Appel à un débat sérieux sur l’avortement et la sexualité au Maroc
Au Maroc, les relations sexuelles hors mariage et l’avortement sont deux pratiques interdites par la loi et la religion. Des interdits qui sont pourtant contournés, d’une...
Le professeur d’université émérite en sociologie et expert consultant en « sexualité, genre et féminisme en islam », Abdessamad Dialmy, dénonce le tabou persistant de la sexualité au Maroc et la difficulté pour les jeunes de vivre pleinement leur sexualité à cause des lois liberticides.
« La liberté sexuelle devrait être un droit fondamental. J’en suis profondément convaincu et toute ma carrière universitaire, mes cours, mes recherches et mes écrits ont eu pour objectif de lutter contre les tabous qui répriment la sexualité des jeunes Marocains. Aujourd’hui encore, ils sont contraints de se marier et de fonder une famille pour vivre leur sexualité légalement. Sinon, ils risquent de tomber sous le coup de la loi. Les articles 489, 490 et 491 du Code pénal répriment respectivement l’homosexualité, la sexualité préconjugale et l’adultère. Je demande depuis 2007 l’abrogation de ces articles liberticides », s’offusque Abdessamad Dialmy dans une réflexion publiée dans Le Monde Afrique.
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Le professeur d’université a soutenu sa thèse de doctorat d’État sur la sexualité de la jeunesse marocaine en 1980. Dans ce travail de recherche qui a fait l’objet d’une publication en arabe en 1985 aux Éditions maghrébines sous le titre « Femme et sexualité au Maroc », l’expert faisait état d’un « double interdit religieux et juridique » aux jeunes Marocains en matière de sexualité. « Au Maroc, comme ailleurs, l’âge moyen au premier mariage n’a cessé de reculer. Il est aujourd’hui de 26 ans pour les filles et de 32 ans pour les garçons. En attendant de se marier, et pour concilier désir et tabou, les jeunes pratiquent donc des rapports sans défloration », explique-t-il.
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Et de poursuivre : « Bien sûr, les jeunes Marocains des classes aisées ne connaissent pas ces limites. Ils ont brisé le tabou de la virginité et de la préservation de l’hymen. Des lesbiennes se déflorent mutuellement et refusent de conclure des mariages hétérosexuels. Des homosexuels se marient entre eux par simple lecture de la première sourate du Coran (Al-Fatiha) en présence de témoins homosexuels pour donner une légitimité islamique à leur union. Pour moi, le Maroc connaît une explosion sexuelle. Les pratiques préconjugales se généralisent depuis les années 1970 ».
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Le sociologue note par ailleurs « le développement de la prostitution et d’une homosexualité plus assumée » ainsi qu’une « hausse des violences sexuelles et sexistes, des infections sexuellement transmissibles, des grossesses non désirées, des avortements clandestins, des enfants nés hors mariage ». Abdessamad Dialmy reste toutefois optimiste. Plutôt que de militer pour une « une révolution sexuelle radicale », il appelle à « une réforme juridique, c’est-à-dire la reconnaissance des libertés sexuelles et du droit à l’IVG, une réforme éducative qui instituera l’éducation sexuelle sans tabou à l’école et une réforme culturelle pour construire une masculinité non violente à l’égard des femmes ».
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