Les vacances, un luxe inaccessible pour de nombreux Marocains

Abdelkader, un père de trois enfants, n’a pas pu s’offrir des vacances avec sa famille cette année. Après calcul, les coûts de la location, des repas et du transport dépassaient largement son budget. « On a dû renoncer. On se contente de sorties à la plage, mais ce n’est pas pareil », confie ce résident de Casablanca au Matin. Samir, un autre père de famille, qui a pu se rendre dans le Nord, fait face à la dure réalité de la cherté des prix. « Ce n’est pas seulement les vacances, c’est la vie entière qui est devenue plus chère. On profite quand même, mais on rentre avec la sensation d’avoir dépensé plus pour la même chose », explique-t-il.

À lire : Pourquoi les touristes marocains boudent les hôtels cette année

Youness Mohssine, agent immobilier spécialisé dans la location saisonnière, note pour sa part une stabilité des prix par rapport à l’année dernière. « Cette année, nous avons effectivement observé une baisse des réservations, notamment dans les résidences balnéaires avec piscine de la région de Casablanca et Sidi Rahal. Pourtant, les tarifs appliqués sont restés les mêmes que les années précédentes. Le problème vient surtout de la baisse du pouvoir d’achat : avec la cherté de la vie, les gens n’arrivent plus à mettre de côté pour les vacances comme avant », analyse-t-il, précisant que « dans la région de Sidi Rahal, le taux d’occupation ne dépasse pas 50 à 60 % cette saison, alors qu’il atteignait les 100 % auparavant. Et la clientèle est désormais majoritairement locale, alors qu’avant, nous avions beaucoup de Marocains résidant à l’étranger. »

À lire : Le Maroc parie sur le tourisme interne

Les agences de voyage se plaignent aussi de la baisse des réservations pour les touristes marocains. « Il faut rendre les séjours au Maroc plus abordables, surtout en tenant compte du fait que les Marocains voyagent majoritairement en famille, souvent nombreuse », plaide Mohamed Semlali, président de la Fédération nationale des associations des agences de voyages du Maroc (FNAAVM). Toutefois, certains arrivent à trouver leur compte. « C’est une saison magnifique, sans aucun ralentissement ni baisse des réservations. Les ventes pour juillet et août étaient bouclées dès la fin mars », se réjouit Amine Zghaoui, directeur commercial et marketing pour le Maroc et directeur général adjoint de l’hôtel Aqua Mirage. Selon lui, les touristes marocains limitent leurs chances en réservant à la dernière minute, alors que les étrangers le font des mois voire un an à l’avance.

À lire : La stratégie du Maroc pour booster le tourisme interne

Selon Ali Ghannam, président de l’Observatoire du tourisme, les touristes marocains ont simplement revu leurs habitudes de vacances face à la hausse généralisée des prix. « Il ne s’agit pas d’un désintérêt, mais d’un recentrage sur des formes de tourisme différentes : destinations de proximité, séjours plus courts, réservations à la dernière minute, choix plus sélectifs des prestations », explique-t-il, ajoutant que « les touristes font des arbitrages : choix de destination, mode de réservation, flexibilité… toujours dans la recherche d’un rapport qualité/prix optimal ». Et de conclure : « L’accessibilité des vacances pour toutes les classes sociales est une priorité. Cela passe par des politiques tarifaires adaptées, le développement de produits accessibles toute l’année, la valorisation des destinations de proximité et le soutien aux initiatives locales ».