La France place sous surveillance ses « exilés » fiscaux au Maroc

2 mai 2008 - 23h35 - France - Ecrit par : L.A

Parmi les milliers de ressortissants français installés ces dernières années à Marrakech, Essaouira ou El Jadida, beaucoup ont été conquis par la douceur du climat et le charme de ces villes. Mais beaucoup ont été également séduits par une fiscalité marocaine moins « brûlante », voire à l’idée de profiter d’un « paradis » fiscal et d’échapper ainsi aux griffes de la redoutable administration des impôts à Bercy.

Attention aux faux calculs car vous pouvez être vite rattrapés par le Fisc qui a des « radars » jusqu’au Maroc à travers la clause d’assistance dans la lutte contre l’évasion fiscale prévue dans la convention franco-marocaine. « Le simple fait de quitter la France et d’acheter par exemple un appartement ou un riad à Marrakech ne signifie pas d’office que l’on n’est plus redevable d’impôt en France », précise Rachid Seddik Seghir, expert-comptable, spécialiste des questions fiscales. « D’autres critères rentrent en jeu, ils sont définis dans l’accord de non-double imposition entre le Maroc et la France », ajoute-t-il.

Le droit fiscal français interne parle de domiciliation, expression qui ratisse moins large que celle de résidence fiscale employée dans la doctrine conventionnelle, fait remarquer Me Manuel Castro, avocat fiscaliste, associé au cabinet Castro & Associés. La résidence fiscale est bien plus contraignante en ratissant plus large. De ce fait, « le départ d’un contribuable à l’étranger n’entraîne pas de droit le transfert de son lieu d’imposition et passage sous le régime appliqué aux non-résidents », met en garde le fiscaliste français. Attention donc à ne pas jouer le mort en « omettant » de déclarer ses revenus surtout que l’accord franco-marocain (qui fonctionne très bien, disent les responsables) prévoit une clause d’assistance bilatérale de lutte contre l’évasion fiscale. « Contre ceux qui seraient tentés par le lego fiscal, le législateur a prévu des parades ».

Au regard de la doctrine marocaine, « une personne physique est réputée avoir sa domiciliation fiscale dans le Royaume si elle y justifie d’un foyer permanent d’habitation ou d’un centre d’intérêts économiques ou d’apporter une preuve d’un séjour continu ou discontinu de 183 jours dans l’année ». Pour le contribuable, il suffit de rentrer dans l’une de ces catégories pour être assujetti à l’impôt au Maroc sur tous les revenus, y compris de source étrangère.

C’est exactement la même approche qui est adoptée par le Fisc français. Et les limiers de la DGI à Bercy ont des antennes partout et des moyens pour s’assurer que parmi les milliers de Français qui s’installent au Maroc, il n’y a pas d’« exilés » fiscaux. En tous les cas, avant de partir, il faut s’assurer que vous avez signalé votre départ au service local des impôts de votre circonscription pour éviter toute mauvaise surprise. Pour le Fisc, toute omission de cette déclaration est assimilée au statu quo avec les conséquences que cela implique.

Un contribuable est considéré comme redevable d’impôt dans l’Hexagone, s’il rentre dans l’un des trois critères de détermination du domicile fiscal. Ainsi, un Français résidant à Marrakech par exemple mais qui exploite un cabinet conseil ou un bureau d’architecte à Montpellier est présumé avoir son domicile réel dans l’Hexagone et donc, y payer ses impôts malgré une carte de séjour marocaine. Et ce, quelles que soient les autres circonstances pouvant affecter sa situation, ces activités étant considérées comme son centre d’intérêts professionnels ou économiques. Pour le Fisc français, « l’activité principale correspond à celle à laquelle l’on consacre le plus de temps effectif, même si elle ne dégage pas l’essentiel des revenus ».

Cherchez votre case

Vous êtes considéré comme ayant votre domicile fiscal en France si :

• Vous avez en France votre foyer, ou votre lieu de séjour principal. C’est la fameuse règle de 183 jours dans l’année.
• Vous exercez en France une activité professionnelle salariée ou non, sauf si elle est accessoire.
• Vous avez en France le centre de vos intérêts économiques.

Attention, vous serez considéré comme domicilié en France si vous répondez à un seul de ces critères. Ces critères s’appliquent séparément à chaque conjoint ou partenaire pacsé. Ainsi, dans des circonstances qui restent exceptionnelles, un conjoint ou partenaire « pacsé », peut être résident et l’autre pas.

L’obligation fiscale d’un ménage dont l’un des époux ne répond pas à ces critères ne porte que sur :

• l’ensemble des revenus de l’époux domicilié en France ;
• les revenus de source française de l’autre époux (sous réserve des conventions internationales) Source : DGI (France)

Source : L’Economiste - Abashi Shamamba

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : France - Immigration - Impôts - Evasion fiscale

Ces articles devraient vous intéresser :

Jeux de hasard : un débat houleux au Maroc

Des députés ont exprimé leur inquiétude quant à l’imposition d’une taxe sur les jeux de hasard, craignant que cette mesure prévue dans le projet de loi de finances 2025 ne conduise à une légalisation de la pratique de ces jeux chez les mineurs, ainsi...

Traque aux fraudeurs : les influenceurs marocains dans le collimateur du fisc

La direction générale des impôts (DGI) vient d’adresser une mise en demeure aux influenceurs possédant des biens ou recevant de l’argent de l’étranger, les invitant à les déclarer et à payer l’impôt correspondant.

Du changement pour le statut d’auto-entrepreneur au Maroc

Le statut d’auto-entrepreneur au Marocfait l’objet de débats au Parlement. En cause, l’équilibre fragile entre simplification administrative et lutte contre les dérives fiscales.

Contribuables marocains : régularisez votre situation avant le 31 décembre 2024

La Direction générale des impôts (DGI) invite les contribuables concernés par la mesure relative à la régularisation volontaire de leur situation fiscale, réinstaurée par la Loi de Finances 2024 à régulariser leur situation au plus tard le 31 décembre...

Maroc : révision de l’impôt sur le revenu

Le gouvernement marocain, via son porte-parole Mustapha Baitas, a annoncé une révision de l’Impôt sur le revenu (IR) avec pour objectif d’augmenter les revenus des employés et fonctionnaires.

TVA : la fraude qui coûte très cher au Maroc

La fraude à la TVA coûte chaque année entre 1 et 1,2 milliard de dirhams à l’État, a révélé Younes Idrissi Kaitouni, le directeur général des Impôts (DGI), lors de la présentation de son plan stratégique pour la période 2024-2028.

Amnistie fiscale au Maroc : un succès inattendu pour les avoirs non déclarés

L’amnistie fiscale sur les avoirs non déclarés au titre de l’année 2024 au Maroc a dépassé toutes les attentes. Le ministre chargé des Relations avec le Parlement, Mustapha Baitas, a annoncé un montant collecté de 127 milliards de dirhams, pulvérisant...

Une vaste fraude aux factures découverte au Maroc

Suite à la détection de factures falsifiées au moyen de cachets d’auto-entrepreneurs, les services de contrôle relevant de la Direction générale des impôts (DGI) ont lancé une vaste opération de vérification.

Les autorités marocaines traquent les influenceurs

Les autorités compétentes marocaines traquent les influenceurs qui transfèrent leurs revenus en cryptomonnaie, notamment des Bitcoins, pour échapper au fisc et à l’Office des changes.

Trop d’impôts au Maroc ?

Au Maroc, alors que la pression fiscale est excessive, les citoyens et les entreprises ne perçoivent pas toujours les effets concrets des prélèvements d’impôts dans l’amélioration des services publics et des infrastructures.