Des tests en six questions imposées aux demandeurs des AES. C’est la trouvaille de la préfecture de Nanterre. Selon une copie de cet examen dévoilé par Médiapart, ils doivent répondre aux questions suivantes : « Quelle est la devise de la France ? », « Quelles sont les couleurs du drapeau français ? », « Qui est le président de la République ? », « Qui est la première dame de France ? », « Quel fleuve traverse la capitale française ? », « À quelle date a lieu la fête nationale de la France ? », « Où se sont déroulés les derniers Jeux olympiques ? ». Deux questions supplémentaires se trouvent en bas de la feuille frappée du logo de la préfecture. Les sans-papiers ont l’obligation de choisir « oui » ou « non » pour dire s’ils ont bénéficié, ou pas, d’une aide pour répondre aux six premières questions.
Ce n’est pas tout. Certains sans-papiers répondent à d’autres, notamment « votre épouse et vos filles sont-elles autorisées à travailler et à sortir comme elles le souhaitent ? » ou encore « Si votre mari voulait plusieurs femmes, seriez-vous d’accord ? ». Inès, avocate spécialisée dans le droit des étrangers, qui a accompagné l’un de ses clients à la préfecture du 92 dans le cadre d’une demande d’AES, dénonce des « questions sexistes ». Elle soulève le caractère « illégal » de cette démarche. Cette procédure s’est mise en place « après la circulaire Retailleau », a souligné l’avocate, indiquant que c’est « stressant et intimidant » pour les demandeurs ».
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Bien qu’aucune loi ne les oblige à répondre à ces questions, les sans-papiers sont menacés de ne pas recevoir leur récépissé s’ils refusent, fait savoir Nadia, juriste dans un cabinet d’avocats, rappelant que le récépissé permet aux sans-papiers de vivre régulièrement en France en attendant que le titre de séjour leur soit délivré. Selon elle, si les sans-papiers étaient Ukrainiens, ils n’auraient pas eu droit à de telles questions. « Tout est lié à l’islam, en fait », a dénoncé la juriste.
L’avocat Laurent Charles spécialisé dans le droit des étrangers, dénonce un traitement « déloyal », un « excès de zèle » de la part de la préfecture des Hauts-de-Seine, mais aussi d’une mise en place « d’un un système de vérifications de plus en plus poussé, pour trier et refuser plus facilement des dossiers ou fonder les OQTF ». L’homme de droit fait remarquer que cette méthode rappelle l’entretien que doivent passer les candidats à la naturalisation. Il craint que les réponses des demandeurs puissent être utilisées un jour contre eux en justice. « Pourquoi ne pas produire ces fiches un jour en justice ? », a-t-il questionné auprès du même média.
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Interrogée, la préfecture de Nanterre rappelle que « la procédure d’admission exceptionnelle au séjour doit rester exceptionnelle ». Ces questions posées aux demandeurs de titres de séjour visent à s’assurer de leur « maîtrise de la langue française, mais également leur adhésion aux valeurs de la République », a-t-il expliqué.