Un enfant né d’un viol ouvre une brèche dans le droit marocain

25 avril 2025 - 18h00 - Maroc - Ecrit par : S.A

Saisie par une jeune maman qui cherche à obtenir une indemnisation pour son fils issu d’un viol, la cour de cassation marocaine a rendu une décision qui va faire date.

Le droit d’un enfant né d’un viol de bénéficier d’une indemnité de la part de son géniteur, en dehors de tout lien de filiation légale est-il désormais reconnu au Maroc ? Après avoir échoué à obtenir gain de cause au tribunal de première instance d’Al Hoceima et à la Cour d’appel, la défense d’une jeune mère – handicapée – d’un enfant né d’un viol saisit la Cour de Cassation. Celle-ci a cassé l’arrêt d’appel et ordonne le renvoi de l’affaire devant la Cour d’appel de Fès, assorti de la réalisation d’une expertise génétique, rapporte Le Matin.

À lire :Maroc : du nouveau pour enfants nés hors mariage

Dans son arrêt rendu le 15 avril 2025, la Cour de Cassation rejette le raisonnement selon lequel l’enfant n’est pas juridiquement affilié à l’auteur du viol, car le bébé est victime indirecte d’un délit civilement fautif. La Cour rappelle que le juge n’est pas lié par la qualification juridique donnée par les parties et peut redéfinir le cadre juridique d’un litige. En l’occurrence, il s’agissait non d’une action en filiation, mais d’une demande fondée sur la responsabilité délictuelle (article 77 et suivants du Dahir des obligations et contrats).

À lire :Enfants hors mariage : « la fête d’une nuit est à payer pendant 21 ans »

« La Cour insiste sur le fait que le préjudice subi par l’enfant est réel, actuel et certain. Il se manifeste dans les charges de la vie courante – alimentation, logement, santé, éducation – et s’inscrit dans la durée ». Elle estime en outre que l’enfant ne peut être tenu responsable des circonstances de sa naissance.

À lire :Maroc : souffrance et douleur pour les mères célibataires

La Cour a, à travers cette décision, rend l’indemnisation pécuniaire de l’enfant possible sur un fondement extracontractuel. Elle ne crée toutefois pas une filiation juridique de facto. Un pas est ainsi franchi vers la refonte du traitement juridique des naissances hors mariage à un moment où plusieurs associations de défense des droits humains plaident pour un élargissement des mécanismes de protection et de reconnaissance, en particulier lorsque ces enfants sont issus d’actes criminels.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Sexualité - Violences et agressions - Droits et Justice - Femme marocaine - Enfant

Aller plus loin

Maroc : souffrance et douleur pour les mères célibataires

Le confinement est une mauvaise nouvelle pour de nombreuses femmes, surtout en Afrique. Elles sont mères célibataires et vivent au jour le jour. Entre braver les interdits du...

Maroc : du nouveau pour enfants nés hors mariage

Le Ministère de l’Intérieur a accordé aux enfants nés hors mariage, le droit à une filiation paternelle, grâce à l’adoption de l’acte de reconnaissance.

Maroc : la « réalité amère » des mères célibataires

L’association Insaf poursuit son combat contre la marginalisation et la discrimination des mères célibataires, appelant le législateur à une réforme profonde de la loi.

Ces articles devraient vous intéresser :

Immobilier au Maroc : bonne nouvelle pour les nouveaux acquéreurs

Des changements ont été opérés pour impacter positivement le secteur de l’immobilier. Le délai prévu dans l’article 573 relatif à l’introduction d’une action en justice pour défaut de garantie n’est plus limité à 365 jours.

« Épouse-moi sans dot » : un hashtag qui fait polémique au Maroc

Le hashtag « Épouse-moi sans dot » qui s’est rapidement répandu sur les réseaux sociaux ces derniers jours, a suscité une avalanche de réactions au Maroc. Alors que certains internautes adhèrent à l’idée, d’autres la réprouvent fortement.

Hassan Iquioussen vs Gérald Darmanin : la justice se prononce aujourd’hui

Le tribunal administratif de Paris examine l’arrêté d’expulsion de Hassan Iquioussen, pris par le ministère de l’Intérieur, Gérald Darmanin, en juillet 2022. Cette audience déterminante permettra de statuer sur la possibilité de l’imam de revenir en...

Au Maroc, les élèves fêtent la fin d’année scolaire en déchirant leurs cahiers

Au Maroc, des scènes des élèves déchirant leurs cahiers et livres pour annoncer la fin de l’année scolaire, se sont reproduites.

Agression de Faouzy Guellil : ce que l’on sait sur l’attaque à Dugny

Faouzy Guellil, conseiller municipal de Dugny (Seine-Saint-Denis), a été victime vendredi d’une violente agression devant son domicile. L’élu dénonce une attaque « lâche » et entend saisir la justice.

Maroc : 30 députés éclaboussés par des affaires de corruption

Au total, 30 députés marocains sont poursuivis par la justice en leur qualité de président de commune pour leur implication présumée dans des affaires de corruption, de dilapidation de deniers publics, de chantage, et de falsification de documents...

Prison : le Maroc explore les « jour-amendes »

L’introduction du système de jour-amende dans le cadre des peines alternatives pourrait devenir une réalité au Maroc. Une loi devrait être bientôt votée dans ce sens.

Maroc : WhatsApp banni pour la Gendarmerie royale

Suite à la décision de justice annulant un procès-verbal dressé via WhatsApp, la Gendarmerie royale a invité les commandements régionaux, casernes, centres et patrouilles au respect strict des textes en vigueur et à éviter d’envoyer tout document via...

Le Maroc confronté à la réalité des violences sexuelles

Les femmes marocaines continuent de subir en silence des violences sexuelles. Le sujet est presque tabou au Maroc, mais la parole se libère de plus en plus.

Des Marocains célèbrent la fin des accords de pêche avec l’Europe

Sur Facebook, de nombreux internautes marocains et des spécialistes des relations maroco-européennes affichent leur satisfaction après la décision de la Cour de justice annulant les accords de pêche entre l’Union européenne (UE) et le Maroc.