La microfinance se penche sur les réfugiés

31 décembre 2007 - 22h45 - Economie - Ecrit par : L.A

Mini-révolution dans le monde de la microfinance marocaine. Malgré la précarité de leur statut juridique, les réfugiés porteurs de projets peuvent décrocher des fonds. « Il ne s’agit pas de prêts mais de dons. Ce n’est pas non plus de l’assistanat », note Anne Balenghein, vice-président de l’Association marocaine d’appui à la promotion de petite entreprise (AMAPPE). Elle veille, « bénévolement », avec trois autres salariés sur ce dossier.

Les bénéficiaires n’ont pas donc d’obligation de remboursement. Le financement est couplé à un suivi et une formation. Créée en 1991, l’AMPPE est depuis septembre dernier l’un des partenaires sociaux du Haut commissariat des Nations unies aux réfugiés (UNHCR). L’instance onusienne injecte les fonds et son « associé » en effectue le suivi. Auparavant, c’était l’Association départ pour l’éducation, la communication et les oeuvres sociales (ADECOS) qui s’en occupait. Elle fait toujours partie des partenaires du HCR. Elle se focalise surtout sur un service d’écoute et d’orientation…

Pour « des raisons d’expertise, l’AMPPE a repris la relève dans la microfinance pour réfugiés », précise-t-on au HCR. On parle pour l’instant de phase transitoire. Le parrainage est à son stade embryonnaire. L’année qui s’annonce sera décisive.

Depuis deux ans, 200 demandes ont été déposées par des réfugiés porteurs de projets. Un peu plus de la moitié a été traitée. « Le dépôt des candidatures est actuellement suspendu afin de gérer le passif », précise Anne Balenghein. Une trentaine d’études de faisabilité sont déjà prêtes. Et 17 autres microprojets de réfugiés ont démarré. Le montant global du budget alloué aux microprojets n’a pas été divulgué. Mais il sera « proportionnel à leur nombre ». Le financement moyen est de 5.500 DH par projet. De plus, 500 DH par personne sont accordés pour les frais.

Comme c’est le cas pour le microcrédit, les candidats sont soumis à des critères d’éligibilité. Ils doivent être majeurs et réfugiés politiques (reconnus par le HCR). Leurs microprojets doivent cibler des secteurs porteurs. « La vente de poissons salés, par exemple, n’est pas automatiquement retenue », souligne la représentante de l’AMAPPE. Parmi les propositions, il n’y a pas que la vente (produits cosmétiques, artisanat…). Les services figurent aussi : massage de rééducation, installation de parabole, télécoms… Il va de soi que les « prétendants » doivent avoir un minimum de compétence.

La notation des projets se base également sur des critères éthiques. « Les sujets fragiles, femme enceinte ou mère, ont une bonification », précise Anne Balenghein. La date du dépôt joue aussi. C’est surtout le profil des candidats qui est surprenant. On y déniche souvent des bac+4 voire plus (informaticien, économiste, psychologue…). Un profil aussi pointu que celui des crédits pour jeunes promoteurs. Une commission, composée de l’AMAPPE et du HCR, valide finalement les projets.
Mais tout n’est pas rose. Sans oublier les rafles de police, la « vision étroite du marché local des réfugiés » menace la viabilité de leurs projets.

« Le programme à lui seul ne peut résoudre leur survie économique », affirme Paulin-Kuanzanbi. Il est réfugié angolais depuis mars 2003 et cameraman de profession. Jusqu’à présent, Rabat n’a pas de procédure d’asile. Une précarité juridique qui accentue la précarité économique… des réfugiés !

Brèche

Des dons pour les réfugiés porteurs de microprojets. L’initiative est prometteuse. Car elle atténue l’amalgame fait entre réfugié politique et économique. Si cette démarche poursuit sa lancée, elle va ouvrir une brèche. Les microprojets des réfugiés « ayant fait leur preuve bénéficieront de prêts cette fois-ci », indique le HCR. L’idée fait son chemin. La fondation Zakoura fera-t-elle le pas ? Il est encore tôt pour se prononcer.

Durant ces deux dernières années, le HCR a traité 3.250 demandes d’asile. Ils sont actuellement 770 réfugiés a avoir obtenu un statut.

L’Economiste - Faiçal Faquihi

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Investissement - Emploi - Immigration

Ces articles devraient vous intéresser :

Achraf Hakimi transforme son amour du Maroc en bijou

Après l’hôtellerie, Achraf Hakimi, latéral droit marocain du PSG, qui a fraîchement décroché sa première Ligue des champions, investit dans la joaillerie, en donnant vie à un collier qui rend hommage à ses racines marocaines.

Maroc : les hammams traditionnels en péril

La députée Loubna Sghiri, membre du groupe du Progrès et du Socialisme à la Chambre des représentants, alerte sur la précarité au travail qui touche les travailleuses et travailleurs des hammams traditionnels dont le nombre de jours de travail a été...

Immobilier au Maroc : attention à la TVA

Une nouvelle circulaire a été adressée aux conservateurs de la propriété foncière au sujet du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) relative aux biens d’investissement.

Le Maroc face à une pénurie de main-d’œuvre

C’est un constat pour le moins inattendu qu’a livré le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, devant la Chambre des conseillers : malgré une dynamique économique positive et des chantiers qui essaiment à travers le pays, le Maroc peinerait à trouver de...

Investissements des MRE : l’État serre la vis et sanctionne

Suite à une multiplication des plaintes signalant des obstacles d’ordre administratif et judiciaire, le ministère de l’Intérieur a instruit les walis et les gouverneurs de plusieurs préfectures et provinces, à l’effet de résoudre des dossiers relatifs...

Le Maroc cherche à transformer les MRE en investisseurs

Le Maroc entend mettre en place une série de programmes visant à « encourager et motiver les Marocains du monde à investir dans leur pays d’origine », a récemment déclaré Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères et des Marocains résidant à...

Maroc : après un fort rebond, l’économie devrait ralentir en fin d’année

L’économie marocaine, après un troisième trimestre 2024 en fanfare, devrait connaître un léger ralentissement de sa croissance au cours des prochains mois. C’est ce qu’indique le Haut-Commissariat au Plan (HCP) dans son dernier rapport.

Auto-entrepreneur au Maroc : voici le guide fiscal 2024 (pdf)

La Direction générale des impôts (DGI) vient de publier un guide sur le régime fiscal de l’autoentrepreneur. Un document qui reprécise les conditions d’obtention de ce statut ainsi que les avantages fiscaux y afférents.

Orange Maroc : A fond dans la 5G et la fibre

Le groupe Orange ambitionne de renforcer ses investissements au Maroc où il emploie déjà quelque 3 500 personnes. Le géant français des télécoms place le royaume au cœur de sa stratégie d’expansion en Afrique et au Moyen-Orient.

Le Maroc courtise l’argent des MRE, mais ignore leurs revendications politiques

Le récent remaniement ministériel a confirmé le peu d’intérêt du gouvernement pour les revendications de la communauté marocaine établie à l’étranger. Malgré les appels à la création d’un ministère dédié, le gouvernement n’a pas jugé bon de répondre à...