Divorce au Maroc : pourquoi tant de femmes repartent sans rien

30 juin 2025 - 12h00 - Maroc - Ecrit par : Bladi.net

Au Maroc, la question du patrimoine conjugal en cas de divorce pose problème. Une grande majorité de femmes se retrouvent sans protection économique après des années de vie commune. En cause, le fameux article 49.

La réforme en cours du Code de la famille (Moudawana) au Maroc suscite de fortes attentes, mais un de ses aspects les plus critiques demeure insuffisamment traité : la protection économique des femmes en cas de divorce. Le cadre juridique actuel sur le partage des biens place de nombreuses conjointes dans une situation de vulnérabilité, où des années de contribution au foyer peinent à être reconnues, rappelle Policy Paper dans un rapport publié en 2024.

À lire : MRE : vers la fin des obstacles au mariage et à l’héritage ?

Le nœud du problème réside dans l’article 49 du Code de la famille de 2004. Celui-ci instaure par défaut le régime de la séparation des biens, signifiant que chaque époux conserve la propriété des biens enregistrés à son nom. Bien que la loi permette aux couples de signer un contrat pour organiser la gestion du patrimoine commun, cette option est très peu utilisée en pratique, notamment dans les contextes ruraux et populaires où les formalités contractuelles entourant le mariage ne sont pas une norme établie.

À lire : Divorce : ce flou juridique qui pénalise les femmes marocaines

En l’absence d’un tel contrat, la charge de la preuve incombe entièrement à l’épouse. Pour faire valoir ses droits sur le patrimoine familial, elle doit fournir des preuves tangibles de sa contribution financière à son acquisition. La tâche est souvent complexe, voire insurmontable, lorsque les biens immobiliers et mobiliers sont systématiquement enregistrés au seul nom du mari. Dans de nombreux cas, les juges s’en tiennent à la titularité officielle des actes de propriété pour statuer.

À lire : Mariée de force au Maroc, elle porte plainte pour viol en France (Béziers)

Cette difficulté probatoire a des conséquences directes. Certaines femmes sont contraintes de renoncer à leurs droits patrimoniaux légitimes simplement pour accélérer une procédure de divorce. Le phénomène est aggravé par des pratiques de dissimulation de patrimoine, comme l’enregistrement de biens au nom de tiers ou la non-déclaration fiscale, qui visent à soustraire les actifs à toute éventuelle réclamation de la part de l’épouse.

À lire : Ce qui pourrait changer pour le mariage des MRE

Au-delà de la contribution financière directe, la question du travail domestique non rémunéré constitue un autre obstacle majeur. La gestion du foyer et l’éducation des enfants, bien que reconnues comme une contribution à la charge du ménage par la Constitution de 2011 et les conventions internationales ratifiées par le Maroc, ne se traduisent par aucun droit économique concret. Le rapport à l’origine de ces constats pointe un manque de formation des magistrats sur l’évaluation de cet apport, le laissant sans valeur quantifiable lors de la liquidation du régime matrimonial.

À lire : Sur Al Oula, une scène jugée humiliante pour l’homme marocain

Face à cette situation, une solution technique est proposée par plusieurs experts : l’instauration d’un régime légal des acquêts comme option par défaut. Ce système, en vigueur dans de nombreux pays, présumerait que tous les biens acquis durant le mariage sont communs, sauf preuve contraire. Une telle mesure inverserait la charge de la preuve et garantirait un partage plus équitable en reconnaissant implicitement les contributions non monétaires de chaque conjoint.

Avec 24 000 cas de divorce enregistrés au Maroc en 2024, dont une part importante par consentement mutuel, la portée de cet enjeu est considérable. Sans une révision claire des mécanismes de partage des biens, la réforme de la Moudawana risque de laisser perdurer une insécurité juridique et financière qui pénalise majoritairement les femmes ayant sacrifié leur autonomie économique au profit du foyer conjugal.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Lois - Divorce - Moudawana (Code de la famille)

Aller plus loin

Les Marocaines pénalisées en cas de divorce ?

