Déambulations dans les dédales de Marrakech

25 avril 2009 - 20h00 - Maroc - Ecrit par : L.A

Indissociables depuis des siècles de la place Djema El-Fna, coeur vibrant de Marrakech, les charmeurs de serpents font mine d’ignorer qu’une menace pèse sur leurs activités. Lancé sur Internet en janvier 2008, un "appel au boycott des spectacles de serpents" revendique plus de 700 signataires d’une dizaine de pays, selon l’auteur de la pétition, Michel Aymerich, cofondateur de l’association Géos.

Ce Français installé au Maroc accuse les charmeurs de serpents d’amputer cobras et vipères heurtantes de leurs crochets venimeux ou de leurs glandes et de les contraindre à des "positions de défense stressantes" afin qu’ils se dressent devant les touristes. Selon lui, les serpents sont privés d’eau et de nourriture, si bien que "tous meurent d’épuisement au bout de deux ou trois mois".

La manipulation des serpents est rattachée aux rites magiques des Aissaouas, une des plus célèbres confréries du Maroc. Ils capturent leurs serpents dans les sanctuaires de Guelmin et de Tan-Tan, au sud d’Agadir, alors qu’ils seraient en voie de disparition, selon Géos, bien que ne figurant pas sur la liste mondiale des espèces menacées. Pour préserver les sources de revenus de la confrérie, l’association propose d’"organiser sur la place des expositions didactiques avec des vivariums". L’accueil n’est pas enthousiaste.

Joyau arabo-berbère depuis le XIe siècle, Marrakech s’est déjà adaptée, bon gré mal gré, aux critères de la modernité occidentale. La majorité des 7,5 millions de touristes arrivés l’an passé au Maroc sont passés par la ville tout en rouge, rose ou ocre - qui entend doubler le nombre de chambres d’hôtel (40 000 actuellement) d’ici à dix ans.

Quand ses charmeurs de serpents dorment, la place Djema El-Fna est parcourue par des armées de balayeurs municipaux. Le jour, une "police touristique" pourchasse les importuns dans les souks et les parcs attenants. Sensibilisé aux dangers de la déforestation, le wali (préfet) promet de replanter pas moins de 400 000 arbres dans la Palmeraie.

A l’abri de ses remparts, la vieille ville médiévale de Marrakech semble, elle, préservée des obsessions contemporaines. Déambuler dans cette médina, c’est s’offrir le luxe de perdre son temps en remontant les siècles, aux côtés d’ânes tirant des charrettes, "le 4 ×4 berbère", plaisante l’un de ses conducteurs.

Dans les dédales de rues et de venelles surgissent de magnifiques riads, des fondouks, anciennes auberges des caravaniers du Sud, où fourmillent maintenant des artisans appliqués. Dans le labyrinthe des souks, le commerce reste un art et le marchandage, une règle. Les tanneurs offrent aux narines sensibles un bouquet de menthe en guise de "masque à oxygène", au bord de leurs cuves en plein air.

Les dynasties se sont succédé à Marrakech, laissant de superbes legs dans la ville fortifiée. Une koubba, kiosque aux ablutions redécouvert en 1948, est l’oeuvre des Almoravides. Edifié par leurs successeurs almohades au XIIe siècle, le minaret de la Koutoubia impressionne le jour et éblouit la nuit. La medersa ben Youssef - en son temps la plus grande école coranique d’Afrique du Nord - est l’oeuvre des Saadiens, dont on visite les tombeaux dans un calme bucolique.

Vinrent les Alaouites, dynastie au pouvoir depuis 1659. Un de leurs vizirs construisit vers 1880 son palais de la Bahia et un ministre de la défense édifia une belle demeure, devenue en 1997 le Musée de Marrakech. Dans tous les cas, l’art arabo-andalou affiche ses splendeurs de stuc ciselé, de bois sculptés et de zelliges (petits morceaux de céramique) colorés, autour de patios, de fontaines ou de bassins.

Non loin de la médina, les jardins Majorelle, où sont déposées les cendres d’Yves Saint Laurent, restent un havre de paix. Le couturier avait contribué à lancer la ruée des Français vers Marrakech. Marquerait-elle le pas ? Une quarantaine de riads sont à vendre à des prix souvent inférieurs d’un tiers à ceux de 2008. Mais le cap des 5 000 Français immatriculés au consulat de la ville vient d’être franchi.

Source : Le Monde - Martine Jacot

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