L’avocate de Taha O. livre un témoignage troublant sur le meurtrier de Philippine

30 septembre 2024 - 08h00 - France - Ecrit par : P. A

Le Marocain Taha O., 22 ans, est accusé du meurtre de Philippine, l’étudiante retrouvée morte dans le bois de Boulogne. Me Laura Beauvais, avocate pénaliste au barreau de Paris, qui l’avait défendu lors de sa première affaire de viol, fait de troublantes révélations sur la vie et le profil psychologique du jeune homme.

Condamné en mars 2022 par la cour d’assises des mineurs de Pontoise à sept ans de prison pour le viol d’une étudiante de 22 ans dans le bois de Taverny (Val-d’Oise) en août 2019, Taha O. est sorti de prison le 20 juin 2024 après cinq ans de détention, puis placé en centre de rétention, en attendant son expulsion vers le Maroc. Mais il sera finalement remis en liberté le 3 septembre. Deux semaines plus tard, il est arrêté en Suisse en tant que suspect du viol et du meurtre de Philippine, une étudiante dont le corps a été retrouvé dans le bois de Boulogne (Paris).

À lire : Un Marocain arrêté pour le meurtre de Philippine

Dans une interview accordée au journal Le Parisien, Me Laura Beauvais dit ne s’être jamais doutée que Taha O. allait récidiver. « La dernière fois que j’ai vu Taha, c’était après le verdict de la cour d’assises des mineurs de Pontoise. J’avais besoin de le voir pour savoir dans quel état d’esprit il était et comment il avait accueilli le verdict. Et j’ai eu le sentiment qu’il avait l’air d’aller mieux… À l’audience, il a reconnu les faits de viol après avoir longtemps nié durant l’instruction… et j’avais le sentiment d’une véritable prise de conscience. Cela paraît difficile à entendre aujourd’hui, mais il m’a dit qu’il avait beaucoup de projets, comme passer son baccalauréat. Il rêvait de devenir comptable ».

L’avocate pénaliste a également fait de troublantes révélations sur la vie « chaotique » du jeune Marocain. « Taha a connu une enfance particulièrement chaotique. Au Maroc, il a vécu des choses extrêmement dures : il a vécu avec un copain dans un parking et il y a une histoire étrange autour de ses origines. On lui a toujours dit depuis petit que sa mère était morte dans son sommeil. Mais lorsqu’il était incarcéré à Nanterre, une femme s’est signalée comme étant sa génitrice, sans que cela ait pu être vérifié. Elle n’a jamais obtenu les autorisations de visite et n’a plus donné de nouvelles ensuite », raconte-t-elle.

À lire : Un Marocain sous OQTF accusé de tentative de meurtre à la sortie d’une gare

Elle poursuivra : « Ensuite, à l’adolescence, le père de Taha l’a emmené en Espagne en lui disant qu’il s’agissait d’un voyage. En réalité, il l’a littéralement abandonné dans la rue, dans ce pays qu’il ne connaissait pas, pour partir refaire sa vie avec une femme en Allemagne. Il pensait que Taha s’en sortirait mieux tout seul en Espagne qu’au Maroc ». Taha O. s’est ensuite retrouvé en France où il a été placé dans un foyer pour mineurs isolés à Taverny. « Les éducateurs le décrivaient comme quelqu’un de bienveillant et à l’écoute. Je sais qu’à la lumière de ce qu’il s’est passé, cela peut sembler déplacé, mais il avait une belle personnalité d’après ce qu’ils disaient », confie Me Beauvais.

L’avocate de Taha fait savoir en outre que, selon le rapport des éducateurs, le Marocain de 22 ans « avait des capacités intellectuelles élevées, en particulier en mathématiques. Il lisait beaucoup, allait régulièrement à la bibliothèque. Lors de son incarcération à la prison des mineurs de Nanterre, il a été scolarisé et faisait ses devoirs avec sérieux, avec une volonté de s’en sortir. ». Malheureusement, il a « basculé » après son transfert dans le secteur des majeurs. « Je le voyais : il allait très mal et était dans une grande solitude. Il y a plusieurs alertes émises à la justice sur le fait qu’il risquait de s’en prendre à lui-même. On craignait un suicide, pas une récidive », conclut la pénaliste.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : France - Paris - Droits et Justice - Homicide

Aller plus loin

Un Marocain sous OQTF accusé de tentative de meurtre à la sortie d’une gare

Un homme de 45 ans, vraisemblablement d’origine marocaine, a été mis en examen et placé en détention pour tentative d’assassinat sur une femme de 31 ans dans la nuit du 13 au 14...

