Un mariage annulé pour cause de non-virginité en France

3 juin 2008 - 23h14 - France - Ecrit par : L.A

L’union d’Aïcha et de Nouredine, c’était une affaire de famille frappée du sceau de la tradition. Les deux époux, dont le mariage a été annulé en avril par un jugement de la chambre civile du tribunal de grande instance de Lille, ont en effet été présentés l’un à l’autre par leur entourage familial. Ironie du sort, leur rencontre a eu lieu à l’occasion d’une noce célébrée entre d’au­tres membres de leurs « clans » respectifs.

Leur union n’aurait pas été arrangée mais « projetée » et bien vue par deux familles, heureuses de se lier. Lui est un Français né au Maroc, à Fez, âgé d’une trentaine d’années. Ingénieur, il est bien intégré professionnellement, tout comme son frère, qui occupe un poste de direction dans une société. Elle, aussi d’ori­gine marocaine, est née en 1983 dans le nord de la France où elle poursuit des études d’infir­mière. Tous deux sont de confession musulmane et une petite di­zaine d’années les sépare. Avant de s’unir, Aïcha et Nouredine ont pris le temps d’apprendre à se connaître. Leur attachement a grandi sous le regard bienveillant de leurs proches pendant près de deux ans. Mais Aïcha, qui n’avait sans doute pas parlé à sa famille d’une précédente relation, n’a pas la force d’expliquer qu’elle n’est pas vierge.

L’échéance de l’union approchant, la jeune femme aurait songé à faire appel à la chirurgie pour reconstituer son hymen. Opération imparfaite ou non effectuée ? Quoi qu’il en soit, le soir même des noces, le scandale éclate. Vers quatre heures du matin, le marié annonce la nouvelle aux invités qui partageaient le dernier thé à la menthe. Accusée d’avoir humilié son époux et leurs deux familles, Aïcha aurait été reconduite chez ses parents dans la foulée. Pour Nouredine, la procédure de nullité de l’union de­venait la seule façon de laver son honneur. Une annulation qu’il de­mande non pas au nom d’un « droit à la virginité » mais du mensonge de sa future épouse.

Journée « très traumatisante »

« Quand j’ai reçu ma cliente pour la première fois, en août 2006, une vingtaine de jours après la noce, elle était dans une grande souffrance. Un de ses amis l’avait emmenée jusqu’à mon cabinet et parlait à sa place, raconte Me Mauger. La journée du mariage avait été très traumatisante et elle venait de recevoir une assignation de son mari. » À titre personnel, l’avocat se dit « très choqué » que l’on puisse parler de « qualités essentielles » dans les cas d’annulations de mariage pour dé­faut de virginité, « comme si l’on faisait référence à un vice caché dans une vente de biens ». « J’ai fait savoir à ma cliente qu’un juge ne pourrait jamais aller dans le sens d’une de­mande en nullité pour une telle motivation si ce n’était pas son ­souhait, et elle a repris confiance », explique-t-il. Mais son mari lui aurait fait savoir qu’il était prêt à aller en cassation pour obtenir gain de cause.

Effrayée de voir l’affaire se prolonger pendant des années, la jeune femme accepte alors d’entamer la procédure. « Il ne s’agit pas d’une soumission, souligne Me Mau­ger.Son acquiescement lui permettait de sortir techniquement d’une procédure. Le juge l’a compris et a entériné cet acquiescement. Ma cliente était malgré tout très contente, car cette décision lui a permis de re­trouver sa liberté. C’est un soula­gement. » C’est ainsi que l’union d’Aïcha et de Noure­dine a été « effacée ».

Source : Le Firgaro - Agnès Leclaire

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