Entrée historique de la langue berbère dans les écoles marocaines

17 septembre 2003 - 17h17 - Culture - Ecrit par :

Jugée « historique » par la presse nationale, la rentrée scolaire au Maroc, qui a débuté lundi, est marquée cette année par l’introduction de l’enseignement du tamazight (langue berbère) dans le cycle primaire.

« C’est un pas positif mais encore insuffisant pour la réhabilitation du tamazight », a déclaré mercredi à l’Associated Press Abdellah Hitous, secrétaire général de l’association berbériste Tamaynut (modernité). « En dépit de la volonté d’ouverture du roi Mohammed VI, il existe encore des poches de résistance qui veulent maintenir une vision arabiste de l’identité marocaine », a expliqué M. Hitous.
Qualifié de « révolution » par l’hebdomadaire indépendant « Tel Quel », l’enseignement scolaire effectif de la langue berbère marque une réforme importante dans un pays de 30 millions d’habitants dont entre 50 et 60% sont considérés comme berbérophones.
Après des années d’arabisation à marche forcée au lendemain de l’indépendance, le défunt roi Hassan II s’était engagé dès 1994 à faire entrer le tamazight dans les écoles. Il aura fallu attendre l’avènement de son fils Mohammed VI en 1999 et la création en 2001 de l’Institut royal pour la culture amazighe (IRCAM) pour que ce projet se concrétise.
Lancé à titre expérimental dans 317 écoles du royaume, l’enseignement du tamazight devrait être généralisé d’ici 2013, selon les projections du ministère de l’Education, qui a lancé une vaste campagne de formation de plus d’un millier d’enseignants berbérophones.
Sujet encore très sensible au Maroc, l’identité berbère, « composante essentielle de la culture marocaine », selon le roi Mohammed VI, commence a être reconnue officiellement suite aux efforts d’un puissant réseau associatif qui milite pour « la réhabilitation historique de la berbérité du Maroc et la reconnaissance du tamazight comme langue officielle ».
Témoin des enjeux symboliques de cette question identitaire, le ministère de l’Intérieur avait décidé fin 2002 de faire arracher des panneaux municipaux transcrivant en tifinagh, alphabet cunéïforme berbère, le nom des rue de la ville de Nador (550km au nord-est de Rabat). Selon la Constitution, l’arabe est la langue unique et officielle du royaume.
Habitants originels de l’Afrique du Nord, les Berbères se sont convertis à l’islam lors de l’arrivée des conquérants arabes au VIIIe. L’arabe, langue du livre sacré du Coran, s’est alors progressivement imposée comme langue dominante.
Combattues au lendemain des indépendances du Maghreb, les tensions identitaires liées à « berbérité » sont beaucoup plus vives en Algérie et notamment dans la région de Kabylie, en rebellion larvée avec le pouvoir central depuis mars 2001.
L’autre grande caractéristique de cette rentrée au Maroc, qui concerne un total de 5,9 millions d’écoliers, de collégiens et de lycéens, est la scolarisation à « près de 100% », selon le ministère de l’Education nationale, des petits Marocains âgés de six ans lors de leur entrée en primaire. Un chiffre qui devrait permettre, à moyen terme, de faire disparaître l’analphabétisme qui touche encore 48% de la population.
AP

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Amazigh - Education - Tifinagh

Ces articles devraient vous intéresser :

Une mariée marocaine refuse la tenue amazighe, le mariage se termine en divorce

Un mariage célébré au Maroc a connu un dénouement inattendu et triste. Le marié a prononcé le divorce le soir même des noces, suite au refus de sa jeune épouse de revêtir la traditionnelle tenue amazighe.

Pénurie de médecins au Maroc : Le système de santé à bout de souffle

La pénurie de médecins persiste au Maroc. Par ailleurs, la réduction de la durée de formation en médecine suscite actuellement une vive protestation de la part des étudiants.

Des conditions strictes pour enseigner dans le privé au Maroc

Le ministère de l’Éducation nationale a récemment autorisé les enseignants du public à donner des cours supplémentaires dans le privé, sous certaines conditions. Pour arrondir leurs fins de mois, ces professeurs devront obtenir une autorisation...

Maîtrise de l’anglais : le Maroc à la traîne

Alors que les Marocains délaissent de plus en plus le français pour l’anglais, le Maroc est encore à la traîne quant à la maitrise de langue de Shakespeare.

Le Maroc veut le retour des MRE

Le Maroc met les moyens pour faire revenir ses cerveaux. Une enveloppe budgétaire conséquente, et inédite, vient d’être spécifiquement allouée pour inciter les compétences marocaines expatriées à contribuer à l’effort national de recherche et...

Maroc : un manuel scolaire aux couleurs "LGBT" fait polémique

Le Parti de la justice et du développement (PJD) a demandé le retrait des manuels scolaires dont les couvertures sont aux couleurs du drapeau LGBT.

Au Maroc, les élèves fêtent la fin d’année scolaire en déchirant leurs cahiers

Au Maroc, des scènes des élèves déchirant leurs cahiers et livres pour annoncer la fin de l’année scolaire, se sont reproduites.

Maroc : Vent debout contre le français à l’école

Au Maroc, un regroupement d’enseignants, d’étudiants et d’élèves s’oppose à l’enseignement des matières scientifiques en français dans les écoles publiques, dénonçant une violation de la Constitution et des textes régissant le secteur de l’éducation.

Après le séisme, le défi éducatif du Maroc sous les tentes

Après le puissant et dévastateur tremblement de terre du 8 septembre, les enfants marocains se rendent à l’école et reçoivent les cours sous des tentes. Certains ont du mal à s’adapter, tandis que d’autres tentent d’« oublier la tragédie ».

Maroc : cette violence qui interpelle

La parlementaire Nadia Bouzendoufa, du Parti de l’Authenticité et de la Modernité, interpelle Mohamed Saad Berrada, ministre de l’Éducation nationale sur sa stratégie visant à réviser la circulaire ministérielle n° 14/867 et à adopter des mesures...