne sont pas seulement imputables aux conditions sociales. Elles suivent de près l’évolution de la nature du travail. En effet, les MRE qui enregistrent une fréquence de visites relativement notable, sont ceux dont l’activité économique consiste, entre autres, en un va-et-vient entre le pays d’accueil et d’origine. La politique des regroupements familiaux a aussi réduit les visites au bled. Les MRE dont le conjoint vit toujours au Maroc sont les plus enclins à multiplier leurs visites (17,6%). Plus d’une fois par an contre 10% pour les MRE vivant au pays d’accueil avec leur conjoint. On revient aussi au pays pour voir ses enfants. Les parents constituent 18% des visiteurs qui rentrent au pays plus d’une fois par an. Cette proportion s’élève à 17,9% pour ceux qui ont conjoint et enfants au Maroc.

Source : L’Economiste - Amira Khalfallah

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