Diapos de la diaspora

1er mars 2009 - 12h23 - Maroc - Ecrit par : L.A

Pour la première fois, une étude déchiffre les 3,2 millions de MRE. Des immigrants clandestins aux commerçants expat’, l’ouvrage Marocains de l’extérieur, de la Fondation Hassan II, relate leurs conditions de vie.

L’Europe : le noyau dur

Le Vieux continent concentre actuellement 85% des Marocains résidant à l’étranger. Au cours des trente dernières années, l’effectif des Marocains qui y sont installés a plus que doublé. La France est le pays
qui accueille le plus grand nombre de nos ressortissants avec près de 1 million, dont une grande partie dispose de la double nationalité. Cette communauté – qui effectuait 41% des transferts d’argent des MRE vers le Maroc en 2005 – travaille majoritairement dans le secteur tertiaire, et non plus dans l’industrie ou l’agriculture, comme dans les années 70. L’Espagne est le deuxième pays européen à accueillir une diaspora marocaine. Avec 540.000 ressortissants, elle est la première communauté étrangère dans ce pays depuis 1991.

Plusieurs milliers de ces Marocains, originaires du nord du royaume, sont arrivés clandestinement en Espagne avant d’être régularisés dans les années 90. Cela explique que les femmes constituent seulement 35% de la communauté marocaine installée en Espagne. Même phénomène en Italie, où la diaspora marocaine s’élève à 380.000 ressortissants, dont 70% sont des hommes. La Belgique et les Pays-Bas sont les deux autres pays européens à accueillir une importante communauté marocaine. Il s’agit d’une immigration plutôt ancienne, qui a d’abord concerné les ouvriers des régions du Nord et de l’Oriental. Grâce au regroupement familial, les communautés marocaines dans ces deux pays sont aujourd’hui équilibrées, même si elles peinent encore à s’intégrer totalement dans leurs sociétés d’accueil. Aux Pays-Bas par exemple, 17% des actifs marocains sont au chômage. En Belgique, seulement 10% des jeunes immigrés obtiennent un diplôme, et 60% d’entre eux sont en retard scolaire dès l’enseignement secondaire. Qui a parlé d’eldorado européen ?

Pays arabes : au-delà du mirage

La vie n’est pas rose pour les 280.000 Marocains qui résident dans les pays arabes. Surtout pour ceux installés dans les pays pétroliers. En Libye par exemple, qui accueille 120.000 Marocains, les conditions de vie et de travail sont loin d’être faciles. Plus de 60 professions sont interdites aux étrangers et les permis de séjour doivent être renouvelés tous les deux ans dans les meilleurs des cas. Et seulement 10% des Marocains disposent d’un contrat de travail qui leur permet d’effectuer des transferts d’argent dans leur pays d’origine. Les autres travaillent au noir pour des revenus qui leur permettent à peine de survivre.

Aux Emirats arabes unis, 70% des 13.000 migrants marocains sont des femmes, dont la moitié font partie de réseaux de prostitution. Quant aux hommes, ils travaillent généralement dans la restauration et l’hôtellerie ou exercent de petits métiers indépendants (ouvriers, mécaniciens, plâtriers…). Ils n’ont aucune sécurité sociale et ne peuvent posséder en leur nom ni atelier, ni instrument de travail, ni voiture. Tout appartient légalement à leur “kafil”, citoyen du pays d’accueil qui est censé les cautionner. Même chose en Arabie Saoudite, où résident 28.000 Marocains. S’ajoutent des difficultés pour les Marocains à garder leurs postes face à l’arrivée en masse, depuis quelques années, de la main d’œuvre asiatique, moins chère et plus docile.

Amérique du Nord : Select immigration

En Amérique du Nord, le Canada est la deuxième terre d’accueil des Marocains, après les Etats-Unis, où ils sont 100.000 à résider. Mais actuellement, aucune étude n’a été faite par la Fondation Hassan II sur ces Marocains, contrairement aux résidents du Canada. Au nombre de 60.000, ces ressortissants ont plusieurs particularités. La première vague d’immigration vers ce pays s’est faite pendant les années 60-70, et concernait surtout les Marocains de confession juive. Dans les années 80, le Canada (surtout le Québec francophone) est devenu la destination privilégiée de toute une génération d’étudiants, qui ont décidé de ne pas revenir au Maroc leur diplôme en poche.

Actuellement, plus de 30% des résidents marocains au Canada ont 15 ans de scolarité et 44% sont de formation universitaire. Par ailleurs, le système de regroupement familial et le plan d’immigration mis en place par le Québec ont permis à des familles marocaines entières de s’y installer. Avec succès : 70% ont travaillé dans les 6 mois suivant leur arrivée, même si beaucoup sont confrontés au problème de la déqualification ou de la surqualification par rapport à leurs précédents emplois. Pour gagner leur vie, ils acceptent souvent des postes qui ne conviennent ni à leurs diplômes, ni à leurs aspirations. Un aspect presque inexistant dans les autres pays d’accueil de la diaspora marocaine.

Afrique : pur l’amour du commerce

Depuis le milieu du 19ème siècle, l’Afrique subsaharienne est la destination privilégiée de plusieurs familles de commerçants marocains. En particulier ceux originaires de Fès, à la recherche de nouveaux marchés. Actuellement, ils sont majoritairement installés en Côte d’Ivoire (1971 ressortissants) et au Sénégal (1900 ressortissants). Leurs activités commerciales sont généralement de taille moyenne, et tournent autour de la vente de produits d’artisanat marocain, de prêt-à-porter ou d’électroménager. Les mariages mixtes sont monnaie courante, en particulier au Sénégal.

Toute une génération de commerçants marocains qui sont partis célibataires ont fini par convoler, sur place, avec des Sénégalaises. Ils se sont alors très vite intégrés et leurs enfants ne sont pas toujours déclarés au Consulat du Maroc. Il y a quelques années, la population marocaine au Sénégal et en Côte d’Ivoire était à prédominance masculine, mais les choses commencent à changer. Dans le pays de Abdoulaye Wade par exemple, les femmes représentent, d’après les derniers chiffres, 51% de la communauté marocaine. Nombre d’entre elles sont mariées à des Sénégalais rencontrés au Maroc. La situation est différente pour les Marocaines de Côte d’Ivoire : la majorité s’adonne à la prostitution. Dans la plupart des cas, elles vivent dans des conditions très précaires, proches de l’esclavage. Il n’est généralement pas évident pour ces femmes de s’en sortir, et encore moins de revenir au Maroc.

Source : TelQuel - Meryem Saadi

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Sujets associés : Fondation Hassan II - Enquête - Immigration - MRE

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