Une armée de saisonniers étrangers en Provence

24 juillet 2002 - 11h49 - France - Ecrit par :

On les appelle "les OMI". Chaque année, 5.000 étrangers signent un contrat de l’Office des migrations internationales (OMI) pour venir travailler jusqu’à huit mois d’affilée dans les vergers et les serres des Bouches-du-Rhône, dans des conditions dénoncées par un collectif.

"Les agriculteurs ont besoin d’immigrés", titrait La Provence, le 21 avril. Quatre cents arboriculteurs et maraîchers venaient d’incendier du plastique devant la direction départementale du travail pour réclamer "des OMI !". Car le travail en plein soleil ou sous des serres brûlantes, payé au salaire minimum, "n’intéresse guère les chômeurs français ou les RMIstes", constate Claude Rossignol, le président de la FDSEA. "Les gens d’Afrique du Nord sont plus habitués aux chaleurs", plaide la FDSEA, évoquant "la concurrence très rude avec l’Espagne, où les charges sociales sont moins lourdes et où il y a énormément de main-d’oeuvre immigrée".

En 2001, les Bouches-du-Rhône ont accueilli les trois-quarts des 7.000 contrats OMI signés avec le Maroc mais aussi la Tunisie et, plus rarement, la Pologne.

S’ils sont obligatoirement payés au SMIC, fiches de salaires à l’appui, ces "salariés dociles sont, en réalité, souvent corvéables à merci", dénonce le collectif formé par la CGT, la CFDT, la Confédération paysanne, la Ligue des droits de l’Homme, le MRAP et le Forum civique européen (qui publie à Limans une enquête intitulée "Le goût amer de nos fruits et légumes").

"Un étranger exploité ne va pas aller revendiquer sur la place publique", fait valoir le directeur de l’espace accueil aux étrangers à Marseille, Louis Bretton. "Il veut rester dans le circuit. Les 5.400 euros qu’il gagne en six mois représentent environ deux ans de salaire dans son pays".

"Tu travailles toujours vite et dur, parce que tu sais que sinon, l’année d’après, le patron ne refait pas le contrat", résume un des saisonniers rencontrés par l’AFP, et logés dans un taudis entre Saint-Martin-de-Crau et Miramas. Ainsi son employeur fait-il payer au saisonnier la redevance de 380 euros qu’il doit à l’OMI pour chaque contrat.

"Les heures supplémentaires ne sont pas payées ou alors au tarif normal. Comme t’as signé, tu dis rien et, de toute façon, beaucoup ne savent pas lire leur fiche de paie", rapporte un autre, qui a travaillé à Eyguières, Cavaillon, Orgon, Salon. "Sur 95% des contrats, le salarié est payé au coefficient le plus bas, même quand il taille les arbres depuis vingt ans", relève Elie Kilgus, de la CGT à Châteaurenard. Si la législation stipule que l’employeur doit loger les travailleurs dans des habitations propres et en bon état, "beaucoup sont très mal logés, en caravane ou dans des dépendances souvent délabrées", constate-t-il.

A la FDSEA, M. Rossignol rejette "ces attaques complètement fausses". "J’ai vu bien souvent qu’ils étaient mieux logés que l’agriculteur. Les dérives se comptent sur les doigts d’une main". "Il faut montrer qu’on n’est pas des négriers", dit aussi Patrice Renaud (FDSEA), producteur de pommes sur 80 ha à Eygalières, en faisant visiter les logements bien aménagés qu’il réserve à ses 22 saisonniers marocains.

Les inspecteurs du travail - trois agents pour 5.800 exploitations du département - se taisent, tenus au devoir de réserve. La préfecture se refuse à aborder ce dossier, dont "il n’y a rien de nouveau à dire".

Source : AFP

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : France - Agriculture - Emploi - Anapec

Ces articles devraient vous intéresser :

Alerte au miel « aphrodisiaque » en vente au Maroc

Du « miel aphrodisiaque » ou du « miel de virilité » inonde le marché marocain et inquiète le Syndicat des professionnels de l’apiculture au Maroc.

Du nouveau pour la culture de pastèque au Maroc

Le gouverneur de la province de Zagora, au Maroc, a récemment pris une décision pour réglementer la culture de la pastèque rouge et jaune, afin de préserver les ressources en eau. Cette mesure, qui restreint les surfaces cultivables et interdit la...

L’avocat marocain séduit l’Europe

La sécheresse et la saturation des marchés européens sont loin de produire un impact négatif sur les exportations marocaines d’avocat. Celles-ci ont, pour la première fois, enregistré un record historique.

Le Maroc s’oppose catégoriquement à la décision de la Cour de justice européenne

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu vendredi une décision concernant les accords agricoles et de pêche entre l’UE et le Maroc. Rabat conteste fermement cette décision, la jugeant non applicable et entachée d’erreurs.

La Banque mondiale analyse en détail le tourisme marocain

Le tourisme représente environ 7 % du PIB et génère plus de 500 000 emplois directs, soit environ 5 % de la population active marocaine. C’est ce qui ressort du dernier rapport de la banque mondiale sur la situation économique du Maroc.

Médecins maghrébins en France : l’exil comme solution ?

Après une percée au premier tour des législatives françaises, la perspective de voir le Rassemblement national (RN) présidé par Jordan Bardella, qui place l’immigration au cœur de la campagne électorale, remporter la majorité absolue le 7 juillet,...

Maroc : les agriculteurs rattrapés par l’impôt

Au Maroc, les petits agriculteurs exploitants agricoles exonérés d’impôts réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 5 millions de dirhams, doivent désormais remplir une déclaration de revenus, a récemment rappelé la Direction générale des impôts (DGI).

Auto-entrepreneur au Maroc : voici le guide fiscal 2024 (pdf)

La Direction générale des impôts (DGI) vient de publier un guide sur le régime fiscal de l’autoentrepreneur. Un document qui reprécise les conditions d’obtention de ce statut ainsi que les avantages fiscaux y afférents.

Maroc : Une baisse record des exportations d’oranges

Les exportations marocaines d’oranges ont considérablement chuté au cours des huit premiers mois de 2023, s’établissant à 30 000 tonnes contre 109 000 tonnes en 2022.

Pastèques marocaines : une dégringolade des exportations vers l’Europe

Les exportations marocaines de pastèque ont enregistré une baisse inquiétante au premier semestre de l’année 2024 en raison de la faible demande des pays européens. Une situation qui affecte les exportateurs, déjà confrontés à la réduction de la...