L’égalité de la matraque

29 décembre 2012 - 01h27 - Maroc - Ecrit par :

Ce pays est magique. Sa magie réside dans le fait qu’il recèle nombre de phénomènes fort contradictoires, mais qui, dans l’ensemble produisent le Maroc actuel. Cette magie a encore frappé aujourd’hui : en voulant intervenir pour arrêter des agents des forces de l’ordre qui tabassaient sauvagement des diplômés chômeurs, un parlementaire du PJD s’est fait rudement tabasser et humilier à son tour.

Dévoiler son identité d’avocat, de parlementaire du PJD et de membre du bureau exécutif d’un forum défendant la dignité des citoyens ne lui a valu qu’un acharnement de la part des policiers. Cerise sur le gâteau, le député a eu droit à un déluge d’insultes et a failli être embarqué selon son témoignage.

Cet accident, fort regrettable pour tout citoyen marocain indépendamment de son appartenance, nous amène à reconsidérer pour la énième fois le comportement de la police à l’égard des Marocains durant les manifestations à caractère pacifique.

La loi en vigueur stipule en effet que les autorités chargées de disperser une manifestation pacifique devraient annoncer leur intervention clairement deux fois via mégaphone avant d’intervenir. En cas d’intervention, tout « abus de violence » devrait être évité et l’on devrait se maintenir au premier objectif : disperser la manifestation. Sur le terrain c’est une autre histoire.

Les forces de l’ordre, sous les commandements des supérieurs, ne se contentent pas seulement de disperser la manifestation, mais poursuivent les manifestants dans les ruelles les tabassent sauvagement à l’aide de leurs gourdins. Ajoutez à cela un florilège des insultes les plus inouïes. Essayez d’appeler au respect de votre dignité et vos os auraient un bonus de plus.

Revenons à notre incident. Il serait judicieux dans ce contexte de rappeler les propos de notre chef de gouvernement portant sur l’intervention des forces publiques. Ce dernier affirmait avec vivacité que « les blessures enregistrées auprès des forces de l’ordre dépassent parfois celles des manifestants » et qu’il serait préférable de matraquer les citoyens au lieu de les poursuivre légalement pour ne pas « faire souffrir leurs familles ».

J’aimerai bien écouter notre chef du gouvernement justifier comment un parlementaire de son parti a blessé les policiers avec sa carte d’identité, j’aimerai également entendre la famille de la victime remercier avec zèle Benkirane de leur avoir épargné de faire le tour des tribunaux. Ne parlons guère de ses pauvres militants, diplômés chômeurs, imams ou docteurs qui ont goûté à la matraque. Ne parlons guère du pauvre citoyen marocain devenu un sac de frappe à toutes les occasions …

Cet acte porte en lui une forte symbolique : un représentant du peuple ayant prouvé son identité se fait expressément maltraiter devant le regard des passagers au sein de la capitale du pays, à quelques mètres de l’enseigne où il est censé défendre les citoyens qu’il représente. Vous l’aurez compris, devant la matraque, tout le monde est égal. À défaut de partager les droits, on aura au moins le privilège de partager la matraque.

Il est à noter finalement que Monsieur Idrissi, le député concerné, affirmait il y a quelques semaines dans une émission qu’il y avait une nette amélioration de la situation des droits humains au Maroc. Venez, reparlez-nous de cette amélioration …

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Manifestation - Droits et Justice - Parti de la Justice et du Développement (PJD) - Abdelilah Benkirane - Police marocaine - Constitution marocaine - Abdessamad Idrissi

Ces articles devraient vous intéresser :

Le gouvernement marocain accusé de gonfler les chiffres du tourisme

Les députés de l’opposition ont chargé le gouvernement lundi au parlement, lui reprochant notamment d’avoir pris en compte 50 % des Marocains résidant à l’étranger (MRE) dans les 17,4 millions de touristes arrivés dans le royaume en 2024.

L’appel des chrétiens marocains

La communauté chrétienne au Maroc a réitéré, à l’occasion de la célébration de la fête de Noël, sa demande d’abrogation de l’article 220 du Code pénal et de la dépénalisation du prosélytisme.

Des députés marocains veulent les ... déchets européens

Des députés ont souhaité la poursuite de l’importation au Maroc de déchets depuis l’Europe. C’était jeudi, lors de la séance plénière consacrée au vote du projet de loi de finances 2025.

Maroc : 30 députés éclaboussés par des affaires de corruption

Au total, 30 députés marocains sont poursuivis par la justice en leur qualité de président de commune pour leur implication présumée dans des affaires de corruption, de dilapidation de deniers publics, de chantage, et de falsification de documents...

Abdelkader Amara claque la porte du PJD, voici pourquoi

Abdelkader Amara n’est plus membre du parti de la justice et du développement (PJD). Lundi, l’ancien ministre de l’Équipement, du Transport, de la Logistique et de l’Eau a annoncé sa démission du parti islamiste après une réflexion sur ce que...

Code de la famille : les féministes marocaines face à l’opposition de Benkirane

Le secrétaire général du Parti justice et développement (PJD), Abdelilah Benkirane, a vivement critiqué le mouvement féministe qui milite pour l’égalité des sexes dans le cadre de la réforme du Code de la famille, estimant que son combat vise à...

Tarik Tissoudali condamné

Décidément, la semaine est décidément noire pour Tarik Tissoudali. Après s’être attiré les foudres de son club, La Gantoise, pour des critiques acerbes suite à la défaite contre le Standard, l’attaquant de 30 ans a été condamné vendredi par le tribunal...

MRE : Vacances gâchées par des tracasseries administratives

C’est avec un sentiment mêlé de lassitude et de colère que les Marocains résidant à l’étranger (MRE) vont commencer à débarquer dans les ports marocains dans les prochains jours.

Le calvaire des MRE à Casablanca dénoncé par une députée

Les Marocains résidant à l’étranger (MRE) vivent un calvaire lors de la réception des corps de leurs êtres chers, à l’aéroport international Mohammed V de Casablanca. Une députée du Parti de la Justice et du Développement (PJD) interpelle le ministre...

Les confidences d’Abdelilah Benkirane sur le roi Mohammed VI

Le secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD), Abdelilah Benkirane, a récemment confié avoir demandé à plusieurs reprises au roi Mohammed VI de le démettre de ses fonctions de Chef du gouvernement.