Marocains et Algériens victimes d’exploitation en France

7 avril 2025 - 18h00 - France - Ecrit par : S.A

En France, une dizaine de travailleurs sans-papiers majoritairement venus du Maroc et d’Algérie réclament justice aux géants du secteur des déchets et à un sous-traitant qui les a exploités pendant plusieurs années, de 2019 à 2022, en pleine pandémie de Covid-19.

« J’ai travaillé chez NTI pendant trois ans, sans contrat. J’ai trié les déchets sur le tapis alors que j’étais enceinte. J’ai dû travailler la nuit jusqu’à l’accouchement. Aujourd’hui, ma fille à trois ans et demi », raconte à RFI Hind, venue avec sa petite fille, au Conseil des prud’hommes de Paris, tribunal chargé de régler les litiges en lien avec le droit du travail en France. D’autres individus ayant travaillé pour le compte de NTI, une entreprise sous-traitante spécialisée dans le tri des déchets, étaient également sur place. Cette entreprise placée en redressement judiciaire il y a bientôt deux ans les avait engagés pour qu’ils travaillent pour les géants du secteur des déchets, Veolia, Suez ou encore Paprec.

« J’ai travaillé cinq ans au noir, dans l’incinération, dans les fours. Parfois, je travaillais la journée, la nuit. On travaillait sans formation, on faisait des heures supplémentaires sans être payés. On n’a pas eu droit au chômage, on ne pouvait pas refuser un travail. Parfois, ils nous appelaient la nuit pour commencer le matin. Et si tu refusais, tu n’avais pas de travail le mois d’après », confie un autre employé.

À lire : Des travailleurs marocains exploités dans la région de Bordeaux

L’avocate de ces anciens employés Katia Piantino accuse les géants du secteur du déchet d’avoir volontairement fermé les yeux : « Le Code du travail demande aux donneurs d’ordres de vérifier que son sous-traitant ne commet pas de travail illégal. Cela veut dire qu’il n’emploie pas de travailleurs étrangers sans titre et ne commet pas de travail dissimulé. On leur demande de ne pas ignorer, parce que, ce qui ressort du dossier, c’est qu’ils ont profité d’une main-d’œuvre hyper bon marché du sous-traitant NTI, qui a raflé tous les contrats de sous-traitance dans le secteur. Pourquoi ? Parce que la main-d’œuvre était vachement moins chère… Bizarrement, puisqu’elle n’était pas déclarée. »

Ali Chaligny, représentant syndical CGT chez Veolia qui accompagne ces anciens employés, dénonce lui aussi un véritable système : « Ce sont des métiers en tension où les entreprises ont du mal à recruter, et du coup, il y a une délocalisation de la masse ouvrière des salariés. Étant donné que l’on ne peut pas délocaliser nos activités de collecte et traitement des déchets ménagers, pour pallier ce manque de main-d’œuvre, on délocalise les salariés en France pour assurer ces services essentiels à la nation. »

À lire : Dans le Tarn-et-Garonne, des Marocains exploités

Ces employés vont devoir encore patienter, l’audience étant finalement reportée au 26 septembre 2025.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : France - Algérie - Emploi - Droits et Justice

Aller plus loin

Des travailleurs marocains exploités dans la région de Bordeaux

Le procès de deux Français et quatre Marocains poursuivis pour traite d’êtres humains s’est ouvert mardi devant le tribunal correctionnel de Bordeaux. Les six prévenus sont...

Karim Zéribi appelle à l’unité des Marocains et Algériens de France

L’homme politique franco-algérien Karim Zéribi, dénonce les tentatives de division de la diaspora maghrébine en France, menées par les partis de droite. L’ancien député européen...

Dans le Tarn-et-Garonne, des Marocains exploités

Le tribunal judiciaire de Montauban va examiner les 20 et 21 janvier l’affaire d’un réseau qui exploitait des migrants sans papiers dont des Marocains dans des fermes agricoles...

Un Marocain témoigne : « j’étais comme un esclave »

Arrivé à Bordeaux pour y gagner mieux sa vie, un jeune Marocain de 20 ans et d’autres travailleurs étrangers, ont été victimes de traite d’êtres humains dans une plantation de...

Ces articles devraient vous intéresser :

Annulation des accords UE-Maroc : le Polisario jubile

Le Front Polisario a salué la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) annulant les accords de pêche entre l’UE et le Maroc, la considérant comme un « triomphe de la résistance ».

Maroc : Vague d’enquêtes sur des parlementaires pour des crimes financiers

Une vingtaine de parlementaires marocains sont dans le collimateur de la justice. Ils sont poursuivis pour faux et usage de faux, abus de pouvoir, dilapidation et détournement de fonds publics.

Blanchiment d’argent : la justice marocaine frappe fort

Le Maroc a réalisé des avancées significatives dans sa lutte contre le blanchiment d’argent. C’est ce qui ressort du septième rapport annuel de la présidence du ministère public, publié le 6 mars 2024. Ce document officiel montre une évolution positive...

Un entrepreneur fait condamner la ville de Tanger

Le tribunal administratif de la ville de Tanger a donné raison à une société chargée de travaux routiers, qui a poursuivi le Conseil préfectoral de Tanger-Assilah présidé par le dirigeant du Parti authenticité et modernité, Mohamed El Hamidi en...

L’Europe délivre un nombre record de permis de travail aux Marocains

Eurostat, institution relevant de la Commission européenne chargée de produire et diffuser des statistiques communautaires, a dévoilé le nombre de Marocains ayant obtenu les permis de travail temporaire en 2023.

Tourisme : le Maroc affiche ses ambitions

Lentement mais sûrement, le Maroc fait un grand pas vers la concrétisation de son ambition d’accueillir 26 millions de visiteurs d’ici 2030, avec un objectif intermédiaire de 17,5 millions de touristes et la création de 200 000 emplois d’ici 2026.

Le Maroc face à une pénurie de main-d’œuvre

C’est un constat pour le moins inattendu qu’a livré le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, devant la Chambre des conseillers : malgré une dynamique économique positive et des chantiers qui essaiment à travers le pays, le Maroc peinerait à trouver de...

Poupette Kenza : compte Instagram désactivé après des propos « antisémites »

L’influenceuse aux plus d’un million d’abonnés sur Instagram, Poupette Kenza, se retrouve au cœur d’une vive controverse après avoir tenu des propos jugés antisémites. Dans une story publiée le 15 mai 2024, elle affirmait sans équivoque son soutien à...

Mohamed Ihattaren rattrapé par la justice

Selon un média néerlandais, Mohamed Ihattaren aurait des démêlés avec la justice. Le joueur d’origine marocaine serait poursuivi pour agression et tentative d’incitation à la menace.

Corruption : des élus locaux pris la main dans le sac

Abdelouafi Laftit, ministre de l’Intérieur, tente d’en finir avec la corruption et la dilapidation de deniers publics. Dans son viseur, une trentaine de présidents de commune et de grand élus dont il a transféré les dossiers devant l’agent judiciaire...