Des associations féminines sont vent debout contre la réforme d’Abdelatif Ouahbi, ministre de la Justice, imposant aux femmes ayant un revenu supérieur à celui de leur conjoint...

Achraf Hakimi sur son divorce : « C’était la chose la plus difficile »

Achraf Hakimi a évoqué pour la première fois son divorce controversé avec l’actrice espagnole Hiba Abouk, mère de ses deux enfants. Le défenseur marocain du Paris Saint-Germain...

Divorce entre Gims et DemDem : que va devenir leur villa à Marrakech ?

Demdem, la compagne de Gims depuis 20 ans, et mère de ses quatre enfants, a annoncé en story sur Instagram être divorcée du rappeur. Que va devenir la ville qu’ils possèdent à...

Une mariée marocaine refuse la tenue amazighe, le mariage se termine en divorce

Un mariage célébré au Maroc a connu un dénouement inattendu et triste. Le marié a prononcé le divorce le soir même des noces, suite au refus de sa jeune épouse de revêtir la...

Ces articles devraient vous intéresser :

Les Marocaines paieront aussi la pension alimentaire à leurs ex-maris

Au Maroc, les femmes ayant un revenu supérieur à celui de leur conjoint pourraient avoir à verser une pension alimentaire (Nafaqa) à ce dernier en cas de divorce, a récemment affirmé Abdellatif Ouahbi, le ministre de la Justice.

Farah El Fassi et Omar Lotfi : le couple star du cinéma marocain divorce

Le couple emblématique du cinéma marocain, Farah El Fassi et Omar Lotfi, a officiellement divorcé. La nouvelle, largement relayée sur les réseaux sociaux, a été confirmée par une source proche de l’actrice.

Une mariée marocaine refuse la tenue amazighe, le mariage se termine en divorce

Un mariage célébré au Maroc a connu un dénouement inattendu et triste. Le marié a prononcé le divorce le soir même des noces, suite au refus de sa jeune épouse de revêtir la traditionnelle tenue amazighe.

Yassine Bounou et Imane Khallad : leur couple scruté sur Instagram

Imane Khallad, la compagne de Yassine Bounou, a commencé à suivre à nouveau son mari sur Instagram, laissant croire à une amélioration de leurs relations après des rumeurs de séparation.

Maroc : mères célibataires, condamnées avant même d’accoucher

Au Maroc, les mères célibataires continuent d’être victimes de préjugés et de discriminations. Pour preuve, la loi marocaine n’autorise pas ces femmes à demander des tests ADN pour établir la paternité de leur enfant.

Les Marocaines pénalisées en cas de divorce ?

Des associations féminines sont vent debout contre la réforme d’Abdelatif Ouahbi, ministre de la Justice, imposant aux femmes ayant un revenu supérieur à celui de leur conjoint de verser une pension alimentaire à leurs ex-maris après le divorce.

Hiba Abouk revient sur son divorce avec Achraf Hakimi

Lors de sa participation aux Goya Awards 2025, Hiba Abouk a éludé la question des journalistes au sujet de la déclaration de son ex-mari Achraf Hakimi qui a récemment confié avoir été très affecté par leur séparation.

Vers une révolution des droits des femmes au Maroc ?

Le gouvernement marocain s’apprête à modifier le Code de la famille ou Moudawana pour promouvoir une égalité entre l’homme et la femme et davantage garantir les droits des femmes et des enfants.

« Tu mourras dans la douleur » : des féministes marocaines menacées de mort

Au Maroc, plusieurs féministes, dont des journalistes et des artistes, font l’objet d’intimidations et de menaces de mort sur les réseaux sociaux, après avoir appelé à plus d’égalité entre l’homme et la femme dans le cadre de la réforme du Code de la...

Hiba Abouk parle de sa nouvelle relation avec Achraf Hakimi

Après une pause dédiée à l’éducation de ses enfants, l’actrice Hiba Abouk refait surface dans le monde du spectacle. Elle a récemment partagé ses expériences et défis personnels, notamment sa séparation avec le footballeur du PSG, Achraf Hakimi.