Les femmes-mulets vivent dans l’extrême pauvreté

31 janvier 2022 - 16h40 - Monde - Ecrit par : P. A

Depuis octobre 2019 que le Maroc a mis fin à la contrebande à Ceuta, les femmes-mulets sont au chômage. Leur situation précaire est devenue plus critique avec la fermeture des frontières en mars 2020.

Estimées actuellement à 1 500, alors qu’elles étaient 7 000 en 2016, ces femmes-mulets, des veuves ou divorcées pour la plupart, ou avec un mari en prison ou malade, gagnaient 25 euros pour transporter des colis qui pèsent lourd sur le dos. Ces femmes vivent dans la précarité et l’extrême pauvreté et sont stigmatisées, confie à ABC, Cristina Fuentes Lara, professeur de sciences de la communication et de sociologie à l’Université Rey Juan Carlos, qui a passé quatre ans avec elles à Tétouan dans le cadre d’une étude réalisée avant la pandémie.

À lire : Ceuta : de milliers de « femmes-mulets » au chômage

« Quand je vais à la frontière, je sens l’odeur de la mort », lui avait avoué l’une d’elles. « Ils saisissent ma marchandise, ils me bousculent, ils m’insultent », avait déclaré une autre. La chercheuse est retournée à Tétouan en novembre dernier, profitant d’une levée des restrictions sanitaires. Son constat est amer. Ces femmes sont abandonnées et vivent « dans une situation d’extrême pauvreté ». Certaines ont perdu leur logement, d’autres sont confinées avec leurs enfants. D’autres ont dû retourner dans leurs villages.

À lire : Maroc : un rapport désastreux sur le calvaire des "femmes-mulets" à Sebta

Pourtant, ces femmes nourrissent leurs familles au Maroc avec ce travail et contribuent au développement de Ceuta en payant la taxe sur les marchandises qu’elles transportaient. Selon l’étude réalisée, elles sont considérées au Maroc comme pires que les prostituées. « Elles dorment presque toutes les nuits à la belle étoile, attendant l’ouverture de la frontière, et utilisant leur corps pour gagner de l’argent. Elles mentent lorsqu’elles affirment qu’elles travaillaient comme femmes de ménage à Ceuta », a soutenu un anonyme, ajoutant qu’elles sont la honte de leurs familles.

À lire : Vivement une meilleure alternative pour les « femmes-mulets » !

À Ceuta, leur absence n’a même pas été remarquée. « Contrairement aux travailleuses domestiques, les femmes-mulets n’ont jamais compté », a déclaré Fuentes Lara. Ces femmes ont été « un mal nécessaire dont dépendait une partie de l’économie locale », assure un autre habitant de la ville autonome. Plusieurs d’entre elles ont déjà perdu la vie depuis la fin de la contrebande. Ces femmes sont en « colère contre le système », note Cristina Fuentes, précisant que la plupart vivent aujourd’hui du commerce de détail dans la médina et gagnent environ 15 euros par semaine.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Femme marocaine - Transports

Aller plus loin

Espagne : un rapport s’alarme de la souffrance des saisonnières marocaines

L’Association andalouse des droits de l’homme (APDHA) vient de publier son rapport 2022 sur la situation des droits de l’homme aux frontières. Cette année, le rapport s’est...

Maroc : La pauvreté recule, la classe moyenne en hausse

Une étude récente vient contredire la perception répandue d’une société marocaine de plus en plus polarisée. Loin de s’éroder, la classe moyenne du royaume est en plein essor et...

Plus de 3 millions de Marocains ont basculé dans la pauvreté

Au Maroc, la pandémie et l’inflation ont causé une déflagration économique et sociale, se traduisant par une augmentation du taux de pauvreté. Cette année, 3,2 millions de...

Ceuta : de milliers de « femmes-mulets » au chômage

La fermeture du poste frontalier de Ceuta, sur décision unilatérale du Maroc, produit déjà un impact négatif sur la population marocaine. Environ 3 000 porteuses de marchandises...

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : des nouveaux bus dans tout le pays

Le ministère de l’Intérieur a annoncé le lancement d’un vaste plan de modernisation du secteur des transports urbains dans les collectivités du pays. Doté d’une enveloppe de 11 milliards de dirhams, ce programme promet de transformer en profondeur les...

Pilules abortives : le Maroc face à un gros problème

Des associations de défense des droits des consommateurs dénoncent la promotion sur les réseaux sociaux de pilules abortives après l’interdiction de leur vente en pharmacie, estimant que cette pratique constitue une « atteinte grave à la vie » des...

Maroc : le secteur de la location de voitures en péril

Le secteur de la location de voitures au Maroc est en crise. Les professionnels du secteur se plaignent de l’introduction d’un nouveau cahier de charges et de l’offre largement supérieure à la demande. La reprise n’est pas près de s’amorcer.

Maroc : les voitures de plus en plus chères !

Les Marocains paieront plus cher les voitures neuves en raison de l’obligation de respecter les normes « Euro 6 » pour l’homologation et l’immatriculation. Les professionnels du secteur appellent Mohamed Abdeljalil, ministre des Transports et de la...

Prix des billets de train : les Marocains en colère

Déjà confrontés à une hausse généralisée des prix, les Marocains doivent désormais faire face à une augmentation des tarifs des billets de train. Cette décision de l’Office national des chemins de fer (ONCF) a suscité la colère des usagers et certains...

Trains au Maroc : cinq géants du rail en lice pour un mégacontrat

L’appel à concurrence lancé par l’Office national des Chemins de fer (ONCF) pour acquérir 168 nouveaux trains, dont 18 trains à grande vitesse aiguise les appétits. Cinq constructeurs ferroviaires internationaux se battent pour décrocher ce méga contrat.

Retard des trains au Maroc : le ministre s’explique

Le ministre des Transports et de la Logistique, Abdessamad Kayouh, a apporté des éclaircissements sur les retards qui affectent les trains navettes et les trains navettes rapides au Maroc.

Les MRE ont boudé les locations de voiture cette année

Les professionnels du secteur de la location de voitures au Maroc se plaignent de la faible demande notée au cours de cette saison estivale par rapport aux années précédentes.

Le Maroc modernise ses gares routières

Le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, a levé un coin de voile sur le projet de modernisation et de professionnalisation des gares routières du Maroc.

Casablanca : du nouveau sur les circonstances du décès de trois femmes enceintes

On en sait un peu plus sur le décès de trois femmes enceintes dans une clinique privée de Casablanca lors de leurs accouchements par césarienne le 8 janvier 2025.