La France accusée de voler les médecins marocains
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Après une percée au premier tour des législatives françaises, la perspective de voir le Rassemblement national (RN) présidé par Jordan Bardella, qui place l’immigration au cœur de la campagne électorale, remporter la majorité absolue le 7 juillet, inquiète les médecins d’origine maghrébine. Certains envisagent de quitter la France.
« Nous ne sommes déjà pas gâtés ici, mais si nous avons (Jordan) Bardella comme Premier ministre, ce sera sinistre. Ils jouent sur la peur de l’autre », a déclaré à Reuters Tasnime Labiedh, 33 ans. Arrivée en France en 2021 pendant la pandémie de Covdi-19 pour son stage médical, cette Tunisienne travaille désormais comme microbiologiste avec un salaire inférieur à celui de ses homologues français. Mais elle envisage de s’installer en Suisse. C’est d’ailleurs la décision prise par six des 11 médecins d’origine maghrébine interrogés par l’agence de presse. Un médecin a émigré au Canada il y a un mois.
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Le départ des médecins maghrébins ne sera pas sans conséquence pour l’accès aux soins en France. Le pays compte seulement 3,17 médecins pour 1000 habitants, et souffre d’une plus forte pénurie de médecins parmi les pays de l’OCDE après le Luxembourg. « Les gens n’ont pas de médecin généraliste, alors ils viennent ici pour un rhume, pour un certificat médical pour prendre un arrêt maladie », a expliqué Leila Elamrani, médecin urgentiste venue du Maroc en France en 2004. Celle qui accueille des patients des régions avoisinantes ajoutera : « Cela, ajouté au vieillissement de la population et au manque de ressources, crée un énorme désordre. » Hicham Benaissa, sociologue au CNRS, pointe, lui, une « immense hypocrisie ». « L’extrême droite prospère en France sur le sujet de l’immigration, en présentant les migrants comme un problème. Mais si demain les migrants arrêtaient de travailler, c’est tout notre système social et économique qui serait paralysé », a-t-il déclaré.
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Pour étayer son propos, il s’appuie sur une étude menée auprès de 350 médecins d’origine nord-africaine en France, dont les résultats seront publiés l’année prochaine. Benaissa a constaté que 75 % des médecins, y compris les personnes formées à l’étranger et celles nées en France, envisageaient d’émigrer. Des données du Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) précisent qu’en 2023, 29 238 médecins exerçant en France ont été formés hors de l’UE, soit une augmentation de 90,5 % par rapport à 2010, soit environ 7 % de l’effectif total, et que les médecins maghrébins représentent plus de la moitié d’entre eux.
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Même les assurances données par Bardella le mois dernier ne convainquent guère les médecins maghrébins. « Nos compatriotes de nationalité ou d’origine étrangère qui travaillent, paient leurs impôts, respectent la loi et aiment notre pays n’ont rien à craindre », a-t-il assuré. Selon
Widad Abdi, médecin et représentant du SNPADHUE, le syndicat principal de l’INPADHUE (Intersyndicale des Praticiens à Diplôme Hors Union Européenne), les politiques ne s’attaquent pas aux problèmes structurels. « Qu’ils soient étrangers ou non, de plus en plus de médecins partent. Le système de santé ne les incite pas à rester : les conditions de travail, les salaires, les horaires, le nombre de patients a augmenté et le nombre de médecins a diminué », se désole-t-il.
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