Maroc : les crimes sexuels contre les enfants

31 décembre 2003 - 22h07 - Maroc - Ecrit par :

L’ONDE (Observatoire National des Droits de l’Enfant) mène depuis le 14 décembre une campagne nationale de sensibilisation contre l’exploitation sexuelle des enfants.

Spots audio-visuels et affiches condamnent ce comportement abject. Bien plus, le message met en cause aussi celui où celle qui ne dénonce pas tout acte de subornation d’enfants à des fins sexuelles.
Les termes en sont clairs : "L’abus sexuel sur un enfant est un crime, se taire, c’est être complice". Cette campagne qui n’est pas la première menée par l’Observatoire, présidé par SAR la Princesse Lalla Meryem, s’inscrit dans le cadre d’une stratégie nationale élaborée par cette institution dans le but, souligne-t-on auprès de cet organisme dédié à l’enfance, est de multiplier les actions de mobilisation pour créer un environnement propice au bien-être des futurs citoyens de demain et à leur protection.
Il s’agit d’une action méritoire pour faire front à la pédophilie, un phénomène qui a pris ces dernières années des proportions alarmantes de par le monde. Même si on ne dispose pas à ce sujet de statistiques précises, le nombre de cas signalés reste préoccupant.
On se souvient tous de la petite Loubna Mahjoubi, 9 ans, violée et sauvagement tuée par un détraqué sexuel à Oujda. Son corps inanimé et atrocement mutilé, fut découvert le 15 janvier 2002 dans un hôtel pouilleux de la ville.
Son bourreau, Ali Madani, a écopé de la peine capitale pour "enlèvement et séquestration de mineure, viol, meurtre avec préméditation et dissimulation de cadavre". Tous les Marocains, et particulièrement les Oujdis, ont été scandalisés par ce crime immonde.
Réagissant à ce drame, M. Mustapha Daniel, directeur exécutif de l’ONDE, avait souligné alors "l’urgence de briser le silence sur l’exploitation sexuelle des enfants".
Dans un communiqué publié en la circonstance, l’Observatoire avait vivement dénoncé ce crime, estimant que les abus sexuels dont sont victimes les enfants "constituent un grave problème qui nécessite un traitement audacieux, responsable et urgent".
Si les cas de pédophilie déclarés et jugés donnent déjà une idée assez alarmante de la proportion du phénomène (400 cas de harcèlement sexuel enregistrés en 2002, selon l’ONDE qui indique également que 50 pc des dossiers qui lui sont soumis concernent ce type de crime), il reste encore à quantifier les cas de victimes de pédophilie qui n’osent pas dénoncer leur bourreau. Ce sont, par exemple, les petites bonnes et les enfants de la rue.
Cette frange fragile et sans défense de la société est très souvent exposée à l’exploitation sexuelle. Les petites bonnes employées pour effectuer les tâches ménagères, se trouvent parfois victimes d’abus sexuels commis très souvent par les membres de la famille de l’employeur, et parfois même par l’employeur lui-même comme le cas relaté par la presse, il y a quelques mois, d’une fillette de 14 ans tombée enceinte après avoir été violée par son patron.
Craignant de perdre leur emploi, si vital pour la survie de leurs parents pauvres, ces petites bonnes à tout faire n’osent pas dénoncer leurs violeurs. Elles taisent leurs souffrances, se renferment sur elles-mêmes, et malgré elles, deviennent des esclaves sexuelles.
Autres victimes silencieuses, les enfants de la rue. Des enfants qui, faute de protection, sont livrés à eux-mêmes. Ils sont nombreux à souffrir, à subir les pires sévices sans pouvoir crier leur malheur. Dans leur errance quotidienne et interminable, certains d’entre ces marginaux, se voient victimes d’agressions sexuelles commises en toute impunité par des adultes, qui sont souvent des sans domicile fixe.
Parfois même, ils sont victimes de gens censés appartenir à la bonne société comme c’était le cas il y a deux années à Rabat d’un ressortissant français, Daniel André qui de surcroît est un éducateur, propriétaire de deux écoles privées dans la capitale.
La Cour d’appel de Rabat l’avait condamné, en octobre 2001, à une peine de 10 ans de prison assortie d’une amende de 20.000 dirhams pour "subornation et viol de mineurs âgés de moins de 16 ans et séquestration d’enfants".
La Cour suprême avait toutefois cassé ce jugement et renvoyé l’affaire devant la Cour d’appel de Rabat après le pourvoi en cassation introduit par l’accusé. Celle-ci a décidé le report au 29 janvier prochain de l’examen de cette affaire sordide qui a mis en émoi les habitants de la capitale.
Les campagnes de sensibilisation suffiront-elles à éradiquer ce comportement contre-nature ? Parviendront-elles à éveiller le sens du civisme chez la population pour oser dénoncer les bourreaux de l’innocence ? Indéniablement, l’effet de telles campagnes est incontestable.
L’ONDE enregistre d’ailleurs depuis le lancement de la campagne une forte augmentation des appels dénonçant des cas de harcèlement sexuel. Il indique aussi que les chiffres de 2003 sur le nombre de cas de ce type d’agression seront publiés après la fin de la campagne.
Mais, il s’agit surtout de multiplier les actions sur le terrain car seule une approche de proximité est à même de freiner les impulsions perverses et de bannir de tels écarts de conduite dont les ravages pour la société sont incalculables."

