« Comment sortir du monde ? » C’est le titre du tout premier roman du Franco-marocain Marouane Bakhti, paru aux Nouvelles Éditions du réveil en mars 2023. Il y raconte la vie, telle qu’elle vient, dans une famille biculturelle. Un récit éblouissant.
Les apports des Marocains résidents à l’étranger sont multiples. Une composante de ces apports, relative aux transferts de fonds vers le pays d’origine, a retenu jusqu’ici, plus que toute autre composante, l’attention et l’intérêt des organismes officiels et du système bancaire et ce, en raison du poids qu’elle représente et des incidences qu’elle induit sur les équilibres économiques et financiers du Royaume.
Marocains de l’extérieur et développement, pour une nouvelle dynamique de l’investissement, un sujet d’actualité qui a fait également objet d’un ouvrage publié par la Fondation Hassan II. Lequel ouvrage se veut être en premier lieu un outil au service de la communauté marocaine de l’extérieur, en même temps qu’une grille d’analyse et un tableau de bord pour les acteurs institutionnels tant publics que privés. Et comme tout tableau de bord, son objectif est de permettre d’avoir des repères pour mieux orienter l’action, parce qu’en définitive l’action est la finalité ultime d’un travail de réflexion.
L’on pourrait considérer que cette étude n’est que le début d’une démarche pragmatique car il n’existe pas, à l’heure actuelle, de statistiques exhaustives concernant l’importance de la communauté marocaine émigrée à l’étranger. Une telle défaillance au niveau du système d’information sur cette question est incompréhensible eu égard au poids de cette composante dans la structure de la population du Maroc et à sa contribution au processus économique qui s’était pourtant présentée, à l’occasion du recensement général de la population réalisé au cours du mois de septembre 2004.
Aussi, les données disponibles sur les MRE ne couvrent-elles qu’une fraction de cette population.
Cette population est estimée à près de 2,2 millions de personnes en 2001 (source ministère des Affaires étrangères).
En ce qui concerne les investissements au Maroc, outre les transferts de fonds importants et un dépôt dépassant les 35 milliards de DH l’on ne retient aucun chiffre officiel récent qui nous permettrait d’évaluer le taux de réussite des projets réalisés par les MRE. Par recoupement, il est à signaler que l’immobilier demeure l’investissement le plus privilégié avec un taux dépassant les 80%, l’agriculture occupant la deuxième position suivie du commerce, de l’industrie et du tourisme.
Il faut reconnaître que malgré l’arsenal mis en place par l’Etat, en l’occurrence la simplification des procédures administratives, la modernisation du système fiscal, la création des CRI, la réforme de la justice, l’amélioration de la justice..... et surtout la confiance des MRE dans les institutions nationales, les MRE génèrent des fonds importants (3 milliards de dollars en 2004), sans pour autant que les dépôts bancaires n’intègrent les circuits d’investissement.
D’après l’Institut national des statistiques et d’économie appliquée (INSEA), l’on constate que la communauté marocaine résidant à l’étranger est généralement orientée vers des investissements productifs. Quant aux statistiques de l’Office des changes, elles n’intègrent toujours pas la ventilation des transferts de MRE en dépôts et en investissements.
Un autre constat est non des moindres : la réalisation du projet n’est pas obligatoirement liée au retour définitif de l’investisseur au pays d’origine. Et il s’avère que ce sont les petits projets, dont le montant d’investissement se situe à moins de 500.000 DH qui prédominent en nombre, puisqu’ils représentent près de 40% du total. A l’opposé, les grands projets qui dépassent les cinq millions de dirhams ne représentent guère plus de 14%. Ces différenciations importantes apparaissent également au niveau intersectoriel et intra sectoriel. Ces dernières sont néanmoins révélatrices, d’une certaine manière, de l’étendue de l’assise financière dont disposent les différentes catégories de MRE, y compris en termes de garanties potentielles pour l’obtention d’un crédit auprès d’un organisme bancaire.
D’ailleurs, le recours au crédit bancaire est particulièrement faible. Et il fut même un temps où les MRE voulaient créer leur propre banque (Al Maghribia) avec des succursales. Car la lourdeur administrative et le nombre de pièces nécessaires à la constitution d’un dossier recevable de demande de crédit ressortent de façon très prononcée parmi les griefs émanant des MRE.
Les problèmes les plus largement évoqués portent aussi sur les garanties exigées et le niveau élevé des taux d’intérêt. D’autres difficultés sont largement évoquées par la majorité des investisseurs et concernent les relations à l’administration à laquelle il est reproché la lourdeur des procédures, le blocage des dossiers, l’absence de coopération, le clientélisme et la corruption. Ceci étant, l’évaluation faite par les MRE concernant les investissements est partagée entre ceux qui les considèrent comme étant une réussite (plus de 50%), et ceux qui sont d’un avis opposé ou ont un avis mitigé.
Dans tous les cas de figure, les perspectives d’avenir ne sont pas généralement perçues de manière défavorable. Mais tout ceci dénote de l’importance des efforts à déployer encore à tous les niveaux, en vue de promouvoir de façon conséquente les investissements de cette partie de la communauté marocaine résidant à l’étranger.
Car aujourd’hui, la troisième génération des MRE est dans une phase d’observation.
Latifa Cherkaoui - Le Matin
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