En matière de protection sociale, le Maroc est à la traîne. Ce constat est inévitable lorsqu’on sort de la conférence organisée, lundi dernier, par la CNSS sur « l’avenir de la protection sociale ». Plusieurs questions ont été évoquées, notamment concernant la définition du « socle minimum » de garanties qu’un Etat doit fournir aux assurés. Même si le contenu de ce socle reste à définir par chaque pays, il n’en reste pas moins que des garanties universelles doivent y être insérées, notamment l’accès aux soins de santé, les prestations familiales, ou encore les pensions vieillesse et invalidité.
Une partie de cette rencontre a donné la part belle à l’expérience internationale, et les intervenants se sont succédé pour relater leurs propres réalisations dans le domaine de la sécurité sociale. L’expérience tunisienne constitue un exemple dans le Maghreb. Selon Khalil Balhaouane, Pdg de la Caisse nationale de sécurité et sociale de Tunisie, « la couverture sociale a connu un essor important durant les 20 dernières années. D’une couverture générale de 54% en 1987, on est passé à 90% en 2006. Le secteur public est couvert à 100%, ainsi que 88% des branches constituant le secteur privé. Notre objectif est d’arriver à 97% de couverture pour l’ensemble des secteurs pour la période 2007-2011 ».
La question sociale en Suisse a également été abordée par Claude Robert, de la Suva ou Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents. Cette dernière fonctionne selon le principe de la mutualité et assure plus de 100.000 entreprises, soit environ 1,9 million de personnes. Une des particularités du système suisse est l’assurance obligatoire contre les accidents durant les loisirs, tout au long de la journée, et dans le monde entier. Toute personne salariée ayant une occupation professionnelle d’au moins 8 heures par semaine peut en bénéficier. Par ailleurs, la Suisse a introduit un système de marché en ce qui concerne la protection sociale. A titre d’exemple, il existe depuis 1984 un marché obligatoire de l’assurance accidents, ce qui conduit la Suva à concurrencer les assureurs privés, ainsi qu’à avoir une plus grande transparence en ce qui concerne la détermination des primes, sans parler de la possibilité pour l’assuré de choisir parmi un panel d’assureurs, à des prix compétitifs.
« La formation des intervenants en matière de protection sociale apparaît comme une question primordiale », indique Daniel Marchand, directeur de l’Union régionale des caisses d’assurance maladie Paca (Province Alpes Côte d’Azur) en France.
Pour cet enseignant à l’Ecole nationale supérieure de sécurité sociale, la formation devrait être également orientée vers trois catégories d’intervenants, à savoir les techniciens, les cadres intermédiaires, ainsi que les cadres supérieurs et dirigeants. La couverture sociale du secteur agricole a également été évoquée avec insistance. Selon Abdessadeq Rachdi, représentant du ministère de l’Agriculture, le système de protection doit être adapté à l’environnement du secteur et aux spécificités de l’emploi agricole. Les associations professionnelles doivent s’impliquer davantage, et l’on doit faciliter les procédures et privilégier la proximité.
3000 médecins en attente
« Quand on pense protection sociale, on songe souvent aux plus démunis, alors que les professions libérales sont également concernées », proclame haut et fort Mohammed Bennani Naciri, de l’Union nationale des professions libérales. « Une meilleure protection sociale devrait réduire le taux d’émigration à l’étranger. Il y a plus de 3000 médecins marocains résidant à l’étranger et prêts à rentrer au pays pour peu qu’ils y trouvent une protection sociale convenable », dit-il.
Source : L’Economiste - Adam Berrada