Menara

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Enfant - Pédophilie

Ces articles devraient vous intéresser :

Enfants de Dounia Batma : Mohamed Al Turk dénonce une exploitation sur les réseaux sociaux

Mohamed Al Turk, l’ex-mari de Dounia Batma actuellement en détention, reproche à la sœur de l’actrice marocaine, Ibtissam, de chercher à gagner la sympathie des Marocains en publiant des photos de leurs filles, Ghazal et Laila Rose, sur les réseaux...

Maroc : les femmes divorcées réclament des droits

Au Maroc, les appels à la réforme du Code de la famille (Moudawana) continuent. Une association milite pour que la tutelle légale des enfants, qui actuellement revient de droit au père, soit également accordée aux femmes en cas de divorce.

Une école musulmane fermée à Villeurbanne

La préfecture de Villeurbanne a procédé à la fermeture d’une école musulmane, accueillant d’ordinaire une centaine d’enfants en primaire. Les parents se voient contraints d’inscrire leurs enfants dans d’autres établissements.

Maroc : l’État «  adopte  » les enfants devenus orphelins après le séisme

Le Maroc va procéder au recensement de tous les enfants devenus orphelins après le séisme du 8 septembre et leur accorder le statut de « pupille de la nation ».

La justice espagnole sépare une famille marocaine : Nasser Bourita réagit

Suite à la décision de la justice espagnole de retirer la garde des enfants à une famille marocaine établie dans le nord du pays, le ministère des Affaires étrangères a tenu à commenter cette décision et fournir quelques détails.

Maroc : les femmes divorcées appellent à la levée de la tutelle du père

Avant l’établissement de tout document administratif pour leurs enfants, y compris la carte d’identité nationale, les femmes divorcées au Maroc doivent avoir l’autorisation du père. Elles appellent à la levée de cette exigence dans la réforme du Code...

Youssra Zouaghi, Maroco-néerlandaise, raconte l’inceste dans un livre

Victime d’abus sexuels et de négligence émotionnelle pendant son enfance, Youssra Zouaghi, 31 ans, raconte son histoire dans son ouvrage titré « Freed from Silence ». Une manière pour elle d’encourager d’autres victimes à briser le silence.

Nisrine Marabet, 14 ans, disparue en Belgique

Child Focus, l’organisation belge dédiée à la protection de l’enfance, a lancé un avis de recherche suite à la disparition inquiétante de Nisrine Marabet, une jeune fille de 14 ans. Nisrine a été vue pour la dernière fois le dimanche 30 avril à...

Maroc : un ancien diplomate accusé de prostitution de mineures risque gros

L’association Matkich Waldi (Touche pas à mon enfant) demande à la justice de condamner à des « peines maximales » un ancien ambassadeur marocain, poursuivi pour prostitution de mineures.

Maroc : plus de droits pour les mères divorcées ?

Au Maroc, la mère divorcée, qui obtient généralement la garde de l’enfant, n’en a pas la tutelle qui revient de droit au père. Les défenseurs des droits des femmes appellent à une réforme du Code de la famille pour corriger ce qu’ils qualifient...