Discriminés en France, des jeunes d’origine étrangère réussisent à Londres

22 décembre 2007 - 11h05 - France - Ecrit par : L.A

Ne parvenant pas à décrocher un emploi en France, Hamid Senni et Anrmy Bourhane ont jeté l’éponge et sont venus rejoindre la communauté de plus en plus nombreuse des jeunes français d’origine étrangère partis tenter leur chance à Londres. Ils disent fuir une discrimination latente en France qui ne leur pas donné leur chance malgré de bons diplômes.

En France, "les dés sont pipés", "tout le monde discrimine, on oublie que c’est illégal", explique Hamid Senni, 32 ans, qui a grandi dans une cité HLM près de Tournon dans l’Ardèche avec ses parents venus du Maroc et sept frères et soeurs.

Diplômé d’un DESS en France et d’un MBA en Suède, il commence sa carrière sur les chapeaux de roue avec un poste de chargé de produit en Suède chez Ericsson. Mais quand il cherche en France, ses lettres de candidatures restent lettre morte, on lui propose de vendre des aspirateurs en faisant du porte-à-porte.

Le contraste est tellement grand avec les entretiens qu’il décrochera ensuite à Londres, dans les cabinets de conseil KPMG, ou Accenture, ou le programme pour candidats à "haut potentiel" chez le pétrolier britannique BP qu’il intègre, qu’il décide d’écrire un livre pour raconter son histoire.

Ce sera "De la cité à la city"

Anrmy Bourhane est lui parti en décembre dernier de Paris sans l’intention de revenir. Trilingue, titulaire d’un DESS, il avait décidé de chercher un emploi d’envergure internationale à Paris après deux ans dans une PME de Montpellier travaillant sur le marché espagnol.

"Mais c’était un rêve (...) les seuls boulots que j’ai décrochés étaient des missions temporaires dans des centres d’appel... avec un Bac+5 je me suis dit que ce n’était pas pour moi", explique le jeune Français de 29 ans d’origine comorienne. Au bout d’un an de recherches infructueuses, "je me suis rendu compte que la discrimination était une réalité".

En dix jours à Londres il décroche un premier entretien qui débouchera rapidement sur un emploi de commercial dans une société américaine. Au bout de six mois il dirige une équipe de huit personnes.

A Londres son profil international est devenu un atout. "Ici on regarde votre caractère et vos compétences", la diversité est mise en avant, explique le jeune homme. Il reconnaît que le dynamisme de l’économie britannique et un taux de chômage à quelque 5%, contre 8% en France ont aussi joué un rôle.

Fort de son expérience, Hamid Senni a monté avec un partenaire américain sa société de conseil, Vision Enabler, qui propose aux entreprises de faire de la diversité un atout.

En France, la diversité dans l’entreprise est rarement une priorité alors qu’à Londres on comprend qu’il y a un avantage compétitif à en tirer, estime le jeune entrepreneur. Il compte comme clients BP en Grande-Bretagne, L’Oréal ou La Poste en France.

Parmi les 15.000 personnes qui quittent chaque année la France pour travailler au Royaume-Uni, nombreux sont les jeunes d’origine étrangère à accepter des jobs bien plus modestes, dans la vente ou la restauration, parce qu’ils doivent améliorer leur anglais avant de prétendre à un autre emploi.

"En France si on commence au MacDo, il est difficile d’en sortir. Ici c’est moins grave", explique Laurence Parry, responsable du bureau-emploi au consulat de France de Londres. "On reçoit beaucoup de demandes, surtout de jeunes filles originaires des pays du Maghreb (...) beaucoup ont fait de longues études mais n’ont que des stages sur leur CV". Londres "est un grand melting-pot, il y a beaucoup de noms à consonance étrangères. Beaucoup de jeunes français viennent ici pour débuter leur carrière, même par un petit boulot", confirme-t-elle.

AFP - Lucie Godeau

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : France - Londres - Racisme - Emploi - Immigration

Aller plus loin

« Ma vérité : des mots et des maux », l’histoire troublante de Nezha Boubekri

Née à Casablanca, Nezha Boubekri est une passionnée des médias qui a su tracer son chemin en France sur TF1 et France 2, tout en gardant un lien profond avec le Maroc, son pays...

Ces articles devraient vous intéresser :

Islam en France : le coup de gueule de Malik Bentalha

L’humoriste Malik Bentalha a exprimé son inquiétude grandissante quant à la situation des musulmans en France.

France : les étrangers en règle désormais fichés

Un durcissement du traitement administratif des étrangers, même en règle, se dessine à Nantes. Une note interne de la police dévoile une procédure inédite qui fait grincer des dents.

Maroc : Trop de centres commerciaux ?

Au Maroc, la multiplication des malls soulève des inquiétudes. Les fermetures de plusieurs franchises enregistrées ces derniers temps amènent à s’interroger sur la viabilité de ce modèle commercial.

L’Europe renforce ses sanctions commerciales contre le Maroc

L’Union européenne (UE) affiche sa détermination à utiliser pleinement les instruments de défense commerciale pour protéger son industrie et les emplois qu’elle génère du Maroc.

La Banque mondiale analyse en détail le tourisme marocain

Le tourisme représente environ 7 % du PIB et génère plus de 500 000 emplois directs, soit environ 5 % de la population active marocaine. C’est ce qui ressort du dernier rapport de la banque mondiale sur la situation économique du Maroc.

Médecins maghrébins en France : l’exil comme solution ?

Après une percée au premier tour des législatives françaises, la perspective de voir le Rassemblement national (RN) présidé par Jordan Bardella, qui place l’immigration au cœur de la campagne électorale, remporter la majorité absolue le 7 juillet,...

En fin de compte, les fonctionnaires marocains (très) bien payés

Le gouvernement marocain a revu à la hausse les salaires des fonctionnaires et agents de l’État. Younès Sekkouri, ministre de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences, est porteur de cette bonne nouvelle.

France : le port du voile, un frein majeur à l’emploi

Une étude de l’Observatoire national des discriminations et de l’égalité dans le Supérieur (Ondes), parue cette semaine, met en évidence un obstacle majeur à l’emploi en France : le port du voile.

Une lettre particulière d’Amine et de Yasmine à Emmanuel Macron

Dans une correspondance, Amine et Yasmine, deux enfants de huit ans expriment des inquiétudes quant à l’avenir de Casino Saint-Étienne où travaillent leurs parents et demandent au président de la République française Emmanuel Macron de sauver le groupe.

Racisme envers les musulmans : de nouveaux témoignages accablent Christophe Galtier

L’ex-entraîneur de l’OGC Nice, Christophe Galtier, fait face à de graves accusations de discrimination et de harcèlement moral, avec un procès prévu dans dix jours.