Meurtre de Meryem à Saint-Gilles : le mari libéré après un détecteur de mensonges

L’homme suspecté d’avoir tué son épouse Meryeme dans un immeuble de la rue de Mérode à Saint-Gilles en 2022 et d’avoir maquillé sa mort en suicide est sorti de prison.

Interdite d’ordre et suspendue : Nadia El Bouroumi contre-attaque et fait appel

Nadia El Bouroumi, l’avocate pénaliste du barreau d’Avignon qui défend deux hommes sur 51 au procès des viols de Mazan, ne pourra plus faire partie de l’ordre des avocats ou du...

Mort d’Amar à Bobigny : un policier mis en examen pour meurtre

Amar, un vendeur de cigarettes à la sauvette, a été tué samedi 29 juin dans le garage d’un pavillon qu’il squattait à Bobigny (Seine-Saint-Denis). Ses proches dénoncent un crime...

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : des soupçons d’adultère conduisent à un drame

Le corps sans vie d’une jeune femme a été retrouvé au domicile de sa famille dans les environs de Berrechid. Soupçonné d’homicide, son mari en fuite a été arrêté par les éléments de la Gendarmerie royale relevant du centre territorial de Deroua.

Des Marocains célèbrent la fin des accords de pêche avec l’Europe

Sur Facebook, de nombreux internautes marocains et des spécialistes des relations maroco-européennes affichent leur satisfaction après la décision de la Cour de justice annulant les accords de pêche entre l’Union européenne (UE) et le Maroc.

Maroc : WhatsApp banni pour la Gendarmerie royale

Suite à la décision de justice annulant un procès-verbal dressé via WhatsApp, la Gendarmerie royale a invité les commandements régionaux, casernes, centres et patrouilles au respect strict des textes en vigueur et à éviter d’envoyer tout document via...

Litige en copropriété au Maroc : la justice donne raison au résident

La justice marocaine a débouté un syndic de propriétaires qui demandait d’enjoindre un résident à s’acquitter de la somme de 5 700 dirhams correspondant aux cotisations mensuelles.

Maroc : 30 députés éclaboussés par des affaires de corruption

Au total, 30 députés marocains sont poursuivis par la justice en leur qualité de président de commune pour leur implication présumée dans des affaires de corruption, de dilapidation de deniers publics, de chantage, et de falsification de documents...

L’appel des chrétiens marocains

La communauté chrétienne au Maroc a réitéré, à l’occasion de la célébration de la fête de Noël, sa demande d’abrogation de l’article 220 du Code pénal et de la dépénalisation du prosélytisme.

Affaire "Hamza Mon Bébé" : Dounia Batma présente de nouvelles preuves

La chanteuse marocaine Dounia Batma confie avoir présenté de nouveaux documents à la justice susceptibles de changer le verdict en sa faveur.

Maroc : Vague d’enquêtes sur des parlementaires pour des crimes financiers

Une vingtaine de parlementaires marocains sont dans le collimateur de la justice. Ils sont poursuivis pour faux et usage de faux, abus de pouvoir, dilapidation et détournement de fonds publics.

Un MRE expulsé après 24 ans en France

Un ressortissant marocain de 46 ans, résidant en France depuis 24 ans, a été expulsé en février dernier, suscitant l’émoi et soulevant des questions quant à l’application de la loi Darmanin sur l’immigration.

Corruption : Rachid M’barki reconnaît les faits

Après avoir juré, sous serment, en mars dernier devant la commission d’enquête parlementaire sur les ingérences étrangères, n’avoir jamais perçu de rémunération occulte en contrepartie de la diffusion d’informations erronées ou très orientées pour...