Les avis divergent. Alors que certains y voient un comportement normal dans les systèmes de santé avancés, d’autres considèrent cette scène comme une preuve de laxisme et de négligence. En réalité, jouer de la musique dans les blocs opératoires est une pratique courante dans les plus grands hôpitaux du monde, affirme Mohamed N., chirurgien ayant exercé dans plusieurs pays. Selon lui, la musique sert à créer les conditions favorables à la concentration et à la détente du chirurgien et de son équipe lors des opérations longues et complexes. Des études médicales publiées dans des revues scientifiques réputées ont confirmé que la musique douce améliore la performance de l’équipe chirurgicale, réduit les erreurs et renforce la qualité de la communication entre les membres, à condition qu’elle soit choisie avec soin et ne gêne pas le travail ni l’attention, renseigne le chirurgien.
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Et d’ajouter : « Le monde a connu des cas célèbres où la musique n’était pas simplement un fond sonore, mais faisait partie intégrante de l’intervention chirurgicale elle-même. Par exemple, un patient au Brésil a joué de la guitare pendant l’extraction d’une tumeur de son cerveau, une scène qui n’avait rien de théâtral, mais constituait une procédure médicale précise permettant aux médecins de surveiller l’intégrité des fonctions nerveuses liées au mouvement des doigts. En Inde, une patiente a chanté pendant une opération délicate au niveau du cou, dans le but de surveiller les cordes vocales en temps réel. Aux États-Unis, plusieurs vidéos ont circulé montrant des médecins dansant dans les salles d’opération, mais cela se faisait après la fin des interventions ou dans des contextes professionnels particuliers, souvent avec autorisation, consentement et encadrement rigoureux du tournage. »
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Pour Mohamed N., la musique n’est pas le problème, mais le contexte de son utilisation dans un cadre professionnel. « Dans la vidéo qui a suscité la controverse, la musique n’était pas un simple fond sonore, mais s’est transformée en élément central de la scène, où l’équipe médicale semblait plus préoccupée par la danse que par autre chose. Cela affaiblit la confiance et suscite des interrogations quant à savoir si la priorité de ces personnes est la santé du patient ou le plaisir de l’instant. Voilà la différence fondamentale entre ce qui est acceptable à l’échelle internationale et ce qui peut être considéré comme contraire à la déontologie. Dans les pays qui autorisent la musique dans les blocs opératoires, cela se fait selon des règles strictes, dans des limites qui respectent le patient et la dignité de la profession. »
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Il poursuivra : « En tant que médecin, je ne vois aucun mal à ce qu’une équipe chirurgicale travaille au rythme d’une musique choisie, si cela l’aide à se concentrer et à réduire la pression psychologique. Mais lorsque la salle d’opération devient un lieu de performance, filmé et diffusé sans conscience des conséquences, cela appelle des comptes et ne peut s’expliquer que par de la négligence. Il ne faut pas non plus généraliser : tous ceux qui travaillent en musique ne sont pas négligents, tout comme ceux qui restent silencieux ne sont pas forcément professionnels. » Le chirurgien estime qu’il ne faut pas « fustiger ou diaboliser les médecins, mais ouvrir un débat professionnel sérieux pour définir clairement ce qui est permis dans une salle d’opération… La musique n’est pas l’ennemie du professionnalisme, elle peut même, dans certains contextes, en être l’alliée, à condition d’être gérée avec raison et responsabilité. »