Le Maroc ose ce que la France n’a pas tenté dans ses écoles, et les résultats sont là

16 mai 2025 - 15h00 - Maroc - Ecrit par : S.A

Le Maroc a mis en place un plan similaire mais plus audacieux que celui de la France pour remonter le niveau scolaire. La réforme porte déjà ses fruits.

En 2022, les très mauvais résultats obtenus lors des enquêtes internationales comme Pisa, Timss ou Pirls ont poussé le Maroc à engager une réforme basée sur la science, laquelle révolutionne l’école. Le royaume élabore alors d’un plan d’action intitulé « écoles pionnières ». Lancé à la rentrée scolaire 2023, il a la particularité de s’appuyer sur des travaux de recherche en éducation qui ont fait leurs preuves à l’international. De l’adaptation des méthodes pédagogiques des enseignants, la distribution de cours standardisés, jusqu’au travail de mise à niveau des élèves en début d’année, à l’instauration d’une culture de l’évaluation et la rénovation des écoles, le royaume multiplie les réformes.

« En un an seulement, les résultats obtenus sont impressionnants. Du jamais-vu en si peu de temps ! Il faut dire aussi que les élèves partaient de très bas », s’étonne Pascal Bressoux, professeur à l’université Grenoble-Alpes et membre du laboratoire de recherche sur les apprentissages en contexte (LaRAC), associé au projet depuis le départ. « Durant la première année, 2023-2024, le plan a concerné 626 écoles (sur les 8 000 au total que compte le pays), dites “pionnières”, toutes volontaires » rapporte L’Express. « Le fait de nous concentrer ainsi sur un premier échantillon nous permet de vérifier si les mesures fonctionnent et de les adapter éventuellement avant de les généraliser au niveau national », explique l’universitaire.

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Le gouvernement mise avant tout sur la méthode « Teaching at the right level » (« Enseigner au bon niveau », TARL), développée par l’ONG indienne Pratham. Il est question de faire passer des tests de positionnement aux élèves en début d’année, notamment en lecture et en calcul, puis les répartir dans des groupes adaptés à leurs besoins et, petit à petit, leur faire franchir des paliers. De fortes similitudes avec la réforme initiée par Gabriel Attal en France, lors de son passage au ministère de l’Éducation nationale, en 2023. « La grande différence est que ce dernier avait voulu l’étendre à la totalité des collèges sans passer par cette phase de tests », souligne Marc Gurgand, directeur de recherche au CNRS, professeur à l’École d’économie de Paris (PSE) et à l’École normale supérieure.

Le Maroc a également appliqué la méthode appelée « enseignement explicite ». Cette méthode consiste à s’assurer que les élèves ont compris une leçon avant de passer à la suivante, à les emmener progressivement vers des tâches de plus en plus complexes mais aussi vers plus d’autonomie. « L’idée était de former un minimum les enseignants au départ puis de miser sur cette pratique pour qu’ils acquièrent eux-mêmes des automatismes grâce à ces supports. Ce qui représente un gain de temps considérable », explique Pascal Bressoux.

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Autre pilier de ce plan : un contrôle régulier du niveau des élèves grâce à des « livrets de compétences ». Il s’agit d’un système de vérification aléatoire a été mis en place pour s’assurer de l’objectivité des enseignants. « Progressivement, le Maroc a instauré une véritable culture de l’évaluation. Les résultats obtenus ont eux-mêmes été validés par des laboratoires internationaux indépendants et sérieux, comme J-PAL, affilié à l’université américaine MIT et cofondé par la Prix Nobel d’économie Esther Duflo », explique Marc Gurgand.

Tous ces efforts ont été couronnés de succès : légère amélioration des résultats en primaire. Actuellement, le Maroc se bat pour améliorer sa position dans le classement de Timss d’ici 2027 voire rivaliser peut-être avec la France en 2031. Le royaume se classait à la 56ᵉ place sur 58 pays dans édition de 2023. Réalisée tous les quatre ans, l’enquête internationale Timss est dédiée aux résultats des élèves en mathématiques et en sciences.

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