La jeune Loubna ne cache pas sa petite colère vis-à-vis les infrastructures de loisirs et de distraction, même dans les grandes villes. Pour la plupart de nos compatriotes à l’étranger, « les coins sympas et convenables sont rares et trop chers. Les hôtels de luxe et les sites touristiques sont toujours pleins. Et il ne nous reste que les plages et les piscines ». Des déclarations déplaisantes pour les responsables touristiques marocains qui de temps à autre font des sorties médiatiques trop enthousiasmées, des réformes ici et là, des programmes nationaux de baisse des tarifs, des inaugurations de nouveaux sites à travers tout le territoire national, etc., la liste des efforts fournis est longue.
Et pourtant on grogne quelque part : « Il est anormal que je vienne chez moi pour passer des vacances sans bénéficier d’aucun avantage. Les touristes européens en ont par dizaines, crie Mohammed, le mari de Loubna. D’autres partagent le même avis : « Pour un touriste français, à titre d’exemple, qui passe deux à trois semaines de vacances dans un grand hôtel à Marrakech ou à Agadir, dans le cadre d’un voyage organisé, sa facture ne dépasse que rarement les cinq mille dirhams.
Un tout autre Marocain, MRE ou pas, dans les mêmes conditions de luxe, aura à payer cinq fois plus cher que le touriste étranger ». Un constat réel puisque la plupart des étrangers bénéficient de multiples offres des agences de voyage, ici et ailleurs, dans le cadre de la grande politique nationale encourageant le secteur. « Même pour les avantages du transport, les compagnies low cost favorisent toujours les passagers étrangers. Pour les MRE, c’est toujours plein ! », déclare un couple de Marocains résidant à Barcelone.
Deux poids, deux mesures
La réalité est parfois amère. Les responsables du secteur nient, bien évidemment, tous les propos de nos MRE. « Tous nos clients sont sur le même pied d’égalité », affirme un directeur d’hôtel à Casablanca. Et d’ajouter : « Durant la haute saison, il nous est souvent difficile de satisfaire tout le monde. Les clients sont plus nombreux que les capacités des hôtels ». Des arguments logiques d’un responsable qui ne cache pas une autre réalité. Pour lui, « tout est possible. Il se peut que pour une raison ou une autre, un employé n’accepte pas un client. Il y a des mesures de sécurité à respecter, surtout s’il est en état d’ivresse ou accompagné d’une fille de joie, etc. ».
Un gérant d’une discothèque explique la chose autrement : « l’alcool et les filles sont des problèmes très fréquents avec les jeunes MRE qui ont d’autres habitudes en Europe, bien sûr interdites au Maroc ».
Loubna et son mari ne sont pas de cette catégorie qui passe ses journées à la plage et à chaque soir « croupissent » dans les bars et les discothèques. Le jeune couple maroco-parisien réclame des hôtels à la portée de leur budget : « On ne travaille pas toute l’année pour gaspiller toutes nos économies durant nos vacances dans notre pays. Chaque année, les prix flambent ». Un point irritant, aux yeux des opérateurs du secteurs qui se disent irresponsables : « C’est aux responsables d’arranger ce problème ». Et pour justifier les différences des avantages entre MRE et touristes européens, un directeur d’une agence de voyage affirme que « Les MRE peuvent bénéficier des voyages organisés au Maroc. Des agences sont ouvertes dans presque toutes les grandes villes du monde pour assurer cette opération, à coûts réduits ».
Un attachement fort au pays
Il est à rappeler, dans ce sens, que des milliers de MRE bénéficient de ces offres. Une fois au Maroc, ils sont dans des hôtels bien classés. Le programme touristique bien garni leur permet de découvrir des coins sympas, aller en boite tous les soirs et profiter des plages privées, sans interdictions. Bref, ils sont bien servis comme en europe. La seule chose qui leur manque, c’est la famille.
Pour Loubna et Mohammed, comme il est le cas de tous les jeunes MRE, la famille ne suscite pas un grand intérêt. « Ce sont souvent les vieux qui viennent pour ça. Personnellement, deux à trois jours avec ma famille au Maroc me suffisent. D’ailleurs, nous voyageons tous ensemble. Il suffit de trouver où et à bon prix », adopte Mohammed qui demande d’« installer des espaces verts, des campings et aussi de construire des aires de loisirs dans les montagnes, loin du vacarme et de la pollution de la ville et à l’abri des petits emmerdeurs ». Le tourisme rural est désormais une obligation. Les gens ont de plus en plus tendance à passer leurs vacances dans une agréable atmosphère : la nature, le beau temps, la famille et les amis, et surtout le respect des autres.
Loubna, Mohammed, et tous les MRE avec, passent certainement de bonnes vacances. Chacun selon ses moyens et ses projets. Ils ont tous des attentes et des revendications. Mais tous sont unanimes sur leur grand amour : « J’ai un pays. Moi, je l’aime », conclut Loubna qui réclame toujours des promotions plus encourageantes.
Rida Addam - Al Bayane