
Gardiens de voitures : Casablanca met fin à l’anarchie
La ville de Casablanca réorganise le secteur du gardiennage automobile, afin de mettre fin à l’anarchie qui le caractérisait jusqu’ici. Du moins c’est ce qu’elle tente de faire...
Au Maroc, la fin du diktat des gardiens de parking illégaux communément appelés « gilets jaunes » n’est pas pour demain. Les automobilistes continuent de payer des tarifs illégaux. Un énorme manque à gagner pour les conseils communaux.
Les citoyens continuent de subir la loi des « gilets jaunes ». Ils paient quotidiennement des frais allant de 10 à 20 dirhams pour stationner leurs véhicules dans des parkings organisés ou anarchiques, au lieu de 5 dirhams fixés par les conseils communaux. « Le chantage est devenu une règle quotidienne, certains gardiens réclament 10 dirhams ou plus pour quelques minutes seulement, et certains vont jusqu’à menacer ouvertement : « “Si tu la laisses sans payer, tu la retrouveras rayée” », raconte à Al3omk un délégué commercial dans une entreprise pharmaceutique. Un calvaire pour cet homme qui s’arrête dans des dizaines d’endroits chaque jour lors de ses visites dans des cliniques et centres de santé à Casablanca.
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Selon une enquête télévisée, le marché du gardiennage des voitures génère un chiffre d’affaires quotidien dépassant les 8 millions de dirhams, soit plus de 3 milliards de dirhams par an, circulant hors des circuits officiels et sans aucun suivi fiscal. Le nombre de véhicules circulant au Maroc dépasse les quatre millions, dont les propriétaires paient quotidiennement entre 2 et 5 dirhams, précise l’enquête. Un petit calcul donne : si chaque propriétaire de véhicule ne versait que 2 dirhams par jour, le volume des transactions atteindrait environ 8 millions de dirhams par jour, soit 240 millions de dirhams par mois, ce qui équivaut à 13 % du budget du ministère de la Santé pour l’année 2021.
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Selon le professeur Jawad Elasri, enseignant en finances locales à l’université Hassan II, le chaos autour de l’exploitation des biens communaux a atteint des niveaux inacceptables. « Des individus s’organisent en bandes se partageant les quartiers, les routes et les trottoirs sans aucun fondement juridique, et sous les yeux des autorités », fait-il observer. À l’en croire, certaines personnes sont allées jusqu’à ériger des barrières, notamment dans les environs de Kénitra, pour empêcher le passage des voitures et des motos, et ce, en violation flagrante de la loi.
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« Où est l’État ? Où est le ministère de l’Intérieur ? Où sont les autorités territoriales ? Où est le ministère des Finances ? Comment permet-on à des parties de s’approprier les biens communaux et de percevoir des redevances sans aucune intervention ? », questionne Elasri, insistant sur le fait que ces pratiques constituent une atteinte grave à l’autorité de l’État, un blocage de la volonté du législateur, et qu’elles contribuent à l’évasion fiscale et sapent le principe de justice fiscale. Les conseils communaux ne possèdent pas la compétence juridique pour louer les ruelles et voies publiques, et ne peuvent obliger les citoyens à payer des redevances pour leur usage, a précisé pour sa part un avocat au barreau de Rabat.
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Selon ses explications, le principe de base pour ces espaces est la gratuité, à l’exception des parkings aménagés à vocation commerciale. La perception de redevances par ceux que l’on appelle les « porteurs de gilets » sans base légale constitue un acte assimilable à une escroquerie, du chantage et une fraude, a souligné l’homme de droit, appelant les victimes à saisir le parquet. Selon ce dernier, seul le législateur fixe les tarifs. Quant aux collectivités locales, elles ne peuvent imposer de nouvelles tarifications qui alourdissent les charges des conducteurs.
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Le site a recueilli le témoignage d’un gardien de voitures à Casablanca. Il dit travailler sous les ordres de « personnes invisibles » qui contrôlent tout, et qu’il ne bénéficie pas réellement des sommes importantes perçues. À l’en croire, les revenus quotidiens atteignent parfois 10 000 dirhams dans certains points névralgiques, notamment durant les vacances, alors que sa part ne dépasse pas 300 à 500 dirhams. « Les gros bénéfices ne nous reviennent pas, nous travaillons sans aucune protection juridique, sans retraite ni couverture médicale, et notre avenir devient de plus en plus précaire », a-t-il précisé.
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Ce témoin appelle à organiser et à réglementer ce secteur. « Les gardiens de voitures ne sont pas toujours les bourreaux, mais souvent des victimes d’un système injuste qui les oblige à travailler dans l’ombre », a-t-il conclu.
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