Achraf Hakimi : « on va aller le dépouiller »

Le parquet de Nanterre a requis le renvoi du footballeur Achraf Hakimi devant la cour criminelle départementale pour des accusations de viol. Cette réquisition marque une étape décisive dans l’information judiciaire ouverte en février 2023. Il appartient désormais au juge d’instruction en charge du dossier de décider s’il suit ou non l’avis du ministère public et ordonne la tenue d’un procès.

L’affaire a débuté le 27 février 2023. Alors qu’il assistait à la cérémonie des Best FIFA Awards à Paris, Achraf Hakimi a été informé de la publication d’un article du Parisien révélant l’existence d’une enquête le visant. Selon les déclarations de son ami Kylian Mbappé aux enquêteurs, le joueur du Paris Saint-Germain aurait été particulièrement affecté par la nouvelle : « Achraf a complètement craqué, il a pleuré. Il n’était vraiment pas bien. » Sa manageuse, Rita, a également témoigné de son choc et de son démenti immédiat, rapportant ses propos : « Il m’a expliqué qu’il avait bien commandé un Uber pour une femme qui était venue chez lui, qu’ils avaient passé une soirée calme, qu’ils s’étaient simplement embrassés et qu’ils n’avaient pas couché ensemble, qu’il ne s’était rien passé entre eux. »

Dès le début de la procédure, deux versions contradictoires ont été présentées. La défense d’Achraf Hakimi, par la voix de son avocate Me Fanny Colin, a immédiatement avancé la thèse d’un piège, affirmant que son client avait « été l’objet d’une tentative de racket ». En opposition, l’avocate de la plaignante, Me Rachel-Flore Pardo, a contesté cette lecture des faits, déclarant : « Rien dans ce dossier ne permet de caractériser une tentative de racket. », rapporte l’Équipe.

La plaignante, une jeune femme de 24 ans nommée Amélie*, a déposé une main courante le 26 février 2023. Dans sa déposition, elle a expliqué s’être rendue au domicile du joueur dans la nuit du 24 au 25 février après des échanges sur Instagram. Elle a décrit des baisers non désirés et une insistance croissante de la part du footballeur. Elle a affirmé lui avoir clairement signifié son refus d’avoir une relation sexuelle, mais que celui-ci lui aurait imposé une pénétration digitale. « Dans ma tête je me suis dit : c’est un cauchemar […] Je lui ai demandé d’arrêter à plusieurs reprises », a-t-elle relaté. Bien qu’elle n’ait pas souhaité porter plainte, le parquet de Nanterre s’est auto-saisi de l’affaire, comme la procédure le permet en matière de violences sexuelles.

L’analyse des communications téléphoniques est devenue un élément central du dossier. La plaignante a fourni des messages envoyés à une amie, Nadia*, qui semblaient indiquer une situation de détresse (« c très grave, il me viole »). Cependant, l’exploitation du téléphone de cette amie a révélé d’autres messages, échangés avant la rencontre, qui sont au cœur de la stratégie de la défense. Dans ces SMS, Nadia* suggérait à Amélie* de « choper les codes » et écrivait « on va aller le dépouiller ». Interrogées sur ces échanges, les deux jeunes femmes ont évoqué des « plaisanteries » et de « l’humour noir ».

Lors de son audition, Achraf Hakimi a nié l’ensemble des accusations, déclarant : « Elle ment ». Il a décrit des baisers consentis et a soutenu avoir mis fin à la soirée après avoir respecté le refus de la jeune femme d’aller plus loin. Il a également contesté avoir tenu certains propos rapportés par la plaignante, arguant de sa maîtrise limitée du français à l’époque des faits. La confrontation organisée en décembre 2023 n’a pas permis de résoudre ces contradictions, chaque partie maintenant sa version.

Deux expertises psychologiques de la plaignante ont été versées au dossier. La première note que son discours « paraît être sincère et authentique » tout en relevant des éléments à « nuancer », comme une possible « suggestibilité ». La seconde expertise souligne le décalage entre l’idée que se faisait la jeune femme de la rencontre et « la réalité du désir de l’autre », concluant que « Monsieur Hakimi n’a probablement aucune visibilité sur le dialogue intérieur d’Amélie ».

Plusieurs proches du joueur, dont Kylian Mbappé et le coiffeur Brice Tchaga, ont été entendus. Leurs témoignages ont convergé pour décrire un groupe d’amis conscient des risques liés à la notoriété et particulièrement vigilant sur la notion de consentement. Cet environnement, selon la défense, renforce la thèse d’un joueur prudent et conscient des enjeux. Achraf Hakimi a lui-même déclaré aux enquêteurs qu’il pensait être visé en raison de sa carrière et de sa situation financière.

Suite aux réquisitions du parquet, Me Fanny Colin a qualifié la démarche d’« incompréhensible et insensée au regard des éléments du dossier ». De son côté, Me Rachel-Flore Pardo a indiqué que sa cliente accueillait la nouvelle « avec un immense soulagement ». Le Paris Saint-Germain a réitéré sa position de mars 2023, indiquant faire « confiance à la justice » et apporter son « soutien » à son joueur.