Ceuta : le Médiateur contre le rapatriement de mineurs marocains

14 août 2021 - 16h20 - Espagne - Ecrit par : P. A

Le Médiateur a demandé vendredi au ministère de l’Intérieur de suspendre l’opération de rapatriement au Maroc des mineurs non accompagnés de Ceuta. L’institution a été saisie de plusieurs plaintes émanant d’ONG de défense des droits des enfants qui dénoncent le manque de garanties légales dans la procédure.

Dans une lettre adressée à l’Intérieur qui a lancé vendredi une opération de rapatriement de quelque 800 mineurs marocains arrivés à Ceuta en mai dernier, le Médiateur a demandé aux autorités de suspendre cette opération et de se conformer à la loi organique sur les droits et libertés des étrangers en Espagne et leur intégration sociale. Selon cette loi, l’Intérieur doit demander un rapport sur la situation familiale de l’enfant à la représentation diplomatique du pays d’origine, avant l’ouverture d’une procédure de rapatriement, fait savoir RTVE.

À lire : Sebta : rapatriement massif vers le Maroc d’enfants marocains

« L’ouverture de la procédure doit être convenue après avoir entendu le mineur, et sur la base du rapport des services de protection de l’enfance et du ministère public, l’administration statuera sur le retour dans son pays d’origine, dans celui où se trouvent ses proches ou, à défaut, de son séjour en Espagne », ajoute le Médiateur dans sa lettre.

Des organisations de défense des droits des enfants, comme Save the Children ou ELIN, ont déposé vendredi une plainte auprès du Médiateur pour dénoncer le non-respect des garanties légales dans la procédure de rapatriement des mineurs marocains. Ces associations entendent également saisir le tribunal compétent de Ceuta pour demander la suspension de cette opération de rapatriements.

À lire : Tous les migrants mineurs quitteront Ceuta avant septembre

Pour Save the Children, toute expulsion collective est illégale. « Nous demandons une gestion individualisée et qu’aucun mineur ne soit expulsé contre sa volonté. Leur protection doit être garantie », a soutenu l’ONG qui rappelle que beaucoup de ces mineurs ont confié, lors des entretiens qu’elle a eus avec eux fin juin et début juillet, avoir été victimes de violence physique, d’abus ou de mauvais traitements au Maroc avant d’arriver en Espagne.

À lire : L’Unicef s’inquiète pour les mineurs marocains à Sebta

L’UNICEF aussi n’approuve pas ce rapatriement collectif de mineurs qu’elle considère comme injustifié. « C’est une mauvaise surprise. Nous n’avions pas été informés et nous sommes très inquiets », déclare-t-elle, précisant que « l’intérêt supérieur des enfants doit être garanti et cela ne peut être possible sans évaluations individualisées ». « Il est indispensable de connaître l’histoire de chacun d’eux, leurs besoins et leurs vulnérabilités. Il faut les écouter et tenir compte de leur protection et de leur volonté », souligne l’UNICEF.

De son côté, le ministère des Droits sociaux se dit disposé à travailler avec l’Intérieur pour mettre en place « un protocole de regroupement familial des mineurs non accompagnés, conforme aux réglementations nationales et internationales ». Mais pour le moment, il assure n’avoir reçu « aucune réponse à ce sujet » de la part de l’Intérieur.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Immigration clandestine - Espagne - Ceuta (Sebta) - Enfant - Rapatriement

Aller plus loin

Ceuta : les familles marocaines déconseillent aux mineurs de rentrer au Maroc

Les regroupements familiaux de mineurs marocains avec leurs familles au Maroc sont rares après le déclenchement de la crise migratoire ouverte en mai avec l’arrivée massive de...

Mineurs marocains : l’ONU dénonce une violation du droit international

L’ONU a dénoncé dimanche le rapatriement au Maroc des mineurs marocains lancé vendredi par le ministère de l’Intérieur espagnol, soulignant que ces retours « violent le droit...

L’Unicef s’inquiète pour les mineurs marocains à Sebta

Face à la situation critique que vivent les mineurs marocains non accompagnés entrés à Sebta en mai dernier, l’Unicef a insisté auprès de l’Espagne pour l’adoption de mécanismes...

Ceuta : des ONG dénoncent les retours de mineurs sans assistance juridique

Plusieurs organisations de défense des droits des enfants comme No Name Kitchen, Maakum Ceuta, ELIN, Fondation Racines et Andalucía Acoge sont contre le rapatriement au Maroc,...

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : les femmes divorcées réclament des droits

Au Maroc, les appels à la réforme du Code de la famille (Moudawana) continuent. Une association milite pour que la tutelle légale des enfants, qui actuellement revient de droit au père, soit également accordée aux femmes en cas de divorce.

Des soldats marocains accusés d’avoir tiré à balles réelles sur des migrants

L’Espagne a ouvert une enquête concernant des allégations de tirs sur des migrants tentant de rejoindre les îles Canaries depuis le Maroc. Une association caritative affirme que des soldats marocains auraient ouvert le feu sur ces migrants,...

La justice espagnole sépare une famille marocaine : Nasser Bourita réagit

Suite à la décision de la justice espagnole de retirer la garde des enfants à une famille marocaine établie dans le nord du pays, le ministère des Affaires étrangères a tenu à commenter cette décision et fournir quelques détails.

Maroc : les femmes divorcées appellent à la levée de la tutelle du père

Avant l’établissement de tout document administratif pour leurs enfants, y compris la carte d’identité nationale, les femmes divorcées au Maroc doivent avoir l’autorisation du père. Elles appellent à la levée de cette exigence dans la réforme du Code...

Ouverture exceptionnelle de la frontière entre le Maroc et l’Algérie

La frontière entre l’Algérie et le Maroc a été exceptionnellement ouverte cette semaine pour permettre de rapatrier le corps d’un jeune migrant marocain de 28 ans, décédé par noyade en Algérie.

Au Maroc, le mariage des mineures persiste malgré la loi

Le mariage des mineures prend des proportions alarmantes au Maroc. En 2021, 19 000 cas ont été enregistrés, contre 12 000 l’année précédente.

Maroc : plus de droits pour les mères divorcées ?

Au Maroc, la mère divorcée, qui obtient généralement la garde de l’enfant, n’en a pas la tutelle qui revient de droit au père. Les défenseurs des droits des femmes appellent à une réforme du Code de la famille pour corriger ce qu’ils qualifient...

Maroc : un « passeport » pour les nouveaux mariés

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) appelle à la mise en place d’un « passeport » ou « guide » pour le mariage, dans lequel seront mentionnées les données personnelles des futurs mariés, ainsi que toutes les informations sur leurs...

Samira Saïd : la retraite ?

La chanteuse marocaine Samira Saïd, dans une récente déclaration, a fait des confidences sur sa vie privée et professionnelle, révélant ne pas avoir peur de vieillir et avoir pensé à prendre sa retraite.

Vers une révolution des droits des femmes au Maroc ?

Le gouvernement marocain s’apprête à modifier le Code de la famille ou Moudawana pour promouvoir une égalité entre l’homme et la femme et davantage garantir les droits des femmes et des enfants.