L’islam de France se démocratise…

21 juin 2008 - 10h45 - France - Ecrit par : L.A

L’élection du président du Conseil français du culte musulman aura lieu le dimanche 22 juin 2008. Mohammed Moussaoui, originaire du Maroc, est le candidat du Rassemblement des musulmans de France. S’il est élu, il succèdera au célèbre médecin Dalil Boubakeur, originaire d’Algérie et recteur de la non-moins célèbre Grande Mosquée de Paris. Faudra-t-il voir dans ces élections une victoire du Maroc sur l’Algérie ou tout simplement une expression de la réalité du paysage cultuel musulman de France ?

Mohamed Moussaoui a intitulé son programme : « Engagement pour un islam de France », la couleur est déclarée dès le titre. C’est la première fois qu’un programme aussi détaillé est rendu public, un bon point pour ce mathématicien et imam de la mosquée d’Avignon.

En 2002, alors que les négociations étaient en cours entre les différentes composantes de l’islam français afin de trouver un accord pour la composition du bureau exécutif du CFCM, le chargé du dossier au sein du ministère de l’Intérieur, des collectivités locales et des cultes, me faisait cette confidence : « Je ne m’inquiète pas pour les deux mandats à venir, c’est le 3e qui sera délicat ».

Si le premier mandat (2003-2005) était marqué par la mise en place des instances du CFCM, le second (2005-2008) était caractérisé par une paralysie des instances. Le troisième mandat (2008-2011) voit naître un nouvel acteur sur cet échiquier : le Rassemblement des musulmans de France qui semble être devenu dominant dans le paysage.

Bien que la Grande Mosquée de Paris ait une faible présence sur le terrain, elle a pu ravir la présidence du CFCM en 2003 et 2005. Les milieux politiques français répétaient inlassablement cette phrase : « Le Conseil en tant que jeune institution a besoin, à sa tête, d’une personnalité qui rassure les Français, Boubakeur est le mieux placé ». Il fallait d’une part rassurer les Français et, d’autre part, forcer la main à la Mosquée de Paris afin qu’elle participe aux processus de représentativité du culte musulman, c’était le pari de Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur et des Cultes de l’époque.

La Fédération nationale des musulmans de France qui, durant tout le processus de consultation, était désignée comme « coquille vide », a été indirectement remplacée en 2006 par une nouvelle force plus structurée et plus représentative : le Rassemblement des musulmans de France qui a obtenu 43,20% des voix lors des élections du 8 juin 2008.

Le RMF regroupe la plupart des mosquées dirigées par des Marocains ou Franco-marocains. Des alliances avec les composantes turque (12,5%) et subsaharienne (FAICA) ayant, en tant que fédération, 2 sièges au sein du Conseil d’administration du CFCM sont nécessaires pour que le RMF ait la présidence du CFCM. La gestion politique prime encore. Seules les actions menées sur des dossiers précis : mosquées, carrés musulmans, instruction religieuse, formation des imams, pèlerinage et aumônerie feront du CFCM une vraie institution représentative du culte musulman.

Les élections du CFCM du 8 juin

• Rassemblement des musulmans de France (RMF) : 43,2%
• Union des organisations islamiques de France (UOIF) : 30,2%
• Le Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF) : 12,7%
• Les musulmans de l’Ile de la Réunion : 12,5%
• Fédération nationale des musulmans de France (FNMF) : (1,4%).

Quelque 4.900 délégués représentant 1.035 mosquées de France ont participé aux élections. Le taux de participation était de 80,6%.

Le 22 juin, le bureau exécutif du CFCM, composé au maximum de 17 membres, sera à son tour élu en fonction des listes qui lui ont été soumises.

Arrangements historiques

Bien qu’ils soient avantagés par rapport aux autres, les représentants de la Grande Mosquée savaient que leur implication dans un processus démocratique allait leur faire perdre le leadership sur le paysage cultuel musulman : les 18 délégués de la Grande Mosquée perdent irrémédiablement leur influence, même si les autres mosquées, plus grandes avec plus de fidèles n’ont que 15 représentants. En outre, la Grande Mosquée de Paris bénéficie également d’un siège supplémentaire au sein du Conseil d’administration, en plus des deux sièges qui lui reviennent de droit au nom de sa fédération.

Les accords de Nainville-les-Roches, (résidence secondaire de Nicolas Sarkozy), ont abouti à la constitution d’un bureau exécutif du CFCM qui ne représentait pas la réalité du paysage islamique français mais qui avait l’avantage de faire participer la totalité des Fédérations, au premier bureau exécutif du CFCM. Ces accords ne sont pas statutaires, ils sont le résultat d’une entente. Ainsi, la présidence, bien avant les élections, a été attribuée au recteur de la Mosquée de Paris le Dr Dalil Boubakeur. Tout le monde à l’époque, y compris la Mosquée de Paris, ne remettait pas en cause la méthode, critiquée aujourd’hui, dite du « mètre carré » (1 délégué pour 100 m2), utilisée pour évaluer le degré de représentativité des lieux de culte.

Source : L’Economiste - Hakim El Ghissassi

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Sujets associés : France - Religion - Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) - Elections

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