Confrontés au chômage, les Marocains d’Espagne rentrent au pays

7 août 2008 - 19h14 - Espagne - Ecrit par : L.A

Des milliers de familles marocaines comptant sur les revenus des émigrés en Espagne vivent dans l’inquiétude d’un nouveau programme destiné à renvoyer nombre d’entre eux au Maroc. La baisse d’activité enregistrée dans le secteur de la construction en Espagne laisse de nombreux immigrants marocains sans emploi.

Sur les 650.000 Marocains vivant en Espagne, plus de dix pour cent sont désormais au chômage. Selon un rapport officiel espagnol intitulé "Immigration et marché du travail", le nombre de Marocains au chômage en Espagne est passé de 62.085 en 2006 à 82.262 en 2007.

En février de cette année, les services de renseignements espagnols avaient demandé au gouvernement de réduire le nombre de Marocains vivant dans le pays, en les encourageant à retourner dans leur pays en échange d’allocations chômage versées par l’Espagne.

Aux termes de ce nouveau programme, qui devrait entrer en vigueur en septembre, les bénéficiaires recevront l’équivalent de près de cent mille dirhams, et la promesse d’une aide à l’obtention de micro-crédits.

Pour être éligibles à ces versements, ils devront renoncer à leurs permis de résidence et de travail et promettre de ne pas revenir en Espagne pendant au moins trois ans. Au bout de trois ans, les participants pourront demander à revenir en Espagne, mais sans garantie de recevoir une réponse favorable.

"La somme octroyée ne sera pas suffisante pour créer une entreprise en Espagne", a déclaré le Ministre espagnol de l’Emploi et de l’Immigration Celestino Corbacho, "mais dans des pays comme le Maroc, elle peut être très productive."

"Il ne s’agit pas de prendre des chômeurs et de les renvoyer sans plus dans leur pays. Nous voulons préserver leurs droits et leur donner deux opportunités : celle de s’établir sur leur terre et celle de revenir en Espagne à l’avenir", a-t-il ajouté.

Le sociologue Jamal Belghiti a expliqué à Magharebia que ce processus aura plusieurs conséquences sur la société marocaine. "Une telle mesure suppose plusieurs risques qu’il faut prendre en considération", affirme M. Belghiti. "Les familles qui vivent du soutien matériel de leurs proches vont se retrouver dans une situation très difficile. En outre, ceci va même changer le concept de l’immigration aux yeux des jeunes qui cherchent à tout prix à gagner l’autre rive de la Méditerranée."

Les immigrants concernés, en particulier ceux arrivés récemment en Espagne et qui ne disposent pas d’économies, sont clairement inquiets.

Fatiha Moubarak, mère de deux jeunes hommes partis pour l’Espagne il y a trois ans, est apparue totalement démunie lorsqu’elle a expliqué à Magharebia qu’elle avait vendu la maison de famille pour garantir deux contrats de travail en Espagne pour 200.000 dirhams.

"Après leur départ, nous avons acheté une autre maison à crédit et mes deux fils se sont mariés, croyant que leur avenir était garanti. Les voilà revenus bredouilles il y a un mois. Et nous ne savons pas comment payer le crédit et vivre décemment."

L’histoire de Fatiha est semblable à celle de nombreuses autres familles. Certaines ont toutefois réussi à constituer une épargne au cours de leurs années de travail, et leur situation apparaît quelque peu moins précaire.

Driss B. est revenu au Maroc avec sa femme et ses enfants sans trop de problèmes. "Après avoir travaillé durant de longues années, je me suis retrouvé au chômage. Je prévoyais une telle situation. Ainsi, j’ai monté ici un petit projet il y a deux ans. Mais je compte y retourner si les choses s’arrangent", a-t-il expliqué à Magharebia.

Les jeunes qui ont cherché à obtenir un contrat de travail en Espagne sont nettement plus déçus.

Jamal Ramizi, diplômé en droit, envisageait d’acheter un contrat de travail en Espagne pour 90.000 dirhams, mais il a dû changer son fusil d’épaule à la lumière des derniers événements. "Mon grand-père a contracté un emprunt pour m’envoyer en Espagne, où je pensais avoir la garantie d’une stabilité professionnelle. Mais on voit que des immigrés qui ont travaillé pendant des années dans ce pays sont chassés. Il vaudrait mieux pour moi de monter un petit projet dans mon pays."

Source : Magharebia - Sarah Touahri

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Espagne - Retour - Emploi - BTP - José Luis Rodríguez Zapatero

Ces articles devraient vous intéresser :

La stratégie du Maroc pour s’imposer dans la sous-traitance aéronautique

Depuis 25 ans, le Maroc travaille à s’imposer dans la sous-traitance aéronautique mondiale. Quelle stratégie a-t-il défini pour atteindre son objectif ?

Royal Air Maroc recrute

Royal Air Maroc (RAM) a lancé via sa filiale Atlas multi services (AMS), une opération de recrutement de personnel navigant commercial au Maroc. Le dernier délai de l’appel à candidatures est fixé au 1ᵉʳ décembre prochain.

Combien de Marocains ont émigré à l’étranger cette année ?

À fin septembre dernier, plus de 26 000 Marocains ont émigré à l’étranger pour s’y installer et travailler, d’après le ministère chargé de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences.

La police marocaine recrute

La Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) a annoncé un grand concours de recrutement de plusieurs grades au sein du corps de la police. Le concours aura lieu le 16 juillet à Rabat et dans d’autres villes si nécessaire. Au total, 6 607...

Maroc Telecom augmente de 10% le salaire de ses employés

Après une série de négociations, les employés de Maroc Telecom ont réussi à obtenir de la direction, une augmentation des salaires de 10 % avec effet rétroactif. Un accord a été signé dans ce sens entre les deux parties.

Le Maroc, un chantier à ciel ouvert

Au Maroc, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) et celui des matériaux de construction devraient tirer profit de l’organisation la coupe d’Afrique des nations (CAN) 2025, la co-organisation de la coupe du monde 2030 ainsi que d’autres...

Les Marocains partiront à la retraite plus tard

Le Maroc s’est engagé dans la voie de réforme de son système de retraite visant à rétablir l’équilibre financier des régimes. Et l’une des principales dispositions du nouveau texte est le relèvement de l’âge de départ à la retraite à 65 ans. La...

Spirit Aerosystems renforce ses effectifs marocains

Après une pause en 2021, les recrutements ont repris au Maroc chez l’Américain Spirit Aerosystems, leader mondial de la fabrication des aérostructures pour l’aviation civile et militaire. Déjà de dizaines de personnes recrutées.

27 000 Marocains ont quitté le Maroc en 2022 pour travailler à l’étranger

Quelque 27 000 Marocains ont quitté le pays en 2022, selon le ministre de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences, Younes Sekkouri. Ce sont des départs réguliers via des canaux officiels.

CAN 2025 et Mondial 2030 : les critères de qualification des stades marocains

Le ministère de l’Équipement et de l’eau a donné des précisions sur les critères de qualifications et les travaux de construction des stades qui accueilleront les matchs de la coupe d’Afrique des nations 2025 et de la coupe du monde 2030.