Aux Pays-Bas, des peines beaucoup plus lourdes pour les Marocains

4 novembre 2025 - 10h00 - Monde - Ecrit par : P. A

Une étude vient de révéler que les juges néerlandais ont prononcé des peines plus sévères à l’encontre des suspects d’origine marocaine dans l’affaire du meurtre de l’avocat amstellodamois Derk Wiersum en 2019.

L’étude menée conjointement par l’Université de Göteborg, la Vrije Universiteit Amsterdam et l’Université Erasmus de Rotterdam montre que les juges ont prononcé de lourdes peines uniquement à l’encontre des suspects d’origine marocaine après cette affaire. Par rapport à la période précédant l’assassinat de cet avocat, les peines ont été en moyenne 71 % plus lourdes pour les suspects marocains, soit trois mois de prison supplémentaires. En revanche, les suspects néerlandais ou turco-néerlandais, n’ont connu aucun durcissement de peines avant et après le meurtre de l’avocat. Au total, 384 suspects d’origine marocaine ont été concernés par ces peines plus sévères.

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Les auteurs de l’étude, qui sera prochainement publiée dans la revue scientifique American Economic Review, expliquent ce phénomène par un « effet de saillance ». Autrement dit, les juges accordent inconsciemment plus d’attention à certaines caractéristiques des suspects quand celles-ci sont très présentes dans le débat public. Après la mort de Wiersum, plusieurs médias néerlandais avaient soupçonné Ridouan Taghi, le leader de la Mocro Maffia, la mafia marocaine active aux Pays-Bas et en Belgique. La victime était l’avocat d’un témoin clé ayant fait des déclarations compromettantes sur Taghi. Quand l’attention médiatique sur les criminels marocains est retombée quelques semaines plus tard, les peines sont revenues à leur niveau normal avant le meurtre.

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L’étude révèle aussi que le sexe du juge n’a joué aucun rôle dans la sévérité des peines. Toutefois, les juges les moins expérimentés dans les affaires impliquant des suspects marocains ont prononcé les peines les plus lourdes. Le professeur Olivier Marie de l’Université Erasmus, l’un des chercheurs, précise que ces peines restent dans le cadre légal. « Mais à la suite d’un grand choc social, il ne serait pas inutile qu’un collègue juge réfléchisse au verdict avec celui qui le rend. Ou qu’un programme informatique compare la peine à des jugements précédents. Le juge pourrait alors se demander s’il est certain de vouloir infliger une peine exceptionnellement lourde. »

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Dans l’affaire du meurtre de Derk Wiersum, deux hommes ont été condamnés à trente ans de prison en 2021, une peine confirmée en appel en 2023. Les deux condamnés ne sont pas d’origine marocaine. Par ailleurs, les chercheurs soulignent qu’au cours des cinq dernières années, le gouvernement néerlandais a versé au moins 41 millions d’euros à d’anciens suspects injustement placés en détention provisoire, ajoutant que ce problème est aggravé par le nombre croissant de personnes en détention provisoire.

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