Canada : le rêve brisé des infirmières marocaines

8 juillet 2025 - 15h00 - Monde - Ecrit par : Bladi.net

Un programme gouvernemental destiné à recruter des infirmières étrangères, dont des Marocaines, pour pallier les pénuries de main-d’œuvre au Québec fait face à d’importantes difficultés, entraînant la désillusion de nombreuses participantes. Un rapport du ministère de l’Immigration, produit en novembre 2024, met en avant une série de défaillances dans l’organisation de cette initiative et dans l’accompagnement des professionnelles recrutées.

Annoncé en 2022, ce projet d’un budget global de 65 millions de dollars vise à attirer 1500 infirmières d’ici 2028, principalement dans les régions. La première phase, qui a coûté environ 16 millions, soit 77 000 dollars par personne, a permis le recrutement de 207 infirmières. Celles-ci suivent une formation d’appoint financée par le gouvernement dans des cégeps et perçoivent une allocation hebdomadaire de 500 dollars. Malgré ce cadre, le projet a rapidement montré ses limites sur le terrain.

À lire : Au Canada, un Marocain se sacrifie pour sauver son ami

Le rapport, obtenu en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics, révèle que « rapidement lors du démarrage de la phase 1, des obstacles majeurs pour l’installation des participants ont été rencontrés ». Le document pointe des problèmes concrets qui ont lourdement affecté l’intégration des nouvelles arrivantes, dont certaines en provenance du Maroc. Parmi les principaux enjeux figurent la difficulté à trouver un logement, notamment pour les mères de famille, le manque de places en garderie et l’absence d’un réseau de transport en commun adéquat dans plusieurs régions, ce qui a forcé des dépenses imprévues pour l’achat d’un véhicule.

À lire : Le Canada vient chercher ses éducateurs au Maroc

Ces obstacles logistiques découlent, selon le rapport, d’un manque de préparation et d’information. Le document note que le projet n’a pas préparé les infirmières étrangères à la réalité de la vie au Québec et aux exigences du programme. Un constat amer partagé par un participant, qui a requis l’anonymat : « On était traités comme des enfants. […] La bonne information ne nous a pas été révélée ». Le rapport souligne d’ailleurs la nécessité de « présenter un portrait honnête des coûts et défis liés à la vie au Québec et dans la région de destination ».

À lire : Mauvaise nouvelle pour les Marocains au Québec

Cette critique sur le manque d’anticipation est reprise par des observateurs externes. « Je ne comprends pas pourquoi ces enjeux n’ont pas été correctement pris en compte lors de l’élaboration de ce programme », a ainsi dénoncé Fo Niemi, directeur général du Centre de recherche-action sur les relations raciales. Aux problèmes matériels s’ajoute une pression académique et psychologique intense. Le rapport mentionne que « le rythme académique soutenu et les grandes conséquences en cas d’échec ont fait vivre un grand stress aux étudiants ».

À lire : Le Canada s’interroge sur son immigration

Finalement, le document ministériel conclut que ces multiples défis ont eu des répercussions directes sur l’expérience des participantes. « Dans la majorité des régions, les participants au projet ont dû faire face à des enjeux qui ont complexifié leur intégration et qui ont pu avoir un impact négatif sur leur pleine participation à la formation d’appoint ».

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Canada - Québec - Santé - Emploi

Aller plus loin

Le Maroc face à la nouvelle stratégie de recrutement du Canada

Alors que le ministère de l’Immigration, de la francisation et de l’intégration (MIFI) du Québec a annoncé fin novembre 2024 la suspension jusqu’en 2025 des missions de...

Ces articles devraient vous intéresser :

Au Maroc, un « tsunami d’intoxications alimentaires » alarme les associations

Au Maroc, la multiplication des cas d’intoxication alimentaire suscite l’inquiétude des associations de défense des droits des consommateurs qui appellent les autorités compétentes à renforcer les contrôles dans les restaurants et établissements de...

Maroc : des amendes jusqu’à 10 000 dirhams pour les fumeurs ?

Préoccupée par la croissance du tabagisme au sein de la société, de son impact sur la santé publique et de l’économie marocaine, le groupe du Parti de la Justice et du Développement (PJD) à la Chambre des représentants, présente une proposition de loi...

Médecins maghrébins en France : l’exil comme solution ?

Après une percée au premier tour des législatives françaises, la perspective de voir le Rassemblement national (RN) présidé par Jordan Bardella, qui place l’immigration au cœur de la campagne électorale, remporter la majorité absolue le 7 juillet,...

Maroc : le lait, dangereux pour la santé ?

Le ministère de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural, des Eaux et Forêts affirme que le lait et ses dérivés commercialisés au Maroc ne présentent aucun danger pour la santé des consommateurs et que la tuberculose bovine fait...

Le Maroc à la recherche de ses cerveaux parmi les MRE

Conscient de l’importance de sa diaspora, le Maroc accentue ses efforts pour attirer les compétences marocaines résidant à l’étranger.

Casablanca : du nouveau sur les circonstances du décès de trois femmes enceintes

On en sait un peu plus sur le décès de trois femmes enceintes dans une clinique privée de Casablanca lors de leurs accouchements par césarienne le 8 janvier 2025.

Chèque de garantie : ce scandale marocain

La conseillère parlementaire du parti de l’Union Nationale du Travail au Maroc (UNTM), Loubna Alaoui, a adressé une question orale au gouvernement sur la persistance de certaines pratiques illégales dans les cliniques privées, notamment l’exigence d’un...

Achraf Hakimi a consulté un psychologue

Le latéral droit marocain du Paris Saint-Germain, Achraf Hakimi, a confié avoir bénéficié d’une assistance psychologique il y a trois ans parce qu’il passait par des moments difficiles sur le plan personnel.

Les Marocains de plus en plus obèses

Près de la moitié de la population marocaine (46 %) sera obèse d’ici 2035, selon les prévisions de la World Obesity Forum.

Lissage brésilien : alerte sanitaire en France, le Maroc également concerné

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a récemment émis une alerte concernant l’utilisation de produits de « lissage brésilien » contenant de l’acide glyoxylique, un ingrédient cosmétique...