La bande dessinée pour libérer la femme marocaine

1er avril 2021 - 11h40 - Culture - Ecrit par : J.D

Engagée pour la cause de la femme, la Marocaine Zainab Fasiki, à la fois artiste et activiste, multiplie ses actions pour le changement social en vue de la libération des femmes. À travers sa campagne intitulée #TaAnaMeToo (moi aussi), l’artiviste, comme elle se fait appeler, s’investit dans le coaching de jeunes talents et de professionnels de dessin pour, proclame-t-elle, « développer la présence féminine dans l’art ».

Mi-mars, son dernier atelier de formation a réuni à Casablanca, une dizaine d’étudiants et de professionnels qu’elle aide à trouver des réponses créatives aux réactions controversées générées par une campagne contre le viol, intitulée #TaAnaMeToo.

« On est là pour corriger cette culture de viol, selon laquelle la victime mérite ce qui lui est arrivé alors que le criminel est innocent », rappelle l’autodidacte de la BD, interrogé par France 24, motivant des participants affairés sur tablette ou sur papier.

A 26 ans, Fasiki, dessinatrice engagée, a illustré pour la websérie #TaAnaMeToo, le témoignage poignant d’une Marocaine de 22 ans, violée pendant des années par son frère, dans l’indifférence totale de ses parents.

Être une femme est un péché

L’autre obstacle qui se dresse sur le chemin de l’ambition de Zainab Fasiki, figure emblématique de la bande dessinée féministe au Maroc, est moins la honte d’avoir été violé que le rejet familial et la législation marocaine qui autorise des poursuites pénales contre la victime pour « sexe hors mariage ». En conséquence, les quelques victimes ayant accepté de parler dans cette série voulaient rester anonymes, contrairement au mouvement #MeToo. Pour certains, la réalisation a dû modifier leurs voix et leur récit posé sur des animations, confie Youssef Ziraoui, producteur de la série.

Au-delà de ces barrières sociétales et juridiques, Zainab Fasiki milite avec ses crayons « pour le changement de lois écrites par des hommes pour contrôler le corps de la femme », dénonce l’activiste qui avait fait abondement parler d’elle en publiant sur les réseaux sociaux, ses autoportraits nus puis par ses planches montrant « le corps féminin tel qu’il est, sans tabou ».

Droite dans ses bottes

Sur son choix de dessiner le corps féminin nu, l’artiste ne cède pas face aux critiques de certaines féministes. Elle pense qu’il s’agit plutôt d’une révolution, une résistance face à une histoire basée sur le patriarcat, insiste l’auteur de «  Hshouma  » (pudeur), l’album qui a élargi son audience dans un pays où l’éducation sexuelle reste taboue.

Pour éditer cet ouvrage atypique, elle n’a pas réussi à trouver d’éditeur au Maroc. Son ouvrage a finalement été publié à Paris en 2019 par les éditions Massot et plusieurs fois réédité, avec de « bonnes ventes » au Maroc, explique à l’AFP Florent Massot, son éditeur. « Zainab est très courageuse », elle est « toujours très positive alors qu’elle se fait tellement insulter sur les réseaux sociaux », dit-il.

L’artiviste prépare d’ailleurs une « grande exposition » au musée d’art contemporain de Tetouan (nord) à la rentrée prochaine et donnera des cours aux étudiants de l’École des Beaux-Arts.

Téméraire, elle se dit fière d’avoir contré « les artistes qui prêchent contre la nudité artistique ». Se souvenant aussi de la pression familiale dès qu’elle a commencé les publications des portraits nus sur les réseaux sociaux, Zainab Fasiki est convaincue que « ce genre de contrôle exercé sur des enfants qui ne font rien de mal à part vivre leur passion, a détruit des milliers de talents ».

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